Photo-graphies et un peu plus…

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Peut-être l’avez-vous remarqué mais j’ai beau être rentrée depuis bientôt deux semaines, j’ai finalement très peu illustré ces textes quotidiens par des images réalisées depuis. Pourtant, lors de mes sorties, qui, elles, se sont espacées – par deux fois, je n’ai pas ressenti le besoin de sortir pendant 2 jours de suite –, j’ai bien mon appareil photo en bandoulière, prête à déclencher le cas échéant. Je ne le fais que très rarement. Car, comme je l’ai écrit la semaine dernière, c’est le côté oppressant et contre nature de la ville que je continue à voir depuis mon retour. Et c’est ce qui finit par entrer dans ma boîte – encore que, finalement, je me suis aussi rapidement épargné ce genre d’images : des photos de chantiers d’immenses bâtiments aux façades éventrées laissant voir leurs entrailles climatiques, électriques, aqueuses en cours de greffe, des tubes, du métal, du béton et du verre partout, comme des corps malades et encore inertes, raccordées à une vie artificielle, alors qu’en Ile-de-France, il y avait, fin 2018, déjà 3,2 millions de mètres carrés de bureaux vides (1). Certes, depuis quelques années, face à cette ineptie, les programmes de transformation d’une partie de ces espaces vacants en logement se multiplient, mais le plus simple ne serait-il pas de s’interroger en amont sur la pertinence de lancer de tels chantiers ? Par conséquent, je ne veux pas utiliser ces photos. Ceci dit, peut-être serait-ce l’occasion de le faire aujourd’hui. Nous verrons à la fin de l’étape d’écriture, c’est en général à ce moment là que je réfléchis à la photo que je vais utiliser.

Dans la continuité de cette remarque, quand je lis que les plages sont toujours fermées et le seront peut-être jusqu’à cet été – on peut pourtant se sentir très très seul sur les immenses plages atlantiques –, que les chemins, sentiers, forêts, parcs, lacs, rivières le sont aussi, que des drones et des hélicoptères sont mobilisés pour traquer, en collaboration avec des motards au sol, les randonneurs en montagne – entre 816 et 1690 € de l’heure de vol d’un hélicoptère selon le Sénat soit a minima entre 6 et 13 contraventions par heure si l’on part du principe, faux, que là se limitent les coûts (2) –, j’ai l’impression que c’est la Nature elle-même qui est visée. La Nature, qui n’est pas unique loin s’en faut, dans ce qu’elle offre de liberté, de bien-être, de joie, de respiration, de fuite aussi, où l’on se promène, médite, se repose, contemple, se détend, se ressource, observe, ressens, se reconnecte à plus grand que soi, au sacré, se réfugie, aime, s’éveille, s’initie…

« Aucun homme n’a jamais imaginé à quel point le dialogue avec la nature environnante affectait sa santé ou ses maux » écrivait Henry David Thoreau (le revoilà !). Ces derniers mois, combien de livres, d’expositions, de conférences, sur les bienfaits de la Nature en général, des arbres en particulier ? Combien de recherches, sérieuses, se concluant par le fait que notre santé est intimement liée à notre rapport à la Nature, que ses bienfaits augmentent avec le temps passé à l’extérieur (à partir de 2h par semaine serait un minimum a priori) ? « Un rapport privilégié avec la Nature non seulement initie à une autre « façon » de la voir (Gould, 2001), mais surtout constitue une rencontre avec soi-même (Ormiston, 2003), un retour sur soi bénéfique. Il permet dans certains cas une véritable transformation de soi » écrivaient en 2011 les sociologues Stéphanie Chanvallon et Stéphane Héas (3). L’accès à la Nature, « responsable » bien sûr – c’est le nouveau mot à la mode –, alors que nous traversons une situation d’enfermement non naturelle, ne serait-ce pas un moyen de nous aider à mieux la vivre ? Sous prétexte qu’un éventuel accident mobiliserait des moyens logistiques plus utiles à la lutte contre le coronavirus, l’Etat percevrait donc cette Nature – pas plus dangereuse qu’une casserole d’eau bouillante renversée sur le visage ou qu’une malencontreuse rencontre avec un camion sur un passage piéton – vers laquelle nous tendons instinctivement, comme une menace. Pourquoi ? Est-ce « juste » de l’infantilisation, car les Français ne savent pas se tenir ? Y a-t-il une volonté calculée de ne laisser aucun répit aux citoyens en leur interdisant ces évasions salutaires ?

Je m’étais pourtant encouragée à essayer de ne pas chercher à comprendre ce qui, de mon point de vue, n’avait pas de sens… Mais pas de m’interroger, donc tout va bien ! Je cherche cependant des références historiques et solides allant dans le sens de l’hypothèse que cette conjonction d’interdictions me fait formuler, à savoir cette perception négative et quasi subversive de la Nature par l’Etat de droit. La Nature, par opposition – simpliste et rapide – à la ville, dans les fictions, c’est l’endroit où se réfugient les groupes de résistants, les rebelles qui veulent échapper au pouvoir autoritaire et dictatorial en place, à un système sans valeur à leurs yeux, d’où ils renaissent ou organisent la riposte. Des exemples de genres très variés ? Fahrenheit 451,Les fils de l’homme, The Lobster, Robin des bois, Captain Fantastic… En quête d’une référence sur Minority Report, l’adaptation faite par Spielberg d’une nouvelle de Philip K Dick, je relis des passages de mon mémoire rédigé il y a 15 ans sur la représentation des manipulations génétiques et du clonage dans le cinéma américain de 1986 à 2005, et la façon dont ils questionnent l’humanité. Un prétexte, presque, pour me pencher sur un tas de sujets satellites comme le profil des sociétés dans lesquelles ces histoires émergeaient, la montée des inégalités sociales, les rapports homme-femme, les relations entre science et religion, la virtualisation des rapports humains au service d’une manipulation collective, la désexualisation purificatrice et prophylactique de la société… et il me semble que je parcours un livre d’Histoire, tant tout ce que j’y décris – sur la base de mon corpus de films de l’époque donc – s’est vérifié depuis… Je connais la force et la puissance de l’anticipation mais c’est toujours surprenant de constater à quel point l’humanité semble suivre un scénario déjà écrit depuis longtemps.

Ah voilà une piste intéressante (merci Coralie !). Dans l’essai « Fugitif, où cours-tu ? », l’anthropologue Dénètem Touam Bona  écrivait en effet : « la forêt est un espace strié de toutes parts, mais ses stries sont celles du zèbre, celles d’une tenue de camouflage. Longtemps, les forêts européennes abriteront proscrits, brigands, outlaws (figure de Robin Hood), bandes et minorités en rupture de ban, de sorte qu’en Occident la lutte contre les illégalismes et jacqueries populaires prendra souvent la forme d’une déforestation » (4). En est-on toujours à raser les forêts pour y voir plus clair et traquer les hors-la-loi, comme tendrait à nous le faire penser la manière dont les pouvoirs publics appréhendent les ZAD ? La réponse est-elle dans la question ?

  1. http://www.driea.ile-de-france.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/document_synthese_-_septembre_2019_-_web_.pdf
  2. https://www.lepoint.fr/societe/gilets-jaunes-les-helicopteres-ont-deja-coute-un-million-d-euros-22-03-2019-2303127_23.php
  3. https://www.cairn.info/revue-natures-sciences-societes-2011-4-page-355.htm
  4. https://www.cairn.info/fugitif-ou-cours-tu–9782130735571-page-79.htm

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Cette injonction, nous la lisons et l’entendons tous les jours dans les news locales depuis l’instauration du confinement. « Bubble », c’est doux, c’est plein de rondeurs, c’est rassurant, c’est irisé, ça laisse passer la lumière, c’est protéiforme, c’est magique, on s’y glisse, comme dans une couette en plein hiver, avec la certitude d’être au chaud… Il sonne, en tout cas, mieux à mes oreilles que le terme foyer, qui, d’après le dictionnaire est d’abord le « lieu où l’on fait du feu » avant d’être celui où « vit une famille »… Ce qui, dans le fond, est un résumé aussi cruel que réel de ce qui, malheureusement, se passe dans certaines maisons actuellement.

Face au temps, qui peut-être n’existe pas ou plus (voir un de mes précédents blabla), ce « stay in your bubble » – à la fois humain et géographique puisqu’il inclut les personnes avec lesquelles vous vivez et votre quartier, que vous ne pouvez quitter – redessine totalement notre espace. S’il s’est drastiquement rétréci ces dernières semaines, paradoxalement, j’ai l’impression que les distances n’ont jamais été aussi réelles. C’est-à-dire qu’aujourd’hui, ce qui est loin est « réellement » loin.
L’espèce humaine n’étant pas en mesure d’augmenter la durée d’une journée, elle s’est en effet appliquée à faire ce qui était dans ses cordes pour contourner cette contrainte forte : multiplier ce que nous pouvions faire en un jour. Des gens brillants ont ainsi conçu des machines volant à 1 000 km/h, faisant des bouts du monde des voisins de palier. Aujourd’hui, ces oiseaux de métal étant cloué au sol, les 18 850 km qui me séparent de la France redeviennent une distance infinie, presque une aventure. Sans doute Clément Ader, qui n’avait parcouru que 50 mètres lors de son premier « vol » en 1890 à bord d’Eole, l’engin qu’il avait fabriqué en s’inspirant de la chauve-souris (qui n’apporte donc pas que des virus), ne se doutait-il pas que son invention allait à ce point révolutionner notre appréciation de l’espace, du temps et au final, du voyage.

M’en plaindre serait malhonnête : j’ai beaucoup usé – de l’avion, du train, du bateau, du bus, de la voiture – pour aller découvrir l’ailleurs. C’était ça l’urgence, voir, sentir, toucher le monde avec mes propres yeux (c’est pourquoi je n’ai jamais voulu lire de récits de voyage a priori par exemple, même historiques). Je me disais que si la Terre avait été un point (ce qu’elle est depuis l’espace, ne nous leurrons pas), je serais naturellement restée au même endroit, mais comme c’est une sphère, la parcourir me semblait plus logique. Je l’ai fait instinctivement, selon mes envies, conscientes et inconscientes, et non pas avec un objectif quantitatif…

Voilà qui me renvoie à un après-midi de mai 2017, à Taïwan où j’ai séjourné quelques mois. Direction Puli, au centre géographique du pays, où se trouve l’imposant Monastère bouddhiste Chung Tai Chan. J’envisageais à l’époque de faire un sujet au long cours sur ce lieu organisé tel un microcosme. Des contacts locaux m’avaient permis d’organiser une visite de l’école et du temple. Une nonne (parlant anglais) avait été chargée de me faire découvrir le temple, incluant les étages fermés au grand public. Après m’être brièvement présentée, elle m’avait demandé combien de pays j’avais visité jusqu’à présent. A vrai dire, c’est une question que je ne me suis jamais posé. « Je ne sais pas » lui avais-je donc répondu, ajoutant que ce n’était pas important, que je voyageais pour élargir mes horizons, aller à la rencontre d’autres cultures, sillonner d’autres paysages, parce que j’étais curieuse… Après coup, j’ai pensé que c’était une question « piège », une jolie façon de sonder la personne que j’étais avant de me guider dans ce lieu sacré, d’une incroyable beauté et dégageant une énergie telle qu’en atteignant et découvrant le dernier étage, j’avais littéralement éclaté en sanglot, prise d’une émotion si forte qu’il m’avait fallu plusieurs minutes – une éternité ! – pour retrouver mes esprits…
Etrangement, plusieurs fois depuis mon arrivée en Nouvelle-Zélande – avant même que le monde ne bascule – et pour la première fois dans ma vie, je me suis dit que c’était peut-être l’un de mes derniers voyages, qu’il était l’heure de creuser un autre sillon… L’avenir nous le dira, aussi incertain soit-il…

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Au fait, samedi, avec une satisfaction non dissimulée, j’ai trouvé du chocolat pâtissier et de la farine au New World, transformant instantanément notre envie de gâteau au chocolat en quasi-réalité. Pour mémo, New World est le nom – fort à propos mais encore un peu flou quant à la ligne éditoriale qui va en émerger – de l’enseigne où nous allons remplir placard et frigo pour une semaine, presque à la même fréquence qu’à Paris finalement. La distance inter-espèce, les masques, gants, barrières de protection entre caisses, désinfectants, produits manquants (rares toutefois), stratégies d’évitement dans les rayons en moins évidemment. Je ne sais comment cela se passe chez vous (j’écris cela comme si j’étais chez moi ici, ce qui n’est pas le cas, si ce n’est temporairement), mais, dans le Nouveau Monde, certains produits en vrac – graines, céréales, légumes et fruits secs, petits pains, muffins, croissants, crumpet… –  ont été pré-sachetés de telle sorte que chacun peut évacuer le stress lié à un éventuel contact de ses cubes de gingembre cristallisé avec une main, une pelle ou des postillons portant en eux le germe de la maladie. Ceci dit, les sachets ayant tous des poids différents – masse pour les puristes –, la main baladeuse est aussi tentée de les soulever, donc toucher, un à un, pour trouver le poids qu’elle aurait pris si elle avait pu le remplir elle-même. Mais c’est assurément mieux… Et dans les faits, il me semble qu’aucune transmission du virus via un produit alimentaire ou son emballage n’a été recensée. Vous me direz.

Oui, je dis « vous » comme si je vous écrivais, à vous, comme si vous n’étiez qu’Un, comme si vous étiez Tout, qui que vous soyez et où que vous soyez, parfois sans vous manifester, parfois en me gratifiant de commentaires toujours appréciés ou de ces démonstrations sentimentales digitales et iconiques désormais intégrées à notre grille de lecture : j’aime, j’adore, je me gausse, je suis waouh mais waouh quoi, bouh je suis triste… Décalage horaire oblige, je sais que certains parcourent mes billets au réveil, d’autres en trempant leur tartine dans leur thé du matin, certains les lisent jour après jour, d’autres dans le désordre, il en est même qui m’avouent avoir hâte de les découvrir. Hé, ho, les amis, vous me mettez la pression là J !

D’ailleurs, cela me fait penser que je n’ai toujours pas envoyé mes cartes postales, pourtant achetées au fur et à mesure du voyage pour refléter au mieux la diversité des paysages néo-zélandais. Au fond, cette attention ne change pas grand-chose puisque chaque carte n’a qu’un seul et unique destinataire. Je pourrais donc prendre 15 fois la même et écrire 15 fois la même chose sans que personne ne le sache… Mais j’aime choisir une carte en fonction de la personne à qui elle est destinée, ce qu’elle aime, ce à quoi elle est susceptible d’être sensible… Quoi qu’il en soit, le tas de cartes est sur le coffre qui trône au milieu du salon. L’idée était de les écrire toutes depuis Auckland, où nous devions passer nos derniers jours, au calme, avant de filer vers Buenos Aires. Comme vous le savez, le programme a légèrement évolué. Et je m’interroge… Que faire de ces cartes ?

Maintenant que le monde a changé, je ne peux plus naïvement écrire : « La Nouvelle Zélande est un pays magnifique, magnétique même ! Nous passons notre temps à nous émerveiller devant tant de beautés naturelles que nous parcourons à pieds, à vélo, en voiture, en train, en bateau. Cela vous plairait ! (…) Tout se passe parfaitement bien so far. Nous avons l’étrange sensation d’être complètement coupées du monde et ça fait un bien fou ! (…) Le retour en ville et dans notre appartement risque d’être un peu difficile mais d’autres territoires nous attendent. (…) J’espère que tout va bien pour vous ! Nous avons hâte de vous voir et de vous serrer dans nos bras. »

Et je ne peux pas écrire non plus : « Salut… je voulais te parler de cet incroyable lac à l’eau laiteuse et turquoise, en plein cœur de l’Ile du Sud, le long duquel nous avons marché. Le vent était si fort ce jour-là que les ombres des nuages semblaient danser à sa surface. C’en était hypnotisant ! Mais franchement, à quoi bon, nous savons toi et moi que tout cela n’a plus aucun sens, que depuis cette petite balade insouciante dans les Alpes du sud, ce fichu virus qui n’était qu’une grippette en Chine a essaimé partout dans le monde, bousculant tout à une échelle inédite, individuelle et collective, révélant les failles de nos systèmes et l’étendue de nos interconnexions, contaminant 1,3 millions de personnes, en tuant 72000… Alors, mes petites vacances en Nouvelle-Zélande… »

Un temps, j’ai pensé les écrire (version : le monde d’avant 2020, en me mettant dans les conditions de l’ignorance), les photographier puis les envoyer par mail à leurs destinataires respectifs (puisque les échanges postaux sont aussi limités). Puis, j’ai pensé que cela pourrait être le point de départ d’un nouveau projet collectif… Nous avons tous, en effet, des cartes non envoyées et/ou glanées désespérées au fond de nos tiroirs. Chacun pourrait alors raconter dans quel contexte il s’est retrouvé en possession de cette carte, un souvenir, et l’envoyer à une personne qu’il ne connaît pas mais dont le nom lui a été soufflé par un ami… et ainsi de suite… sauf que non…

Bref, l’envie sous-jacente était surtout de « faire quelque chose » depuis cet endroit privilégié où je vis calmement et d’où je vois – sidérée et spectatrice – se dérouler cette catastrophe mondiale – au sens de la physique tel qu’évoqué par mon amie Laurence il y a quelques semaines – comme une pelote de laine de mérinos lâchée depuis le dernier étage d’un immeuble moderne du centre ville de Wellington. C’est ainsi que s’est progressivement imposée l’idée de lancer, avec quelques mois d’avance, la 6eédition d’Objectif3280.

Cette année 2020, nous fêtons en effet les 10 ans de ce projet et nous imaginions une édition en fanfare en fin d’année plutôt. J’en vois certains froncer les sourcils. Objectif3280 ? Je le présente brièvement ainsi sur son site : « Objectif3280 est un projet photographique participatif, mondial, en ligne et en temps réel où toutes les photos sont, de génération en génération, liées les unes aux autres par des associations d’idées ». A l’oral, je le compare souvent à un cadavre exquis géant, où ce n’est pas une personne qui propose une suite, ici à une photographie, mais trois. Autrement dit, tout cela est exponentiel. Je crois que tout le monde est désormais familier avec cette notion mathématique…

Objectif3280 est né dans ma tête en 2009 je crois mais il n’a pris forme qu’en 2010 grâce à Coralie, à ses talents informatiques et sa patience. Nous étions alors au Canada pour un an. Comme ça, sur un bout de table aussi bancal que le sol de la cuisine où elle était perchée, une idée est devenue réalité. Quand nous avons envoyé le premier mail annonçant l’existence du projet et son lancement, nous ne savions absolument pas si, de l’autre côté, vous encore donc, quelqu’un allait réagir et se prendre au jeu. Et quand, au bout de quelques minutes d’un intense suspense à rafraîchir compulsivement la page du projet (vous savez, comme le personnage de Zuckerberg à la fin de « Social Network »), une photo est arrivée – Laurence, la tienne d’ailleurs il me semble ! –, poursuivant ainsi l’histoire que j’initiais avec la mienne, nous avons poussé un grand cri de joie.

En tout, nous avons organisé 5 éditions, qui, grâce au bouche à oreille des participants, IRL ou IDL, ont réuni 736 personnes vivant dans 57 pays. Chaque édition requiert un important travail en amont et nous mobilise, à divers niveaux, pendant le mois qu’il dure. Et chaque édition fait vibrer mon cœur comme aucun autre de mes projets artistiques, personnels ou non. Parce qu’à travers lui, j’ai la sensation de faire partie d’un tout, j’ai la sensation que ce tout là vibre à l’unisson, j’ai la sensation que nos différences et divergences n’ont plus aucun sens, j’ai la sensation que nos ondes respectives créent de la joie, de la beauté, du lien, de l’intelligence, du sens. Et alors, je me dis que tout est possible. Aujourd’hui, depuis mon bout du monde, malgré la complexité de la situation, je me dis que ce projet prend tout son sens, et j’ai envie de nous sentir à nouveau ensemble, simplement, légèrement, autour d’une petite œuvre d’art dont nous serons tous les co-auteurs…

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Voilà, cela fait une semaine que la Nouvelle Zélande est confinée sur les quatre prévues. Tous les jours à 13h, avec un souci extrême de transparence, un ou plusieurs membres du gouvernement donne(nt) une conférence de presse pour faire le point, très humblement et très factuellement, sur la situation sanitaire du pays ainsi que sur les nouvelles mesures prises depuis la veille concernant les aides aux entreprises et travailleurs, le soutien aux personnes en situation de précarité, les déplacements autorisés, les plaintes pour non respect du confinement (un site internet a été créé par la police pour les recueillir), l’approvisionnement des supermarchés, l’après lockdown…

L’avantage de la Nouvelle Zélande sur beaucoup d’autres pays est d’avoir été touchée par le coronavirus plus tardivement. D’une certaine manière, et indépendamment de sa singularité d’île qui appelle des contraintes spécifiques – ce matin, je me demandais d’ailleurs s’il existait d’autres pays à être ainsi coupés physiquement en deux parts égales et là, tout de suite, maintenant, alors que j’écris ces lignes, je réalise qu’en rendant ses frontières peureuses et non plus poreuses, chaque pays était en train de devenir une île sans le concours de la tectonique des plaques –, c’est comme si la Nouvelle Zélande était toujours dans le passé tandis que différents futurs potentiels avaient déjà émergé un peu partout ailleurs. Avoir un peu de temps devant soi permet souvent de réfléchir différemment, idéalement plus posément. Et ainsi, idéalement encore, de prendre des décisions plus sereinement, modulo le stress inhérent à cette situation extra-ordinaire. Grâce à vous, par exemple, il n’y a pas de pénurie de papier toilettes ici ! Grâce à vous, les quarantaines des nouveaux arrivants ont été décidées tôt, limitant très certainement la transmission communautaire ! Grâce à vous, le confinement a été décrété avant que la situation ne devienne incontrôlable sur une île de 5 millions d’habitants ! Grâce à vous, les tests se mettent en place plus rapidement ! Grâce à vous, les soignants, les personnels des supermarchés, ceux continuant à travailler bénéficient de mesures de protection (EPI, vitres de protection, produits désinfectants…). Grâce à vous, un soutien psychologique a été mis en place pour épauler les personnes vivant mal le confinement pour une raison ou une autre. Et il y a sûrement plein d’autres exemples (et puis, aussi, des manques, n’idéalisons pas trop non plus : plus de gel depuis des semaines, plus de masques non plus pour le grand public). Comme quoi, être dernier, ou presque, n’est pas toujours une tare…

Donc, hier, il y avait 797 cas confirmés dont 74 probables, 13 personnes à l’hôpital dans un état stable, un décès (survenu ce week-end). Plus de 80% des cas sont liés à un voyage à l’étranger ou à un contact avec une personne ayant voyagé à l’étranger, sachant que ces dernières étaient tenues de se mettre en quatorzaine depuis mi-mars, et que les deux tiers des cas (je n’ai pas le chiffre précis à disposition) ont été déclarés depuis l’instauration du confinement. Vous pensez sûrement que c’est peu au regard de ce que vous vivez. Je suis d’accord avec vous. Pourtant, nous guettons jour après jour les nouveaux chiffres, en essayant vainement de les interpréter, « c’est plus qu’hier mais ils font aussi plus de tests donc c’est logique », « c’est moins qu’hier, ça va se tasser, c’est bon signe »… Certes, cela ne sert pas à grand chose pour le moment de tirer des conclusions d’un système à plus d’inconnues que d’équations, mais difficile de se tenir éloigné des chiffres. A leur manière, et en partant du principe qu’ils ne sont pas truqués, déchargés de tout affect, ces chiffres aident à contenir son imagination. D’ailleurs, les chiffres du jour viennent tout juste d’être partagés (je mets du temps à écrire ces textes…) : 49 nouveaux cas confirmés et 22 probables. Contre 74 / 13 hier. Je n’en tirerai aucune conclusion.

Quid de ma vie de confinée ? Eh bien, tout va bien ! D’autant que tout se passe calmement ici à Wellington. Par ailleurs, en tant qu’indépendante travaillant à domicile depuis des années, je dispose d’un entraînement solide face à l’immobilité relative et à l’incertitude du lendemain ! Passer de mon bureau au salon à la cuisine à la salle de bains aux toilettes à la fenêtre au canapé au bureau à la chambre au bureau à la fenêtre, j’ai l’habitude ! Y rester des jours à travailler en ne sortant que pour aller remplir le frigo ou faire un petit tour, j’ai aussi l’habitude. Ces classes préparatoires ne m’ont pas empêchée d’être saisie par une irrationnelle et temporaire angoisse au 2e jour du confinement. Je l’ai sentie envahir mon esprit sans préavis et envoyer ses mauvaises ondes à mon corps : tout d’un coup, j’ai eu peur de l’enfermement, d’être coincée à l’intérieur, de ne pouvoir sortir, prendre l’air, m’aérer, respirer, me déplacer librement, j’ai pensé qu’après 2,5 mois en pleine nature, à flirter gaiement avec les grands espaces terrestres et célestes, la transition était trop rude, que je n’allais pas pouvoir passer du jour au lendemain des « confins des sphères étoilées »* au cocon de mon canapé déplié. Et puis, j’ai compris que je réagissais ainsi parce que cette décision était imposée par l’extérieur, par d’autres (comme tous ces gens qui se sont soudainement mis à faire du jogging au moment même où l’on demandait à chacun de limiter ses déplacements) alors même que, en pratique, cela ne bousculait pas fondamentalement la vie que je m’imposais personnellement par moments. Et, j’ai réalisé que j’avais une cour à disposition pour quelques pas, pour un café dehors (même si l’automne et l’hiver arrivent) et même un olivier au coin là. Et aussi que la forêt était à 5 minutes à pied et que, par chance, le gouvernement néo-zélandais n’empêchait pas les gens de sortir de chez eux, et demandait seulement de prendre des précautions et de rester dans son quartier. Alors, la tension est descendue, je m’étais fait peur toute seule. J’ai pensé à la marche que nous allions faire l’après-midi, après notre déjeuner comme un rituel vieux de mille ans où l’unique règle est de ne pas parler de la pandémie. J’ai pensé à l’odeur des pins et des eucalyptus que nous allions pouvoir humer, à ces grands géants protecteurs tapissant la colline, à ces sentiers que nous allions connaître par cœur à force de les parcourir, et l’angoisse s’est évanouie. Naturellement. Jamais, je n’ai été aussi heureuse et rassurée d’être aussi proche des arbres…

* Bout de vers du poème Elévation de Baudelaire que j’ai déjà cité il me semble

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Pas si chouette !

Parfois, en voyage, plein d’un entrain un brin naïf, on ne sait pas vraiment à quoi l’on s’expose… Mais si, sur le moment, on a la sensation de vivre un échec cuisant, on sait aussi que, passé l’agacement, cela fera de bons souvenirs. Par exemple, ce soir là, sur l’île volcanique de Lanyu, appelée aussi Ile aux Orchidées, postée au large de la côte sud-est taïwanaise, l’idée était de se greffer à un groupe de visiteurs pour aller voir et entendre les chouettes en pleine nuit dans la montagne. Un must a priori. Les premières minutes d’introduction chez le guide auraient dû me mettre la puce à l’oreille : logiquement, la langue de la soirée allait être le mandarin, et le guide, un passionné, allait être généreux en explications. Certes, faire une visite sans comprendre quoi que ce soit pouvait sembler étrange, mais, pour les chouettes, cela se tentait…

Après 15′ de scooter, la vingtaine de curieux que nous étions encore au début marque un premier arrêt dans l’obscurité. Le guide sort alors sa lampe frontale surpuissante et arrose de son rai artificiel les arbres alentours. L’idée n’est pas encore de trouver des chouettes – le clou du spectacle – mais d’autres petites bêtes – divers insectes en fait. Comme anticipé, les descriptions se font en chinois et le seul autre occidental présent, s’il commence par traduire quelques extraits de ce qui devient rapidement une conférence de troisième cycle en entomologie, finit par se lasser après la quatrième plante soulevée pour dénicher une petite araignée nocturne. Je comprends dès lors que je vais passer à côté de la soirée et décide donc de l’observer.

La première heure, tout le monde suit avec beaucoup d’attention. Nous chevauchons nos scooters – je suis passagère et dépendante de mon pilote – pour aller d’un spot à l’autre, nous descendons de nos destriers du soir, allumons nos lampes, suivons le guide qui nous montre ses merveilles et imite la chouette de façon régulière en espérant qu’une vraie lui réponde. La deuxième heure, alors que nous nous enfonçons dans l’unique route traversant la montagne, l’attention générale commence à pâlir. Toujours aucune chouette à l’horizon. Mais des plantes, des araignées, des phasmes… Je vis une expérience extracorporelle : je suis sur une montagne, en pleine nuit, avec un groupe de sinophones en scooters et lampes frontales, en train de chercher des chouettes avec un guide qui alterne hululements vains et explications qui, à mes yeux et oreilles, restent du chinois dans tous les sens du terme. Il fait bon, ça compense, le ciel est étoilé, ça compense doublement. Mais quand même.

Après 2h30 de balade nocturne infructueuse, des gens commencent à abandonner le groupe. Comme je les envie ! Il a beau faire nuit, le guide n’est pas dupe, il les voit s’enfuir. Et il poursuit son programme en trois points. Au bout de 3h, d’un certain nombre de hululements et d’évasions lâches, voilà qu’il repère une chouette. Une toute petite chouette là, au loin, sur la branche là-bas, au fond… Vraiment ? Tout ça pour ça ! Malgré tout, cela réveille tout le monde ! Nous avons fini par voir une chouette et nous nous disons tous que le Graal ayant été atteint, nous allons pouvoir rentrer au bercail. Le guide lance quelques mots, nous remontons en effet sur nos scooters et entamons la descente vers le village. J’arbore un grand sourire. Ouf, c’est bientôt fini ! Sauf qu’au lieu de tourner à droite pour rejoindre nos lits à tous, mon pilote, et quelques autres, virent à gauche. Vers un autre spot. C’est probablement ce qu’a expliqué le guide un peu plus haut, mais, bizarrement, l’info m’a échappé… Je regarde le village et mon lit superposé s’éloigner pour un temps indéfini, je ris de moi et de cette situation rocambolesque dans laquelle je me suis glissée inconsciemment mais volontairement, je me laisse porter pendant une heure encore – soit 4h au total – tout en étant désormais incapable de m’extasier devant les stars de la nuit même si elles sont assurément très chouettes ! Lasse et confuse, je jure mais un peu tard que l’on ne m’y prendra plus !

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Quand on lui montre la Lune...

… l’enfant mate l’acrobate…

… qui lui-même s’agrippe aux dattes…

… bien solidaires en grosses grappes…

… ce qui ne les empêchera pas de gâter généreusement…

… nos prochaines agapes !

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C'est la jungle !

 Si la très grande majorité des personnes se rendent au Victoria Peak et en descendent en empruntant l’un des plus vieux funiculaires au monde, et, en tout cas, le plus raide, il est aussi possible, modulo un peu de temps, de souplesse et de sens de l’orientation de retrouver le niveau de la mer en empruntant un dédale de ruelles, lequel s’engouffre, après un moment, dans une forêt tropicale. Là, au détour de lianes, de feuilles de palmier et d’une végétation luxuriante, une fenêtre s’ouvre sur la jungle urbaine dans une juxtaposition si étrange qu’on la penserait irréelle… Et pourtant…

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Cette photo est visible en papier et en encres à l’édition 2018 de Photo Doc., la foire de la photographie documentaire, qui se tient du 4 au 6 mai à la Halle des Blancs Manteaux à Paris et à laquelle je participe avec mon collectif Les 4 Saisons. Il s’agit d’une expo-vente, au cours de laquelle je proposerai également des livrets sur Hong Kong, sur Hoï An, sur Hiroshima et sur Jiufen à Taiwan.

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Voilà un nouveau néophotologisme pour cet étonnant effet collatéral d’une pratique photographique aussi raillée que plébiscitée… Le selfisolement, comme son nom l’indique, est donc la situation d’extrême isolement dans laquelle se met une personne ou un groupe de personnes alors qu’elles cherchent la posture idéale pour faire un selfie. Par « extrême isolement », j’entends cette bulle quasi autistique dans laquelle elles plongent pour se focaliser uniquement sur ce petit écran qui leur renvoie leur image et qui les coupe littéralement du monde tant qu’elles ne sont pas satisfaites du reflet émis. Un arbre pourrait tomber derrière elles, un singe leur passer à côté, la cascade s’arrêter de cascader qu’elles ne s’en rendraient pas compte. A fortiori, la personne postée à 1 mètre d’elles immortalisant la scène est évidemment transparente !

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L'égalité homme femme en rando

… on en parle ? Quand ils n’ont qu’à prêter attention au sens du vent, nous autres, partons en quête d’un endroit qui soit non seulement à l’abri des regards – ce qui peut nous conduire bien loin de notre point de départ (ne jamais oublier de semer des petits morceaux de pain sur le chemin !) – mais aussi dont le sol ne soit pas jonché d’herbes trop hautes et urticantes ni habitées par toutes sortes d’insectes évidemment sautillants et extrêmement dangereux… Vous rigolez mais un jour au Sri Lanka, une camarade de voyage a découvert une sangsue dans ses dessous ! Autant vous dire qu’elle était sang dessus dessous et que la gent féminine a préféré croiser les jambes, ce qui a nettement compliqué la fin de la rando il faut l’admettre. A posteriori, je trouve quand même étonnant (d’avoir pris cette photo, oui, certes, mais pas que…) que ces trois-là reproduisent la proximité des urinoirs collectifs pour se soulager alors qu’ils ont tout l’univers devant eux. On se croirait presque à la plage !

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Le pont des soupirs

Stupéfaction et tremolo à l’heure du café matinal et de la consultation frénétique index à l’appui, mais glissant, des nouvelles du jour ! J’ai souvent les yeux clos quand je les consulte depuis que je me suis autogreffé une appli censurant les mauvaises nouvelles et les fermant automatiquement (à la fois les yeux et les nouvelles). Il y en avait trop, ça n’était plus vivable, et je n’ai pas l’impression de fermer les yeux sur ce qui se passe dans le monde pour autant ! Enfin, si, mais il existe différentes manières de voir. Bref, là, ils sont restés ouverts, non que la nouvelle soit bonne – car le contraire de la mauvaise nouvelle n’est pas forcément la bonne nouvelle, ce serait trop simple -, elle serait plutôt ébouriffante, invraisemblable, renversante !

J’ai d’ailleurs d’abord cru à un canular, un hoax, un fait alternatif. Ce qui m’a incitée à vérifier, avant toute chose, si elle était présente sur d’autres supports, même si ça n’est plus forcément une garantie de véracité (où va le monde ?). Et maintenant que j’ai écrit toutes ces lignes sur cette info sans la partager encore, c’est un peu comme lorsque des amis vous disent que tel film ou telle pièce de théâtre ou tel livre ou tel concert est vraiment hyper-méga-génial-e et qu’il faut absolument-franchement-essentiellement aller le ou la voir ou le lire ou l’entendre, vous vous projetez naturellement sur ce qui vous hisse généralement à l’apogée de votre propre échelle émotionnelle, tout en modulant ce calcul à l’aune de votre fine connaissance de vos amis, vous vous imaginez des choses, et souvent, vous êtes déçus. Oui, déçus. Du coup (si si, j’ai écrit « du coup »), je ne sais plus si ça vaut vraiment la peine que je vous dise… Oui, parce que clairement, vous allez vous dire : « Quoi, tout ça pour ça ? Franchement, t’exagères Lou hein ! » Non ? Alors, vous allez re-regarder la photo choisie pour y puiser quelque indice alors qu’en réalité, tout se passe à 8614 km de là, le là étant le centre de Madagascar qui n’est pas littéralement l’endroit d’où j’ai pris cette photo, mais c’est plus simple pour le calcul, mes souvenirs d’il y a 20 ans n’étant plus aussi clairs. Je vous invite donc maintenant à prendre un compas géant et à tracer un cercle de 8614 km de rayon – j’en conviens, ça n’est pas très pratique – pour identifier la zone géographique en question et à vous balader sereinement sur la circonférence de ce cercle dans l’espoir de voir poindre l’illumination.

Ou bien, j’arrête là le supplice et vous dis tout de go ce qui m’a ébahie ce matin-là : l’inauguration, ou presque, d’un pont reliant Hong Kong à Macao ! Evidemment, avant avril 2017, ça ne me parlait pas vraiment ne sachant pas précisément quelle distance séparait les deux RAS de la Chine, mais voyez-vous, en avril 2017, j’ai justement pris le ferry – ultra rapide – depuis le port de Hong Kong pour rallier l’ancienne colonie portugaise et il mettait déjà une heure ! Je vois bien que vous vous attendiez à autre chose ! Mais pour que vous preniez bien la mesure de ce qui m’a fait tressaillir, dites vous que ce pont, qui devient automatiquement le plus long ouvrage maritime au monde, fait 55 km ! Vous vous imaginez, vous, rouler pendant 55 km au dessus de la mer ?

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