Photo-graphies et un peu plus…

Pas si chouette !

Parfois, en voyage, plein d’un entrain un brin naïf, on ne sait pas vraiment à quoi l’on s’expose… Mais si, sur le moment, on a la sensation de vivre un échec cuisant, on sait aussi que, passé l’agacement, cela fera de bons souvenirs. Par exemple, ce soir là, sur l’île volcanique de Lanyu, appelée aussi Ile aux Orchidées, postée au large de la côte sud-est taïwanaise, l’idée était de se greffer à un groupe de visiteurs pour aller voir et entendre les chouettes en pleine nuit dans la montagne. Un must a priori. Les premières minutes d’introduction chez le guide auraient dû me mettre la puce à l’oreille : logiquement, la langue de la soirée allait être le mandarin, et le guide, un passionné, allait être généreux en explications. Certes, faire une visite sans comprendre quoi que ce soit pouvait sembler étrange, mais, pour les chouettes, cela se tentait…

Après 15′ de scooter, la vingtaine de curieux que nous étions encore au début marque un premier arrêt dans l’obscurité. Le guide sort alors sa lampe frontale surpuissante et arrose de son rai artificiel les arbres alentours. L’idée n’est pas encore de trouver des chouettes – le clou du spectacle – mais d’autres petites bêtes – divers insectes en fait. Comme anticipé, les descriptions se font en chinois et le seul autre occidental présent, s’il commence par traduire quelques extraits de ce qui devient rapidement une conférence de troisième cycle en entomologie, finit par se lasser après la quatrième plante soulevée pour dénicher une petite araignée nocturne. Je comprends dès lors que je vais passer à côté de la soirée et décide donc de l’observer.

La première heure, tout le monde suit avec beaucoup d’attention. Nous chevauchons nos scooters – je suis passagère et dépendante de mon pilote – pour aller d’un spot à l’autre, nous descendons de nos destriers du soir, allumons nos lampes, suivons le guide qui nous montre ses merveilles et imite la chouette de façon régulière en espérant qu’une vraie lui réponde. La deuxième heure, alors que nous nous enfonçons dans l’unique route traversant la montagne, l’attention générale commence à pâlir. Toujours aucune chouette à l’horizon. Mais des plantes, des araignées, des phasmes… Je vis une expérience extracorporelle : je suis sur une montagne, en pleine nuit, avec un groupe de sinophones en scooters et lampes frontales, en train de chercher des chouettes avec un guide qui alterne hululements vains et explications qui, à mes yeux et oreilles, restent du chinois dans tous les sens du terme. Il fait bon, ça compense, le ciel est étoilé, ça compense doublement. Mais quand même.

Après 2h30 de balade nocturne infructueuse, des gens commencent à abandonner le groupe. Comme je les envie ! Il a beau faire nuit, le guide n’est pas dupe, il les voit s’enfuir. Et il poursuit son programme en trois points. Au bout de 3h, d’un certain nombre de hululements et d’évasions lâches, voilà qu’il repère une chouette. Une toute petite chouette là, au loin, sur la branche là-bas, au fond… Vraiment ? Tout ça pour ça ! Malgré tout, cela réveille tout le monde ! Nous avons fini par voir une chouette et nous nous disons tous que le Graal ayant été atteint, nous allons pouvoir rentrer au bercail. Le guide lance quelques mots, nous remontons en effet sur nos scooters et entamons la descente vers le village. J’arbore un grand sourire. Ouf, c’est bientôt fini ! Sauf qu’au lieu de tourner à droite pour rejoindre nos lits à tous, mon pilote, et quelques autres, virent à gauche. Vers un autre spot. C’est probablement ce qu’a expliqué le guide un peu plus haut, mais, bizarrement, l’info m’a échappé… Je regarde le village et mon lit superposé s’éloigner pour un temps indéfini, je ris de moi et de cette situation rocambolesque dans laquelle je me suis glissée inconsciemment mais volontairement, je me laisse porter pendant une heure encore – soit 4h au total – tout en étant désormais incapable de m’extasier devant les stars de la nuit même si elles sont assurément très chouettes ! Lasse et confuse, je jure mais un peu tard que l’on ne m’y prendra plus !

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Bien sûr, je n’entends pas réellement répondre à cette question, qui compte quand même 3 490 occurrences sur le moteur de recherche omniscient, d’autant que la réponse change certainement au fil des âges… Je ne me souviens plus de ce que je pensais des zoos étant petite, mais comme les enfants d’aujourd’hui, j’imagine que je faisais le ouistiti en découvrant, en vrai, des animaux auxquels je n’avais généralement accès que par les livres ou la télévision. Maman, si tu me lis… Apostrophe inédite qui soulève une autre question : le zoo est-il une sortie de maman ou de papa ? A vrai dire, j’ai le sentiment qu’il s’agit plutôt d’une sortie de famille. Mais revenons à nos moutons… Enfant, je ne voyais probablement pas la cage, les barreaux, les enclos pour ce qu’ils sont en réalité – des privateurs de liberté, des incitateurs à tourner en rond – mais pour leur vertu protectrice : ils créaient une distance infranchissable, d’un côté comme de l’autre, me permettant, malgré une appréhension certaine, de m’approcher au plus près en minimisant ma peur, d’être impressionnée, et peut-être, déjà, de rêver de les voir en vrai de vrai. Dans leur habitat naturel. Par opposition au « en vrai » simple, relatif au passage de la 2D (livre, télé) à la 3D emprisonnée (zoo).

Je me doute que, comme dans tous les secteurs, il existe mille réglementations à respecter  quant à la taille des espaces de vie réservés aux animaux dans de classiques zoos. Mais une cage reste une cage par rapport à une plaine, à une montagne, à une forêt, à une rivière, où ces animaux pourraient évoluer librement, peut-être même en faisant des tours et des tours sur des périmètres réduits, mais par choix et non, par absence de choix. Je ne mets pas en doute, non plus, l’intérêt pédagogique et social que peuvent avoir les zoos pour les enfants. Mais, quand, un peu plus grand, accompagnant des plus petits, on se retrouve face à une volière où une chouette déploie ses ailes simplement pour se souvenir qu’elle en a, ou face à un babouin neurasthénique, littéralement prostré devant une vitre malgré les gesticulations simiesques d’homo sapiens sapiens de fait déçus par son manque de coopération que l’on pourrait interpréter comme une accusation – regardez, regardez bien ce que vous avez fait de moi ; il n’y a pas de quoi faire le paon ! -, l’interrogation liminaire prend malheureusement tout son sens… Comment se mesure le bonheur d’un animal en cage ? Cette question est, sans nul doute, très très bête !

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