Photo-graphies et un peu plus…

Cela aurait pu être « J’en donne ma main à couper », mais cela ne va pas avec la suite… La main, tendre la main, donner, recevoir, charité, œuvre caritative, associations… Voilà. Comme cela arrive régulièrement à notre époque échangiste, en vous abonnant à tel ou tel magazine, en cadeau de bienvenue, le magazine en question vous vend à ses propres contacts. Comme ça, sans vous demander votre avis. Ou alors, en tout petit, au verso de la feuille que vous avez signée, au milieu d’un dessin très chargé qui vous fait penser à « Où est Charly ? ». De fait, tout d’un coup, de nouvelles enveloppes apparaissent dans votre boite aux lettres. « Tiens, je ne connaissais pas cette association ! » ou « C’est bien ce qu’ils font, eux ! ». Au début, c’est excitant, vous ouvrez les enveloppes, vous lisez les lettres de sollicitation, vous vous amusez d’avoir des autocollants à votre nom même si vous ne les utilisez pas, vous êtes partiellement ému (ce n’est pas que vous êtes sans cœur ou insensible, simplement, vous n’avez pas besoin qu’on sorte le tire-larmes pour vous faire comprendre le tragique d’une situation), vous pensez même donner… A un moment. Puis approchent les fêtes et bizarrement, les enveloppes se multiplient. Dilemme : comment choisir ?

Ne pas choisir peut être une solution. Alors, un matin de grand bonheur, vous sortez votre chéquier et en remplissez quelques-uns. Oh, pas de grandes sommes, mais suffisamment pour « sauver plusieurs vies » qu’elles disent. Hop, direction l’enveloppe pré-affranchie – elles vous facilitent la tâche – et la boite aux lettres. Vous lâchez votre petit paquet en ayant le sentiment d’avoir modestement participé à quelque chose de bien. Et puis, vous oubliez. Mais, les associations, elles, ne vous oublient pas. D’abord, elles vous remercient, ce qui est plutôt poli, et vous envoient un stylo, des enveloppes, des étiquettes, une carte du monde… quelque chose. Bon, un peu kitsch à votre goût mais vous comprenez l’attention. Il y a aussi une lettre retraçant ce que deviennent les dons. Très instructif. Puis, vous oubliez. Mais, les associations, elles, ne vous oublient toujours pas. C’est logique, d’un certain point de vue. Régulièrement (beaucoup ne payent pas l’acheminement), elles vous envoient de super cadeaux qui gonflent les enveloppes, des magnets, des cartes de vœux et leurs enveloppes, des seringues en plastique, des stylos en forme de seringue, des annuaires…

Cela ne s’arrête pas, même si certaines finissent par abandonner. On dirait même qu’elles se coordonnent pour envoyer leur courrier puisque vous recevez parfois trois lettres le même jour… Au bout de quelques mois à ce régime, sans pour autant avoir réitéré votre petit geste, cela commence à vous agacer. Vous n’ouvrez même plus les enveloppes. Après plusieurs années, l’énervement, voire la colère, prend le relais : à cumuler tous les gadgets que vous avez reçus pendant ce laps de temps, on doit bien atteindre la somme que vous avez envoyée ce matin-là. Evidemment, certains doivent être ravis de ces petites récompenses, sinon, elles n’existeraient pas. Mais pas vous. Alors, voilà, vous avez pris votre décision : vous ne donnerez plus et vous chercherez Charly au verso ! Un vrai gâchis !

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Et bien, ne faites pas cette tête ! Quoique, pendant 2 microsecondes, je me suis profondément interrogée sur le statut de ce vieux monsieur inanimé, ton sur ton, affalé dans un de ces fauteuils en cuir sombre qui parsèment les six étages du MoMa où défilent, dans un ballet incessant, touristes en quête des Demoiselles d’Avignon et locaux aspirant à un peu plus de retenue… Courte ou longue sieste ? Personne en panique autour de lui, il doit encore respirer. D’ailleurs, un livre, probablement trop lourd pour être porté à bout de bras, est posé sur ses genoux hiboux joujoux poux. Ceci dit, il y a pire que mourir sous le coup de la beauté d’une œuvre en compulsant un livre d’art !

Question de point de vue évidemment et d’interprétation, l’idéal étant quand même de finir le livre, de le refermer, et de se relever, même difficilement, pour s’extraire de cet antre où de vraies natures mortes sont placardées sur les murs blancs. Vous savez, les fruits directement sur la table ou savamment agencés dans des coupes, les lapins morts, les bouquets de fleurs colorées, les pichets de vin, parfois un crâne ou deux pour mieux justifier le style… Mais, lorsque l’on se penche sur le cartel pour découvrir l’auteur de la pièce en question, à côté du nom, ce n’est pas « nature morte » qui est inscrit mais « still-life ». Une traduction, pourtant tri-centenaire, qui transpire ce point de vue culturel sur le trépas et, qui, à la mort, mot tabou, trop sec, trop brutal, trop vrai outre atlantique, préfère l’espoir de la vie, encore là même si silencieuse, immobile… Comme ce vieux monsieur, là, avachi mais toujours en vie… Enfin, il faudrait peut-être aller vérifier quand même.

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Outre atlantique, ces fenêtres sont appelées des french windows. J’ai une fois trouvé un immeuble à Paris avec des fenêtres s’ouvrant vers l’extérieur, mais c’était le trésor du jour, de la semaine, du mois, de l’année. Outre atlantique, les pains perdus sont appelés des french toast. C’est déroutant la première fois, mais Lost breads ne sonnait pas très bien et faisait trop penser à une parodie de film où des boulangers se seraient crashés sur une île déserte sans four. Outre atlantique, les frites sont appelées des french fries. Les Belges se sentent un peu pillés de leur patrimoine culinaire. Outre atlantique, les haricots verts coupés en deux moitiés dans le sens de la longueur sont appelés des french cut beans. Là, je sèche totalement même s’il faut saluer l’effort d’imagination pour cette coupe très spéciale qu’évidemment, nous ne trouvons pas dans les rayonnages hexagonaux ni octogonaux d’ailleurs. Outre atlantique, on dit manifestement des bêtises. Mais des bêtises qui ont un certain chic et qui font sourire les avertis. C’est l’essentiel.

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Prenez un quartier désaffecté, abandonné, malfamé, dangereux, oublié, livré à lui-même, en résumé, une petite jungle underground à la surface de la ville où personne n’ose aller volontairement sauf ceux qui y vivent et qui aimeraient probablement en partir s’ils le pouvaient. Conséquence de cette micro fiche d’identité qu’aucune agence immobilière ne mettrait en vitrine : s’y installer ne coûte rien. Ou si peu. Un argument de taille pour une population qui n’a peur de rien, et surtout, pas toujours le choix : les artistes. Les inconnus. Ceux en devenir, en quête de reconnaissance, ou de connaissance tout court. Voilà donc qu’en débarquent quelques uns, sans le sou, en quête d’espace et de liberté dans ces maisons aux vitres cassées ou ces immeubles chancelants. Ils créent en vivotant, se constituent en petits groupes… Le mot circule, et bientôt, d’autres artistes arrivent et s’installent dans ces lieux désertés par tout être sensé. Le temps passe et cette nouvelle population avant-gardiste, cool, visionnaire fait naître de nouveaux besoins : des bars, des cafés, des lieux où se retrouver… Alors, des bars, des cafés, des lieux où se retrouver sortent des décombres et viennent ressusciter des rez-de-chaussée murés… Les artistes s’y retrouvent, mais aussi leurs amis habitant d’autres quartiers et bravant héroïquement le danger…

Puis, les artistes produisant – de l’art -, un autre besoin émerge : celui de montrer ce qu’ils font. Des galeries, des théâtres, des espaces communautaires sortent de terre, avec leur cortège de restaurants, cafés et autres. On en parle dans la presse. Petit à petit, l’extérieur se déplace vers ce nouvel intérieur, ce nouveau quartier branché. Branché car en mouvement, dynamique, créatif. L’antre reprend des couleurs, du bleu, du rouge, du jaune, du vert et aussi celle de l’argent. Les vitres brisées sont remplacées, les portes sont repeintes, les murs sont ravalés, le quartier fait peau neuve. Peu à peu, les artistes ne sont plus les seuls à l’adopter. De nouveaux commerces ouvrent pour satisfaire ces nouveaux arrivants, la circulation reprend, l’obscurité ne fait plus peur. Des promoteurs immobiliers sentent le vent tourner, font des plans sur la comète… Et les comètes, ça fait toujours rêver. Quel qu’en soit le prix. En quelques années, grâce aux artistes pionniers, ce qui était un rebut de la ville s’est transformé en quartier bien plus qu’honorable. Un quartier où il fait bon vivre, légèrement bobo. C’est ainsi que Brooklyn ou SoHo à New York ont gagné leur chic actuel (et leurs prix bientôt inabordables), c’est ainsi que le quartier d’Alberta Street à Portland a totalement changé de visage en 5 ans. Il m’est d’avis qu’une prime devrait être reversée aux artistes pour leur rôle indéniable dans la réhabilitation de ces lieux. Evidemment, l’histoire ne dit pas vraiment ce qui est arrivé à leurs anciens locataires. Certains ont réussi à rester, ravivés par la nouvelle flamme animant les alentours, d’autres ont dû partir, poussés par la nouvelle pression immobilière… La place reste encore accessible, même pour des artistes…

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