Photo-graphies et un peu plus…

Logique !

Se comporter globalement de façon cartésienne – c’est-à-dire, être une personne s’appuyant de préférence sur la raison, la logique (d’aucuns proclament même que j’ai une logique de robot (donc, implacable), ce qui, à ce moment présent de l’Histoire de l’humanité, n’est pas réellement un compliment même si cela signifie souvent que j’ai raison !) et procédant généralement avec méthode -, n’empêche pas quelques incursions inopinées et incontrôlables dans l’univers un peu confus du mysticisme ou de l’irrationnel.

J’en tiens pour preuve cette petite scène sans intérêt apparent extraite de ma trépidante vie quotidienne et parisienne. Ceci dit, cela aurait pu se passer dans n’importe quelle autre ville dans le monde dès lors que l’on y trouve du sel sur la table. J’affine. J’arrive au restaurant, me glisse bon an mal an sur la blanquette le temps de choisir ma bavette puis me relève afin de rejoindre les commodités où j’ai sacrément envie d’aller… me laver les mains. Figurez-vous qu’en me levant et en tentant de passer dans l’intervalle très étroit entre ma table et la voisine (ah, ces bistrots cultivant la promiscuité, pardon, la proximité), d’une part, j’ai réalisé que je n’étais pas un poulpe et, d’autre part, en pensant que je l’étais, j’ai renversé la salière et la poivrière sur la table. Je n’ai même pas eu le temps d’actionner la machine à cartésianisme que la branche mystique – en sommeil – de ma personnalité s’est réveillée d’un coup d’un seul, hurlant, intérieurement : « Celle-là, elle est pour moi ! Ne pense à rien, je m’occupe de tout ».

Savez-vous ce que j’ai fait ? J’ai pris quelques grains de sel entre mon index et mon pouce – enfin, l’un des deux, mais de la même main, sinon, c’est un peu compliqué – et je les ai jetés par dessus mon épaule (certainement droite par méconnaissance et non gauche comme il eut fallu), comme si, par cet acte absolument insensé, j’empêchais quelque chose de terrible – autant qu’hypothétique – de se produire. Et, ayant réussi à m’extirper de là, j’ai continué mon chemin, tout en remarquant que l’un de mes commensaux avait eu exactement le même réflexe et était déjà prêt à user de sa pince manuelle pour envoyer valser sorcières et autres mauvais esprits vers de lointains horizons si je ne l’avais devancé. Tout cela a beau s’être passé de façon extrêmement rapide, j’étais pleinement consciente de ce que je faisais sans vraiment savoir pourquoi je le faisais.

D’autant que j’apprends aujourd’hui, là, maintenant pour tout vous avouer, que, comme beaucoup d’us et coutumes, les superstitions varient selon les cultures. En l’occurrence, au Danemark par exemple, renverser du sel porterait bonheur s’il est sec, et malheur s’il est mouillé. Ma question : faut-il être Danois ou renverser du sel au Danemark pour que cette croyance s’applique ? Et que se serait-il passé si un ou une Danois/e avait été à table avec moi, à Paris : m’aurait-il/elle empêché de jeter mon bonheur – car le sel était sec, oui – par dessus l’épaule ou m’aurait-il/elle regardé gâcher ainsi ma vie car je n’avais pas voulu admettre à temps que je n’avais pas la souplesse d’un poulpe ?

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Tricoter 1Tricoter 2Tricoter 3

Cela vous est déjà forcément arrivé… Soit d’être totalement coincé dans votre voiture au milieu d’un embouteillage monstre et malheureusement quotidien, à pester dans votre cage et à envier, tout en les détestant, les gens marchant sans entrave sur les trottoirs adjacents (« pfffff ! mais pourquoi, mais pourquoi, mais pourquoi ? ») ; soit, au contraire, d’être l’une de ces personnes marchant librement sur les trottoirs adjacents à regarder les automobilistes inertes avec un mélange de pitié et de basse satisfaction (« Vous n’avez qu’à marcher, prendre le vélo ou les transports en commun ! »)…

Certains piétons – enfin, peut-être n’est-ce l’initiative que d’une seule et unique personne ? – ont poussé le vice un peu plus loin en prenant le temps de tricoter ces quelques lettres et en accrochant ce message gentiment moqueur sur les grilles d’un parc longé par une rue systématiquement congestionnée… Une bonne blague pour les arpenteurs de trottoir, modérément appréciée par ceux coincés derrière leur volant. Et, pour tous, la preuve, toute en finesse, de l’absurdité intrinsèque d’une telle situation dans laquelle plongent volontairement – car ils pensent ne pas avoir le choix – une portion de citadins…

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Checkpoint

Si j’habitais Berlin et si j’avais à donner rendez-vous à quelqu’un sur l’immense Alexanderplatz, je choisirais certainement cet endroit aussi. Ce ne serait certes pas très original, mais j’aime l’idée de me retrouver sous cette horloge universelle – Urania pour les intimes, Weltzeituhr pour les germanophones – coiffée d’une version miniature – et simplifiée – de notre système solaire en rotation. Divisée en 24 portions, comme 24 fuseaux horaires, Urania indique l’heure qu’il est partout dans le monde en permanence grâce à un savant système de double cylindres. Ainsi, tout en étant à Berlin, pourrais-je lancer des rendez-vous énigmatiques du style : « Retrouvons-nous à 16h à Anchorage ! N’oublie pas tes moonboots… » ou « Rendez-vous à 10h à Caracas ! Nous aurons le téléphérique pour nous ! » voire « 00h à Tokyo – je porterai un chapeau melon rouge et picorerai un okonomiyaki »… Bien sûr, cela requerrait une certaine maîtrise voire une maîtrise certaine à la fois de l’addition et de la soustraction, et il y aurait certainement quelques ratés au début, mais les rendez-vous, prétextes à de multiples voyages imaginaires, n’auraient-ils pas une toute autre saveur ?

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Trouble de la personnalité

Je n’ai pas encore statué : dois-je annoncer à ce palmier que je viens tout juste de rencontrer qu’il n’est pas un éléphant sachant que, d’un côté, cette prise de conscience sera peut-être le plus grand drame de sa vie mais que, de l’autre, vivre dans le déni n’est pas une solution non plus ?

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Mitigée

Lorsque l’on se retrouve malencontreusement confronté à ces espèces de robinets en voie de disparition – superbes au demeurant -, on a beau être un fervent défenseur de la robidiversité et de toutes les formes de tuyauteries en général, on ne peut s’empêcher de penser que celui – ou celle (cela ne m’étonnerait d’ailleurs pas qu’une femme soit à la source d’une solution aussi pratique (et hop là !)) – qui a inventé l’eau tiède, celui, ou celle donc, qui a eu cette idée simple et géniale de mélanger l’eau très chaude, intouchable, à l’eau très froide, pas moins fréquentable, n’était pas, contrairement à ce que charrie la légende urbaine, si sot… ni sotte !

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ça piaffe grave !

Ce n’est évidemment pas l’unique question qui m’est venue à l’esprit en tombant sur cette solide revendication couleur ciel taggée sur le mur d’une maison donnant sur une venelle, autrement dit, invisible depuis les hautes sphères où voguent les coupables, mais c’est la principale : à qui s’adresse ce message ? Aux premières concernées, les mouettes, qui, jusqu’à preuve du contraire, ne savent pas encore lire mais il faut se méfier avec le progrès ; savent-elles au moins ce qu’est l’écriture ? Aux humains qui subissent leurs cris incessants et stridents, qui pourtant valent mieux que des coups de klaxon intempestifs et des crissements de pneus ? Aux cinéphiles, qui ne sont ni des humains ni des mouettes donc, à qui cet amoureux modéré de la nature semble proposer, 41 ans après, un remake porno-gore du film de Robert Dhéry, Vos gueules, les mouettes ? Et pourquoi avoir pris soin d’écrire « mouettes » correctement et pas nique ? Hein ? En bref : pourquoi ?

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Premier cycle

Ne vous fiez pas à cette image de Kandy – pas l’héroïne orpheline globe-trotteur de nos jeunes années qui attendait désespérément son prince sur la colline, non, Kandy, la ville sri-lankaise -, c’est un leurre : dans la vraie vie, les enfants ne restent pas sagement en rang deux par deux en attendant qu’on leur dise quoi faire. Dans la vraie vie, ils chahutent, ils trépignent, ils se harponnent, ils s’écharpent, ils crient, ils courent sur la route en dépit du danger et d’un bon sens qu’ils n’ont malheureusement pas encore acquis.

J’adore les enfants ! Oui, je sais, après cette introduction, ça sonne un peu faux. Je précise donc ma pensée : à petites doses – pas nécessairement homéopathiques -, j’adore les enfants. Voilà, comme ça, c’est mieux. Les doses peuvent être estivales par exemple – le moment préféré des parents qui se délestent de leurs merveilles du monde auprès de leurs propres parents, frères, sœurs, oncles, tantes, bouchers, zoos (ceux où les animaux évoluent en liberté quand même)… : ça tombe bien, c’est l’été. Youpi ! Il y a quelques jours, le premier en fait, m’est venue cette étrange pensée : « D’une certaine manière, s’occuper d’enfants est intellectuellement reposant ». Pas le temps de tergiverser, de douter, de se poser des questions existentielles et/ou abstraites auxquelles on peut se permettre de chercher les réponses des années durant sans avancer d’un iota : le luxe de la nullipare heureuse.

Non, à problèmes concrets, réponses instantanées : les gâteaux sont là, apporte m’en un s’il-te-plaît (morfale mais polie quand même) ; ton maillot est mouillé ? tu n’avais qu’à le sortir de ton sac ; ne mets pas les mains dans ta bouche, tu vas attraper un staphylocoque doré et tu ne réussiras jamais à t’en débarrasser ! ; va te brosser les dents, tu as un bout de salade en 12 (pour ceux qui me lisent régulièrement…) ; ne jette pas du sable sur la petite fille, elle ne t’a encore rien fait ; ne va pas te noyer quand je regarde ailleurs ; tu as bu ? (de l’eau, je précise) ; non, je ne gonflerai pas ta bouée géante pour la 10e fois… Allez donc caser un questionnement sur le sens à donner à votre vie là-dedans ! Le repos n’est évidemment que relatif : si l’esprit fait une pause, le corps est à l’agonie !

Les jours suivants, on se dit tout simplement que nous sommes en train d’interpréter notre propre version d’Un jour sans fin, le célèbre film d’Harold Ramis dans lequel Phil Connors, un monsieur météo auquel Bill Murray prête ses traits grincheux, revit indéfiniment la même journée dans une ville sans intérêt apparent : jour après jour, les mêmes événements, à quelques variantes cosmétiques près – la couleur du short, la couleur du ciel, la couleur de la menthe à l’eau… – se produisent dans le même ordre, aux mêmes heures, pendant la même durée ; jour après jour, on répète les mêmes sentences que la veille, sans fléchir mais en espérant, comme Phil Connors, qu’un jour, prochain, c’est-à-dire avant la fin des vacances, cela finira par rentrer, que l’on n’aura plus à imiter le perroquet et que nous pourrons enfin passer à une autre journée !

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La fausse astuce

Méthode invasive et radicale pour éviter et donc parer un contre-jour disgracieux sur une photographie. Requiert une certaine force dans le poignet et l’avant-bras, ici droit, amené à porter seul l’appareil photo, potentiellement lourd, ainsi qu’une remarquable capacité d’extrapolation pour voir au-delà de l’intrus.

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L'hypocondrie nomade

Les pages santé des guides de voyage sont l’équivalent des notices des boîtes de médicaments recensant, et c’est tout à leur honneur (en plus d’être obligatoire), tous les effets secondaires possibles et imaginables susceptibles de survenir en les prenant, alors même qu’ils sont sensés nous guérir, parfois de maux bien moins graves que les affections qu’ils pourraient générer. De telle sorte que, parfois, nous préférons ne pas les prendre plutôt que de risquer, même si cela ne se produit qu' »exceptionnellement » car rien n’indique en effet que la banalité de notre corps ne puisse être l’hôte d’un « cas exceptionnel », un arrêt cardiaque ou des pensées suicidaires…

En lisant ces pages santé, nous nous imaginons donc, avant même d’avoir décollé, déjà atteint d’une combinaison autant cataclysmique qu’improbable de maladies auxquelles nous attribuons une dangerosité proportionnelle à l’exotisme et l' »imprononçabilité » de leur nom : choléra, encéphalite japonaise, fièvre typhoïde, maladie de Chagas, filariose lymphatique, onchocercose, leishmaniose, schistosomiase, trypanosomiase, rickettsiose, bilharziose…

Nous nous rassurons alors en nous promettant de nous badigeonner de répulsif anti-Anophele Funestus dès la tombée du jour, de n’accepter aucune boisson qui n’aurait été ouverte devant nos yeux, de ne caresser aucun animal que nous aurions vu se gratter, ou encore de ne pas mettre le pied dans les eaux stagnantes, voire même dans des rivières pourtant animées comme celle-ci, signalée comme vectrice potentielle d’une bilharziose inattendue ici par des affiches A4 aux couleurs passées plantées dans les arbres alentour, histoire de décourager les visiteurs fantasmant déjà sur un bain revigorant dans ses piscines naturelles au charme irrésistible, en quelque sorte, les Aglaophème, Thelxiépie, Pisinoé et Ligie auxquelles a pu résister Ulysse lors de son odyssée, non pas grâce à une pancarte flottant telle une bouteille à la mer, mais aux avertissements de Circé, la version mythologique des pages santé des guides touristiques…

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Pète-au-casque

Certains prétendent que l’on ne rentre jamais vraiment indemne d’un hivernage d’un an, loin de tout, sur une petite île perdue au milieu de l’océan, à croiser les mêmes personnes chaque jour ou presque, par ailleurs bien moins nombreuses que les populations de manchots, d’éléphants de mer et d’otaries, les vrais locataires terrestres du caillou. Sans doute n’ont-ils pas entièrement tort…

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