Photo-graphies et un peu plus…

Carpe diem

Laisser le passé derrière nous – irrévocable et singulier -, ne pas conjecturer sur l’avenir – indéterminé et pluriel -, l’un comme l’autre hors de notre vue, pour canaliser notre énergie et nos efforts sur la seule fenêtre ouverte au direct : le présent – ici et maintenant -, là où tout se joue, là où tout se ressent, là où tout se vit.

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Photophobie radicale

Le négatif a, curieusement, une âme de vampire : il vénère l’ombre de sa cartouche opaque et le dos bien hermétique d’un appareil photo ; en toute logique, il ne supporte pas la lumière, directe ou pas, et se consume irréversiblement à son contact… Aussi, lorsque, par accident ou mégarde – une erreur de manipulation, un choc brutal… -, celle-ci réussit à se faufiler jusqu’à lui à une vitesse telle que toute réaction humaine est malheureusement vaine, toutes les formes, toutes les histoires, tous les regards, tous les événements qu’il a au préalable pu capter – de la lumière, pourtant – se teintent d’un rouge-orange vif avant de disparaître pour toujours comme s’ils n’avaient jamais existé et que le monde s’arrêtait là, net…

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oups

Prise de vue à un instant t, une photographie ne montre ni l’avant ni l’après t. Elle laisse à chacun la liberté de l’inventer ou de l’imaginer. Contentons-nous de l’avant dans ce cas précis…

De deux choses l’une, soit j’ai été témoin d’un malencontreux mais néanmoins terrible accident entre une voiture et un animal à pattes palmées – mettons, un goéland -, que, dans un réflexe à la fois documentaire et morbide, j’ai voulu immortaliser malgré l’absence manifeste d’hémoglobine. Soit le passage de l’oiseau et l’arrivée de la voiture sont déconnectées dans le temps et cette apparente mise en scène n’est que le fruit du hasard. On peut même, en suivant cette double hypothèse, être plus précis encore : l’animal est passé par là en premier et l’utilitaire a croisé sa trajectoire dans un second temps. Dans le cas contraire en effet, c’est-à-dire celui, peu probable où la bête – tête en l’air ou en train de piaftoter – n’aurait pas remarqué la présence de la voiture sur son chemin, il y aurait eu des traces supplémentaires dans la neige. D’abord de piétinement du goéland devant la roue, puis des empreintes chancelantes et désordonnées s’éloignant de la carcasse métallique car la bête aurait été sacrément sonnée.

Heureusement, d’ailleurs, que cette photo a été prise en hiver et que ce dernier fut neigeux car, sans ce marqueur naturel discret, pas de trace, donc pas de preuve et plus globalement, pas de photo non plus car je n’ai pas encore développé de passion particulière pour les pneus Michelin. De fait, nous pouvons déduire de ce simple raisonnement que cette rencontre de signes est bien fortuite et que c’est justement cette juxtaposition heureuse et la fiction qu’elle a fait naître dans mon esprit en un clin d’œil qui a attiré mon regard, et envoyé un puissant coup de coude à mon cerveau pour que je sorte mon appareil et prenne note de cette histoire dans un claquement sec et assuré avant de poursuivre ma route…

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tachycardie

Ce brasier tapi au fond de soi

Cette incandescence domestique

Et même domestiquée

Trépignant d’impatience

Et tambourinant sans répit

Comme un animal en cage,

Thoracique

Chérissant les soirs

De feux d’artifice

Où les frontières s’effacent

Les transferts s’opèrent

Pendant que les corps exultent

Et que l’âme souffle

Enfin.

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Train de nuit

Au même titre que les blocs de béton entassés sur la plage d’Ostende, que la page 273 de votre polar, que les oies migratoires au dessus du Pacifique ou que les moutons en barquette, les trains nord-américains ont, à toute heure du jour et de la nuit, un pouvoir soporifique indéniable pour qui les regarde et les écoute passer tant ils paraissent interminables – jusqu’à près de 300 wagons accrochés que, malgré soi, on se met à compter car l’on trouve un peu le temps long, derrière son volant – et tant leur rythme – a fortiori, leur petite musique intérieure – semble aussi imperturbable que le tempo andantino d’un métronome mécanique à ressort que la résistance de l’air ne vient même pas altérer…

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L'espionne qui venait du haut

Se trouve, assez logiquement, à la lettre M de mon dictionnaire encore embryonnaire de néophotologismes. La mascaron-surveillance n’est ni plus ni moins que l’ancêtre de la vidéo-surveillance. Il reste encore quelques-unes de ces figures ornementales fidèlement accrochées aux façades d’immeubles relativement nobles. Elles avaient pour fonction principale d’éloigner les mauvais esprits et la particularité de vous suivre du regard partout où vous alliez. Leurs globes oculaires étaient ensuite directement reliés à une carrière de roches métamorphiques où des stagiaires sous-payés étaient chargés, en temps réel, de graver vos faits et gestes de passage sur une ardoise, avant de les transmettre à l’équipe des mascaronthéquaires. A eux de les ranger méticuleusement, par date, lieu et action, sur d’interminables et solides étagères d’une pièce aussi grande qu’un hall de gare. La réglementation imposait de les conserver en l’état pendant 72h et, si elles n’étaient pas réclamées, pour vérification, par la police ou bien par vous-même, de les transformer en tuiles à l’issue de ce laps de temps. La lourdeur du dispositif n’a évidemment pas survécu à l’arrivée des écrans et des caméras miniaturisées et, progressivement, elles ont toutes été désactivées. Mais les masques ne sont pas tombés pour autant, et force est de constater que se retrouver, encore aujourd’hui, dans leur champ visuel ne laisse jamais de marbre !

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La spirale

Les escaliers sont comme les ponts, les premiers verticalement, les seconds horizontalement permettent à ceux qui les empruntent de passer d’un monde à l’autre. De la rive gauche à la rive droite, d’un pays à son voisin, du 3e au 4e étage certes, mais également, plus métaphoriquement, d’un état de conscience à un autre. Ainsi en est-il de cet escalier aux vertus hypnotiques pour qui le descend, lentement, marche après marche, main droite glissant sur la rampe, sans jamais quitter du regard l’œil carré central en contrebas affichant la couleur opaque de l’inconnu et vers lequel l’avide d’introspection foncera malgré tout tête baissée avec l’espoir de s’y croiser.

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Les jeux sont ouverts !

Il y a au moins un avantage à poser le pied, idéalement les deux, dans un pays dont on ne maîtrise absolument pas la langue et dont l’écriture ne porte elle-même aucun indice susceptible d’en faciliter la compréhension : tout devient possible. C’est-à-dire que l’on peut choisir d’arpenter ses villes, ses rues, ses commerces, ses collines, ses plages en donnant une signification totalement imaginaire aux messages affichés, quitte à se tromper, mais volontairement, ou à manquer des informations importantes. Voilà donc qu’en plein cœur de cette forêt silencieuse et désertée bordant la paisible ville de Kyoto, est signalée aux randonneurs la présence, 14 arbres plus haut à gauche, d’un distributeur d’Awawawawa Pucho Ball alimenté en permanence par le très riche humus local et géré d’une main de fer par un couple de chouettes de Tengmalm… N’est-ce pas extraordinaire ?

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Tous les chemins...

… mènent à elle. Temporairement.

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Les mots dits

Enfants, sans saisir le sous-texte politique afférant pour autant, il y avait ceux qui étaient plutôt Pif Gadget – mouvance communiste – et ceux qui lui préféraient Picsou Magazine – tendance américano-capitaliste. Dans le même esprit binaire, il y avait les pro-Asterix, les pro-Spirou, les pro-Tintin, les pro-Blake et Mortimer, les pro-Gaston Lagaffe ou encore les pro-Lucky Luke... On pouvait difficilement être tout cela à la fois tant les héros avaient des personnalités différentes et même opposées, même sans être conscient des messages cryptés – politiques à nouveau mais aussi sociétaux – véhiculés par ces bandes-dessinées qui ont peut-être, sans doute même, influencé les adultes que nous sommes devenus à force de les lire et de les relire.

Personnellement, rêvant déjà de grands espaces, de voyages, de mots et d’images, et encore imperméable à la portée colonialiste voire pire des bulles et planches d’aventures vécues par le légendaire reporter à la houppette, j’étais Tintin, sans hésitation. A plusieurs reprises, j’ai donc eu affaire à la fameuse Boucherie Sanzot, qu’une dame cherchait régulièrement à joindre par téléphone, en composant le 421 – notez au passage que les numéros ne comptaient que 3 chiffres à l’époque – qui était le numéro de Moulinsart et non pas celui de la Boucherie Sanzot, au 431. Pendant des années, à la lumière de ma lampe de chevet, j’ai lu Boucherie Sanzot en alignant simplement les syllabes, sans me poser la moindre question. Et puis, un jour, il y a peut-être une dizaine d’années, peut-être plus, peut-être moins, à la faveur de circonstances oubliées depuis, j’ai dit « Boucherie Sanzot » à voix haute. Et là, tout d’un coup, la formidable note d’humour m’a sauté aux yeux, ou plutôt aux oreilles. Evidemment ! 20 ans après avoir dévoré les différents albums, je comprenais enfin la subtilité de la Boucherie « Sans Os ». Une gageure pour un tel lieu assurément !

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