Photo-graphies et un peu plus…

… mais il ne s’agit ni de météo ni de madeleine ! Contrairement à ce que j’affirmais dans La fin du temps il y a quelques semaines, Montréal a bien ses gardiens du temps officieux. Les sauveurs des sans montre, des sans portable, des anti-temps en titane et consorts ! A savoir, l’ancêtre du cellulaire (il est décidément beaucoup question de filiation ces temps-ci…), la cabine téléphonique. Qui n’est pas nécessairement une cabine. Elargissons donc : le téléphone public. Qui peut être dans une cabine donc, accroché à un mur de station de métro ou sur une simple borne au milieu du trottoir. Si, à Paris, des escadrons sauvagement organisés viennent régulièrement les arracher de leur poste en pleine nuit, Montréal les conserve. Sûrement une question de temps… L’éradication est en effet intimement liée à l’explosion démographique des portables – la question, par endroits, étant plutôt : « où est mon portable pro ? » « non, ça c’est mon perso ! » – qui semble ne pas avoir encore eu lieu ici.

Ces parallélépipèdes rectangles métallisés assez basiques sont dotés d’un petit écran sur lequel défilent informations et consignes : « Veuillez décrochez. » Puis « Appels locaux 50 c / Local calls 50 c » (parce que tout est traduit dans les deux langues, sauf les films) puis le jour et enfin l’heure. Chic ! Le cycle prend 8 secondes environ. Ce qui n’est pas négligeable quand vous êtes bien lancé, et qui peut pousser un observateur discret à s’interroger sur votre santé mentale. Vous êtes un sans-temps – mais on s’entend, vous avez quand même besoin de connaître l’heure par moments -, vous avez trouvé un téléphone accessible (pas derrière une grille que vous ne vous aviserez pas de franchir au risque de voir débouler trois bulldogs anglais mais canadiens), vous vous arrêtez net comme si une mouche vous avait piqué, mais c’est le début du cycle. Vous voilà donc posté devant la machine, à la regarder de façon insistante sans même ciller les yeux, de peur de manquer la ligne attendue, sans bouger, sans saisir le combiné, c’est inutile, vous ne voulez appeler personne. Vous êtes là, donc à attendre que les 8 secondes passent. Comme si la machine s’était arrêtée. La vôtre. Comme si vous aviez buggé, en quelque sorte. Un statu quo temporaire mais tout à fait perceptible par une personne passant à vos côtés à cet instant et qui vous lancerait alors un regard interrogateur, voire inquiet. Vous aimeriez alors lui dire que tout va bien, que vous ne planez pas et que vous attendez juste que les 8 secondes passent pour savoir enfin quelle heure il est, mais cela impliquerait certainement de tourner la tête, mouvement qui vous ferait inévitablement repartir pour un nouveau cycle. Et pendant ce temps, le temps passe. Evidemment, vous pourriez aussi saisir cet échange furtif de regards pour lui demander directement l’heure, ça marche très bien aussi !

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C’est parti pour la 4e génération d’Objectif_3280 ! 27 photographies sont à proposer en écho aux 9 images de la génération 2, qui nous ont conduits, comme le montre l’une des cartes ci-dessus, et après le Japon, Malte et Zanzibar, au Canada, aux Etats-Unis, en France, en Espagne, au Maroc et en Angleterre ! Avec des associations d’idées par les formes, les couleurs, les thématiques, les ambiances ! Côté écho-munauté, on reste majoritairement en France. Dès demain, je lancerai la promotion d’Objectif_3280 sur des groupes et forums internationaux. Pour les prochaines générations, 81, 243, 789 puis enfin 2 187 échos seront attendus, en quatre jours à chaque fois ! Mais, pour l’heure, vous pouvez déjà choisir la photo à laquelle vous ferez écho en vous rendant sur l’arbre écho-photographique.

Merci pour votre participation à cette aventure écho-logique !

Objectif_3280 : une idée originale de Lou Camino développée par Coralie Vincent

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The fourth generation of Objectif_3280 is now open! 27 pictures have to be suggested to answer to the 9 echos of the second generation, who took us, as shown on the map above, after Japan, Zanzibar and Malta, to Canada, United States, France, Spain, Morocco and England. With associations of ideas guided by forms, colors, themes, atmosphere! As for the echo-munauty, it is predominantly in France. Tomorrow, I will mention Objectif_3280 on groups and discussion groups. For the next generations, 81, 243, 789 and finally 2 187 echos are expected, within 4 days each time! But, for the meantine, you can already choose the picture to wich you want to give an echo : visit the echo-photographic tree!

Thanks for your participation to this echo-logical adventure !

Objectif_3280, an original idea of Lou Camino, developed by Coralie Vincent.

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La météo et la politique sont deux sujets que l’on peut sortir de son bonnet lorsque le blanc s’installe dans une conversation à plusieurs, à tel point qu’il en devient gênant. Plus rien à se dire. Chacun se tortille intérieurement pour trouver le sujet qui relancera l’échange, tout en essayant de repousser au maximum le joker météo (on le garde en dernier recours, car il marche à tous les coups). La thématique politique est tout aussi efficace, encore plus lorsque les avis des personnes en présence divergent. Dans un tel cas, votre soirée, que vous pensiez ratée, est sauvée, mais pas forcément l’amitié qui vous unissait à vos voisins de table ! De fait, la météo est bien plus consensuelle. Evidemment, l’on pourrait aussi imaginer quelque chose du genre :

A : Ah non, je ne suis absolument pas d’accord avec toi ! Cette pluie était totalement malvenue !

B : Mais tu racontes n’importe quoi, une fois de plus. Si tu voyais un peu plus loin que ta petite personne, tu verrais, que comme nous tous autour de cette table, cette pluie est, en vérité, la meilleure solution pour tous dans la situation désastreuse dans laquelle nous nous trouvons !

C : Euh, moi, je ne pense pas ça non plus…

B : Comment ? T’es avec lui alors ? Vous êtes vraiment tous des égoïstes ! Vous n’avez rien compris ! Donc, encore une fois, ça devient lassant à la fin, je vous explique…

C : Bah non, je ne pense pas comme lui non plus !

B : Et ben voyons ! Alors, quel est ton avis sur cette pluie ?

C : Je n’en ai pas. Je m’en moque totalement de cette pluie ! J’ai autre chose à penser dans ma vie !

B : Je n’y crois pas ! Il y a des hommes et des femmes qui se sont battus des années pour que nous ayons le droit de dire ce que nous pensons sur la pluie, et toi, comme ça, tu t’en moques totalement ? Pfff… Je ne sais pas ce que je fais là, vraiment…

Bon, ce serait amusant… Du coup, je me sens obligée de parler météo. Non parce que je n’ai rien à écrire (loin de là), ni pour lancer une nouvelle polémique, mais parce que c’est de circonstance. Il neige. Sans discontinu depuis plusieurs heures. Des flocons magnifiques qui brillent comme des diamants que je ne convoite pas ; qui, propulsés par le vent, scintillent comme des étoiles filantes. Montréal essuie, en ce moment même, sa première petite tempête de neige. C’est-à-dire qu’il n’y a que 50 cm de neige dans les rues. Dans un tel pays, la discussion météo a probablement un vrai rôle social. Dans un pays où à 00h34, des voisins raclent la neige sur leur terrasse, elle n’est sûrement pas un sujet pour combler la neige, euh, les blancs, mais un sujet en soi, de partage d’un rendez-vous annuel à la fois magique et sûrement éprouvant aussi ! Enfin, nous verrons de quoi nous parlerons demain…

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Avez-vous déjà fait l’expérience d’écouter du brouhaha ? Il est vrai, que d’une manière générale, le brouhaha, on ne fait que l’entendre. On ne peut d’ailleurs faire que ça… Sans gêne, il s’incruste au restaurant, dans les salles de spectacle, les stades, les manifestations, les classes, les cours de récréation. Une sorte de rumeur à laquelle chacun participe inexorablement par le seul fait d’ouvrir la bouche et d’émettre un son.  Ce qu’il y a de fascinant lorsque l’on écoute le brouhaha – et donc, que l’on se plonge soi-même dans un silence d’or -, c’est que, comme dans un épais brouillard, les phrases, les mots, les syllabes, les lettres perdent totalement leur identité, leur relief. Et dans la foulée, leur sens. Tout se fond en un magma indistinct de sons et de bruits, constituant, bizarrement, une ambiance sonore uniforme. Seul un éclat de rire, un tintement de couverts sur une assiette, deux verres qui s’entrechoquent, un larsen viennent rompre la monotonie bruyante de cette espèce de langage que personne ne serait en mesure de parler seul, bien que le maîtrisant parfaitement en groupe. Car, dans cette langue légèrement surréaliste, chaque phrase est le fruit de mots prononcés par plusieurs personnes et n’a de sens pour aucun d’entre eux.

Mais est-ce vraiment le plus étonnant ? Que vous soyez à Paris, à New York ou à Rome, cette langue semble résonner de la même manière. Quelle que soit la langue parlée, le brouhaha la dépouille de ses intonations, ses accents, sa musique qui en font son unicité. Quelles que soient les différences, celles-ci sont gommées par la superposition. Superposition, c’est ce mot qui m’est venu à l’esprit lorsque je me suis demandé comment transposer cette expérience sonore en photographie. Superposition d’images donc, n’ayant rien à voir les unes avec les autres, comme les conversations télescopées de différentes tables, donnant un ensemble indéterminé, indéfini, incohérent, improbable, irréel dont on peut, malgré tout, reconnaître certains éléments, des taureaux, des lumières, des arbres, des parasols, des lettres, du ciel, de la terre. Et si l’on continuait à multiplier les couches sur cette esquisse, si l’on réitérait l’expérience avec une autre série d’images, le résultat serait probablement tout aussi universel qu’avec les sons. Ces parties encore discernées s’effaceraient pour se transformer, petit à petit, en des traits puis, des points. Et, alors que les sons continueraient à s’imposer, oppressants, l’image, elle, décomposée, disparaîtrait.

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Et voilà, la 3e génération d’Objectif_3280 est déjà complète ! Comme son aînée, elle s’est remplie extrêmement vite… Et nous sortons de la France et du Canada avec un écho provenant du Maroc ! J’espère que ce n’est qu’un début. En attendant, compte tenu de la réactivité de l’écho-munauté, nous avons décidé d’avancer la date d’ouverture de la 4e génération. Initialement prévue mercredi 8 décembre, elle aura lieu mardi 7 décembre. Il y aura alors 27 échos à proposer. De nouveaux voyages en perspective ! Rendez-vous donc sur l’arbre écho-photographique pour cultiver votre imaginaire.

Et grande nouvelle : on parle déjà d’Objectif_3280 sur la toile ! Voir le blog de Laurence Serfaty.

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There we are! The third generation of Objectif_3280 is already complete! As its elder, it was filled very quickly… And we get out of France and Canada with an echo coming from Morocco! I hope it is just the beginning. In the meantime, taking into account to the echo-munauty reactivity, we have decided to bring foward the opening of the 4th generation. Iniatially intended to start on wednesday, it will start tuesday. There will be 27 echoes to suggest. New journeys in prospect! Go to the echo-photographic tree to cultivate your imagination!

And great news: there is an article about Objectif_3280 on Laurence Serfaty‘s blog.

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« Ecrire, ce doit être une souffrance », m’avait-il dit. Sur le coup, cette petite phrase m’avait fait mal. Je ne comprenais, en effet, pas pourquoi faire ce que l’on aime devait être douloureux. D’une manière générale, pour tout être normalement constitué (mais, est-ce qu’il existe vraiment ?), lorsqu’une action nous fait souffrir, on évite d’avoir à la faire… On me rétorquera peut-être que l’on n’a pas toujours le choix. De quatre choses l’une, soit ce qui m’a été asséné comme une vérité irréfutable est faux et je suis soulagée, soit c’est vrai et c’est malheureux. Pourquoi l’écrivain, le peintre, le sculpteur, l’artiste en général, traîne-t-il cette maudite image de torturé ? Ne peut-on créer dans la joie, la paix et la bonne humeur ? Faut-il alors, lorsque l’on désire être l’un ou l’autre (là, encore, est-ce vraiment un désir, ou quelque chose qui s’impose à soi, et donc, qui n’est pas forcément de l’ordre du conscient… encore que le désir peut être inconscient…), s’autoflageller pour être certain de créer quelque chose de profond ? en tout cas, qui soit pris au sérieux ?

Ce qui me conduit à évoquer un questionnaire conçu par une unité de recherche en littérature de l’Université Sorbonne nouvelle pour préparer une table ronde sur notre rapport à la littérature. Il y a notamment une question liée aux raisons pour lesquelles un écrivain écrit et des réponses si diverses et variées de leur part, que l’on peut imaginer qu’elles sont franches. C’est vrai, on est sensé savoir pourquoi on fait ce que l’on fait ! Donc, en vrac, parce qu’on a à dire ce que personne n’a dit, parce que c’est comme une sorte de jeu pour adulte, par terreur vaniteuse de disparaître complètement, parce que je ne sais pas parler, parce que ça me donne plus d’argent et d’une façon gratifiante, pour devenir célèbre et être libre, parce que j’aime mentir, par amour des mots, pour ne pas devenir fou, pour mettre en accusation l’humanité, pour qu’on m’aime davantage, bon qu’à ça et enfin, pour créer de l’ordre, de la beauté, de la vie. J’aime bien cette dernière raison, même si, spontanément, je n’associe pas l’ordre à la beauté et à la vie. Pour créer de la beauté, de la vie, idéalement pour partager une vision, un univers, réel ou inventé. Pour voir le monde autrement et montrer ce que l’on ne voit pas toujours. Comme avec l’image. Pour le plaisir surtout. Le bonheur que cela procure de jouer avec les mots, les idées, les sons, les  lignes, les couleurs, les formes… la vie. Voilà. Ceci était le 300e duo de ce site…

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Carte Objectif_3280

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Après le succès fulgurant d’Objectif_3280 à son lancement – les trois échos à ma photo ont été postés en moins de 30 minutes ! -, l’aventure continue ! Dans moins de 12h maintenant, la troisième génération sera ouverte pour trois jours : 9 échos seront à proposer pour apporter une nouvelle suite au trio de la deuxième génération ! Vous pouvez d’ores et déjà réfléchir à l’écho que vous proposerez en jetant un œil à l’arbre écho-photographique. Par ailleurs, une petite carte nous permet de suivre la localisation de l’écho-munauté et bientôt, de celle des images envoyées ! Tout le monde, au sens propre, peut participer !

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After the lightning success of Objectif_3280 on its launching day – the three echoes have been posted within 30 minutes! -, the adventure goes on! In less than 12 hours now, the third generation is going to open and will stay so for 3 days: you will have to suggest 9 echoes to give a sequel to the second generation trio! You can already think about the echo you will upload by glancing at the echo-photographic tree. Moreover, a small map allows us to follow the echo-munity’s location and soon the sent pictures’ origin! Everyone, literally speaking, can participate!

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Objectif_3280, qu’est-ce donc que cela ? Une nouvelle lubie ? Un peu oui ! En fait, une expérience artistique collaborative inédite et utopique à laquelle je vous invite à participer !

Un peu à la manière d’un cadavre exquis, il s’agit d’ériger, sur 8 générations et en 26 jours, un arbre écho-photographique à 3 280 feuilles. Les plus concentrés d’entre vous se demanderont comment on passe de 8 à 3 280 en 26 jours, quand les plus matheux répondront : « C’est facile : pour chaque photo, il y a 3 échos possibles ! ».

Donc, je poste la première photo (celle ci-dessus), vous inventez la suite ! Nous découvrons les histoires de l’écho-munauté en direct sur www.loucamino.com !

Plus les jours avanceront – et le temps passe très vite -, plus le nombre de photos nécessaires pour faire pousser l’arbre sera grand. Que vous participiez est une excellente chose, mais n’est donc pas suffisant : il faut transmettre ce mail, relayer l’information, utiliser ses réseaux, les bleus, les jaunes, les rouges, faire passer le message à la radio, dans les journaux, et aussi sous l’eau ! Le rêve éveillé : que les photos arrivent des quatre ronds du monde… Donc, si vous avez des amis à Java, Irkoutsk, Santiago du Chili ou Bamako, c’est le moment de leur dire bonjour !

Si tout cela vous semble un peu obscur, si vous êtes déjà conquis, si vous voulez en savoir plus, si vous voulez vous lancer dans l’aventure, vous êtes au bon endroit ! Les entrées sont multiples : via le cadre rouge à droite, dans le menu au-dessus, ou en cliquant là directement.

Alors, merci d’avance pour votre collaboration !

PS : il se peut que des petits problèmes techniques surviennent dans les premiers jours. Merci de nous en informer !

Objectif_3280 : une idée originale de Lou Camino développée par Coralie Vincent.

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Hi everybody,

Objectif_3280, what is that exactly? A new whim? Yes, a little bit! Indeed, an unheard-of and utopian collaborative artistic experience to which I invite you to participate.

In the manner of an exquisite corpse, the aim is to erect, on 8 generations and 26 days, an echo-photographic tree of 3 280 leaves. The most concentrated of you will ask how we get from 8 to 3 280 in 26 days, when the most mathematicians of you will answer : « Easy : there is three possible echos for each picture! ».

So, I post the first picture (the one above). You invent the next ones. We discover the stories of the echo-munity live on www.loucamino.com

With days – and time goes by so fast -, the need of pictures to make the tree grow increases drastically! So, your participation is great but not sufficient: you have to transfer this email, share the information, use the networks, the blue, the yellow, the red ones, put the message on the radio, in the newspapers, and also under water (in french, words rhyme)! The awakened dream: receiving pictures from all over the world. So, if you have some friends living in Java, Irkoutsk, Santiago de Chile or Bamako, it is time to say hello!

If this looks strange to you, if you are already an appreciative audience, if you want to know a little bit more, if you want to participate to the adventure, you are at the right place! Or, you can enter through the menu above, the red frame on the right or just here.

Thanks in advance for your collaboration!

PS: technical problems may occur in the next days. Thank you for letting us know!

Objectif_3280, an original idea of Lou Camino, developed by Coralie Vincent.

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category: Actus
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– Vous la reconnaissez ?

– J’ai un peu de mal, mais je crois que c’est la deuxième en partant de la gauche. Je me souviens de son nez tronqué

– Ah, que n’inventerait-on pas pour détourner l’attention ?

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C’est le nom de l’agence de voyage temporel qui a le vent en poupe en ce moment. Peut-être parce que, contrairement à d’autres, plus anciennes et plus généralistes, celle-ci a osé la spécialisation et choisi un créneau bien particulier : les années 20. Avec le recul, les voyagistes du temps, tout aussi touchés par les modes que leurs homologues seulement géographiques (sans que cela ne soit péjoratif), ont remarqué qu’il y avait toujours beaucoup de postulants pour cette décade de l’entre-deux guerre. Le music hall, les belles tractions, les débuts de la haute couture, le charleston, les arts déco, les cheveux courts à la garçonne, la prohibition, les chapeaux cloche et autres borsalinos à la Eliot Ness, tout cela est effectivement très cinégénique… C’est d’ailleurs sur les films que ces clients du futur, mais du passé, s’appuient pour déterminer leur époque de destination. « Des films d’époque », comme on dit.

Ainsi en est-il de cette photo de tournage de l’un des films de démonstration mis à la disposition des clients à l’agence. Je m’en souviens comme si c’était hier, puisque c’est moi qui l’ai prise. La nuit venait à peine de tomber et j’entrais tout juste dans le Vieux Montréal, où les premiers gratte-ciels du Canada ont été érigés et où l’architecture néo-classique à l’anglo-saxonne domine avec fierté. Les ampoules des réverbères n’étaient pas encore allumées. C’est une heure un peu étrange, où il fait encore un peu jour mais plus vraiment, mais pas encore nuit non plus. Photographiquement parlant, une heure sans relief dont on attend la fin avec impatience. Bref. Place des Armes, des ventouses. Et qui dit ventouse, dit parfois tournage. C’était effectivement le cas. Il y a quelque chose de magique à tomber, par hasard, sur un tournage, a fortiori, lorsque c’est un « film d’époque ». Le voyeur qui est en nous nourrit toujours le secret espoir de voir « quelqu’un de connu », une star quoi !, ce qui, en réalité, est extrêmement rare. Il attend, il attend, et réalise finalement, qu’un tournage, c’est long. Ceux-là se passent souvent dans des petites rues, dans de vieux quartiers, à l’abri des regards indiscrets. Pour les pavés, les vieilles bâtisses… Un film d’époque tourné à Dubaï serait pour le moins déroutant en effet… Et d’ailleurs, s’il n’y avait pas eu cette succession immanquable de tractions lustrées comme un camion tout neuf – une petite trentaine au moins -, j’aurais sans doute poursuivi mon chemin, la pellicule étant vraisemblablement rangée pour la journée, la ruelle étant enveloppée d’un calme post-combat. Débarquer dans ces espaces-temps filmiques, comme dans toute reconstitution historique sérieuse, nous extrait instantanément de notre présent et nous propulse dans un temps que nous n’avons, souvent, pas connu. Un voyage dans le temps, en quelque sorte… Sans attendre qu’il n’existe réellement.

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