Photo-graphies et un peu plus…

La physique quantique a quelque chose de réconfortant pour les petits humains que nous sommes, même si, en tant que petits humains justement, nous ne sommes pas forcément aptes à la comprendre, a fortiori, à mesurer toute sa puissance, voire sa toute puissance. Sans jeux de mots, elle permet, d’un certain point de vue, de relativiser un certain nombre de ces choses qui titillent notre quotidien, en somme, notre réalité. La vraie, la palpable, celle qui fait aïe quand on la pince. Car, grâce à la physique quantique, tout devient théoriquement possible. Et ça, c’est un vrai soulagement ! De celui qu’éprouve Helena dans You will meet a tall dark stranger, le dernier film de Woody Allen, lorsqu’elle réussit à se convaincre que la réincarnation existe. Dès lors, la vie présente n’est plus aussi importante ni stressante, puisqu’elle a été précédée d’autres et sera suivie de nouvelles. C’est une manière radicale de faire baisser la pression.

Par exemple, dans la vraie vie, nous avons parfois des difficultés à faire des choix. Et puis, une fois que nous avons finalement réussi à en faire un, nous ne pouvons nous empêcher, dans un laps de temps plus ou moins long selon les individus, de nous demander ce qu’il  serait advenu si nous en avions fait un autre. La physique quantique résout potentiellement ce cruel problème de conscience, grâce aux univers parallèles. En schématisant grossièrement, et cela m’a été rappelé ce soir par une lumineuse conférence portée par l’éclectique Martin Winckler et le lumineux Stéphane Durant sur la faisabilité des voyages dans le temps, la théorie quantique stipule que tous les possibles existent parallèlement. C’est la raison pour laquelle il y a une autre photo à droite. Dans la vie réelle, celle dont je suis consciente, la mienne, je n’ai pas réussi à en exclure. Mais, grâce à l’existence de ces mondes parallèles, je n’ai plus à m’en soucier, car je sais que, quelque part, un autre moi a choisi la deuxième photo.

Le fait est que j’hésitais entre trois images pour illustrer ce texte. Et voilà qu’une chose étrange se produit. En me promenant dans mon désert, je tombe, non pas sur, mais dans un trou de vers. Vous savez, ces trous qui commencent comme des trous noirs, mais qui, en « réalité », ont une sortie. Bref, j’en ressors donc, un peu secouée, dans une autre dimension. Bingo, je suis dans un de mes univers parallèles. Et étant donné ma difficulté à faire des choix, ça doit vraiment être le chaos là haut ou je ne sais où. Bref, rencontre avec une copie de moi-même, celle qui avait choisi la première photo. Ce qui signifie que j’ai choisi la deuxième… Paradoxe ! Comment aurais-je pu faire ce choix et mettre celui de ma copie en premier ? Quoi qu’il en soit, moi et moi échangeons nos arguments quant à cette notion de choix d’image, les petites billes à l’infini, les rouages d’horloges superposées démultipliés. Tous se valent en fait. Et sans nous en rendre compte, nous tombons, non pas sur mais dans un nouveau trou de vers. Deux fois en 2 432 ans, une chance inouïe ! Et là, nous basculons toutes les deux dans un de nos autres univers parallèles, celui de notre troisième choix. Celle-là, juste au dessus. Avec une autre copie de moi-même, enfin, de nous-mêmes, en train de se demander si elle n’aurait pas mieux fait de choisir la deuxième, donc la mienne. Ce qui tombe bien, puisque je finissais par avoir des doutes quant à mon choix.  Ces espèces de fils de lumières qui se coupent et se recoupent dans un univers recourbé sur lui-même, c’est quand même pas mal. Heureusement, comme tout est possible en théorie, avec ma deuxième copie, nous décidons, d’un commun accord, d’échanger nos vies. Sans regret, je dis donc au revoir à mes deux copies, tout en prenant bien soin de ne pas révéler à celle qui a accepté de prendre ma place qu’un tas de copies l’attends sur le bureau… Une fois seule, avec mes circonvolutions, une question me taraude : si ma deuxième copie m’a remplacée, qui est l’originale désormais ? Oh hé, il y a quelqu’un ? J’ai comme la nette impression que certains ont choisi d’aller voir dans un de leurs mondes parallèles s’ils y étaient !

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Cette impression de pluie s’abattant sur les promeneurs nocturnes montréalais est l’une des 18 photos proposées au concours annoncé hier. J’en remets une couche. A tel point que cette image-là n’est d’ailleurs pas tout à fait celle que j’ai envoyée. Mais l’objectif n’est pas de parler de ces photos, mais plutôt de la façon dont Facebook vampirise tout progressivement.

Seuls ceux qui possèdent un compte dans cette nouvelle banque de données mondiales (mais il ne faut pas s’inquiéter, ce ne sont que des amis qui vous veulent du bien…) peuvent en effet dire qu’ils aiment telle ou telle image, voire la commenter. On me rétorquera qu’ils sont quand même 500 millions, ce qui est un public potentiel inespéré pour les 66 627 personnes qui ont déposé, à elles seules, 342 960 photos… Reste que 500 millions d’amis (sûrement plus depuis la sortie du film de David Fincher), c’est beaucoup, mais ce n’est pas tout le monde ! 5 197 254 041 sont mis à l’écart pour d’obscures raisons.

Il est dommage qu’un concours ouvert à tous au départ soit finalement réservé à une frange de la population. Et combien de personnes finissent par s’inscrire, après avoir pourtant résisté à ce nouvel objet de pression sociale (« quoi, tu n’es pas sur Facebook ! mais, comment fais-tu pour communiquer avec le reste du monde ? », quelques années après « quoi, tu n’as pas de portable ! mais comment fais-tu pour vivre ? »), pour pouvoir faire leur devoir artistivique et voter ? Quel argument recevable peut justifier une telle exclusion ? On ne peut être amateur de photo que si l’on est sur Facebook ? Un visiteur avec un carnet d’adresses plein est sans doute plus intéressant qu’un internaute lambda-sans-ami-le-pauvre… Et cet exemple anodin, qui en dit long sur la puissance de cette nouvelle élite de masse, n’est que la partie émergée du Zuckerberg !

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Voilà, comme annoncé il y a quelques jours dans Petite voix vs grande voie, je participe au concours photo Metro Global Challenge Trois thèmes : émotions, endroits favoris, trajets quotidiens. A piocher dans les images faites dans une ville canadienne. Donc, depuis peu. Ce qui n’ôte rien à la difficulté du choix. Bienheureux ceux qui savent en faire sans se demander après s’ils ont fait le bon…

Bref, pour aller voir mes photos candidates, il suffit de cliquer . Vous pouvez commenter, partager… ou juste les regarder !

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Souvent, en passant devant ce genre d’affiche légèrement désespérée, j’ai ri. Et ce n’est pas à cause des fautes d’orthographe. Evidemment, je suis très triste pour le propriétaire du chat, du chien, du doudou… Encore que le doudou ne cadre peut-être pas (ils ne sont pas si fous !) avec ce qui va suivre. Sauf si ce sont les enfants qui rédigent l’annonce… Donc, malheur ô malheur, un chat s’est égaré. Ces messages comportent un certain nombre de points communs. Un titre : Perdu. Ici, en anglais aussi car ville « bilingue ». Une photo de la bête, pas toujours à son avantage. Ici, un coup de flash dans les yeux et une copie en noir&blanc conférant à l’animal un air de vieux lapin ayant contracté la myxomatose.

Et puis, une expression : « chat/chatte répondant au nom de ». Ici, Gypsy… C’est cela qui m’arrache un sourire moqueur. J’imagine le promeneur qui est tombé sur l’affiche en allant chercher sa baguette matinale, et qui vient d’apercevoir une chatte blanche cachée entre deux voitures bleue et noire : « Gypsy ? C’est toi ? » lance-t-il innocemment. Et là, le chat, tout naturellement : « Casse-toi, pauv’ con ! Est-ce que j’ai une tête de Gypsy ? » Bah oui, le jour où un chat répondra à une question, c’est que nous aurons tous été absorbés par un dessin animé (Félix ?). Puis, il y a le bonus, propre à chaque annonce. Ainsi, ce que dit, à demi-mot, cette affichette est aussi que, si d’aventure, vous réussissez à trouver Gypsy, celle-ci vous griffera certainement. Agression dont il ne faudra pas lui tenir rigueur, car, malgré tout, elle est « tellement adorable » ! Eric a vraisemblablement quelque chose à se faire pardonner, mais il faudrait qu’une âme charitable lui explique que les chats ne lisent pas non plus…

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La lecture des magazines distribués dans les cinémas, pourtant très consensuels, fait parfois faire des bonds. Le dernier en date est provoqué par une banale brève sur une colonne de droite. On y comprend, à la deuxième lecture car ce n’est pas très clair, ou plutôt, on a du mal à y croire, qu’une banque de sperme américain(e) propose à ses clients (femmes célibataires et couples stériles) de la matière première issue de sosie de stars… Garantie sans trucage. Et que, dans le casting de sosie de sperme proposé, c’est celui de Ben Affleck qui est le plus demandé. Lui ou un autre, en réalité, peu importe. C’est l’absence de maturité des futurs parents qui me fait d’abord sursauter. Jusqu’où peut aller la bêtise humaine ?

Car, en regardant leur enfant grandir, ce n’est pas vraiment lui qu’ils regardent. Mais le petit, qui n’a rien demandé évidemment, sensé de plus en plus ressembler à Ben Affleck, ou n’importe quel autre acteur. C’est cela qu’ils vont scruter chaque jour. Et si jamais le petit ne ressemble pas à Ben Affleck, ou n’importe quel autre acteur, qu’adviendra-t-il ? Les parents auront-ils l’impression d’avoir été trompés ? Seront-ils déçus ? Iront-ils rendre leur fils à la banque de sperme ? Et lui, comment vivra-t-il le fait d’être aimé pour ce à quoi il ressemble et pas pour ce qu’il est. Evidemment, l’un n’empêche pas l’autre. Mais lorsque l’on fait ce choix de sperme, il faut s’attendre à tout… Les relations parents-enfants ne sont sûrement pas suffisamment complexes. Un coup marketing qui en dit surtout long sur l’aura de ces étoiles filantes.

Il y a quelques années, ce n’est pas une belle gueule que les parents ne pouvant avoir d’enfants naturellement cherchaient, c’était une tête bien pleine. L’exemple le plus significatif étant la banque de sperme de prix Nobel, d’artistes et d’hommes d’affaires créée par Robert Graham dans les années 1980 (et qui a inspiré le film Jumeaux d’Ivan Reitman, posant d’intéressantes questions sur l’eugénisme. Si, si…). Dans les faits, seuls trois (vieux) prix Nobel y ont participé, mais leur semence n’était pas suffisamment alerte pour aller plus loin que l’éprouvette. Intelligence versus beauté… L’éternel (et stupide) dilemme. Sinon, la société californienne rechercherait le sosie de George Clooney. Donc, si vous aimez  le café, n’hésitez pas à les contacter ! What else ?

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Pendant que le cinéma projette son feu d’artifice sur le macadam noir pétrole, un drame se joue. La fin d’un leurre. Que dis-je ? D’un mythe. Une légèreté. L’échange débute, autour d’un café et d’un croissant, par une question toute simple. « Il y a une école de musique à Brooklyn ? » On s’imagine tout de suite la ville, ses immeubles en briques, un peu décrépis… La musique étant souvent associée à la danse, une autre image se dessine rapidement. Un film en fait. Flashdance d’Adrian Lyne. Un classique (désopilant) des années 80, avec des coupes de cheveux ahurissantes, des tenues déconcertantes, mais une bande originale décoiffante (Maniac ou What a feeling, pour l’essentiel sur lesquelles on a toutes essayé, bien cachées dans nos chambres, d’agiter nos gambettes comme Alex) et des scènes de danse bluffantes. Le film qui a lancé Jennifer Beals.

On a tous en tête – mais si, n’ayez pas peur – cette scène finale où son personnage en met plein la vue à un jury d’abord ennuyé avant d’être emporté par le rythme de la soudeuse-danseuse. Du coup, deuxième question café-croissant : « ce n’est pas à Brooklyn qu’a été tourné ce film ? » L’antisèche universelle nous apprend en 0,3 s que non, c’est à Pittsburgh. Et en lisant un article consacré au 3e plus gros succès cinéma de l’année 1983 aux USA (moi, je m’en souviens plutôt comme de l’année de la victoire de Yannick Noah à Roland Garros, émue en direct…), je tombe dessus : Jennifer Beals était doublée pour  les scènes de danse. Premier choc ! Je croyais naïvement que c’était pour ses qualités de danseuse qu’elle avait été choisie… Deuxième choc : elle n’a pas été doublée par une mais par trois personnes : deux femmes (Marine Jahan, Sharon Shapiro), un homme (Crazy Legs, nom de scène a priori). Et dans cette fameuse scène finale au montage stroboscopique, quatre personnes sont en fait sur scène. La tête de Jennifer Beals, le corps de Marine Jahan, celui de Sharon Shapiro pour le saut de gymnaste et celui de Crazy Legs pour le passage de breakdance. Dans ce contexte, s’agit-il encore de cinéma ou de cuisine cinématographique ? Allez, pour parfaire le tableau, le nom de Marine Jahan n’était pas au générique. D’où la troisième question café-croissant : « Mais qu’a donc fait Jennifer Beals dans ce film ? » L’histoire ne dit pas si elle était aussi doublée quand son personnage faisait de la soudure. Elle portait un masque !

En revanche, ce qu’elle dit, c’est que la Paramount a proposé à David Cronenberg de réaliser ce film… Une proposition sûrement surréaliste pour celui qui vient de commettre le film d’horreur Scanners et qui, cette même année 1983, propose Videodrome et The Dead Zone. Alors, Flashdance dirigé par David Cronenberg, cela aurait donné quoi ? D’abord, Alex n’aurait pas été soudeuse, mais conceptrice de jeux vidéos très organiques. Chaque soir, une dangereuse corporation aurait pris le contrôle de son cerveau pour lui faire interpréter des danses mécaniques, accompagnée de dizaines d’hommes déguisés en mouche… A la fin, un membre du jury, sorti de plusieurs années de coma avec des pouvoirs divinatoires, lui aurait lâché qu’il était inutile qu’elle danse car elle allait rater la scène de breakdance. Alex, furieuse, quitterait les lieux en courant, grimpant dans sa voiture décapotable pour aller se planter dans un mur de béton, avant de s’envoyer en l’air avec son petit ami entièrement recouvert de tatouages et infiltré dans la mafia russe. Définitivement, cela n’aurait pas du tout été le même film. Et sinon, oui. Oui, il y a une école de musique à Brooklyn. On y enseigne aussi la danse d’ailleurs…

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Lorsque j’ai pris cette photo, alors bringuebalée à l’arrière d’une jeep en direction d’Antelope Canyon, ce que j’ai voulu voir, c’est le reflet du conducteur dans le rétroviseur ainsi que celui du paysage sur le dos du phare supplémentaire greffé à l’avant de la carlingue. Evidemment, je savais qu’il était Indien,  l’ayant vu monter dans le véhicule. Ce canyon magnifique, situé sur une réserve Navajo, est, de fait, géré par la communauté. Que le guide, dont on ne voit pas le visage, porte un T-shirt sur lequel figure un Indien était donc le détail motivant la prise de vue. Je n’étais pas allée plus loin que : « Oh, c’est amusant, il est Indien et il a un T-Shirt avec un Indien ! »

Aujourd’hui, je ne trouve plus cela très amusant en fait, mais questionnant. Quel message veut en effet faire passer un Indien portant un vêtement montrant un membre de son groupe en habit traditionnel, peut-être tel qu’on se le représente dans notre imaginaire biaisé par les westerns manichéens ? Est-ce une sorte de mise en abyme ? « Je suis cet Indien sur ce T-Shirt, mais, en même temps, je ne suis plus cet Indien sur ce T-Shirt avec son arc et ses flèches. Je conduis une voiture, j’ai une montre, je fais visiter mon canyon à des visages pâles. » Est-ce de l’auto-dérision ? Ou au contraire, une façon de montrer sa fierté d’appartenir aux premières Nations ? Une façon de dire : « je suis une icône ! » ? La question est transposée sur d’autres terres. Un Kenyan porterait-il un T-Shirt avec des Masaïs en train de faire des bonds ? Et un Français, un avec un petit vieux doté de baguette et béret ? Revendiquer de tels clichés peut-il relever d’autre chose que de l’auto-dérision ? Et pourtant, ce sont probablement ces pièces de coton que les touristes ramènent le plus de leurs périples exotiques. Car ce sont souvent ces clichés, ces images d’Epinal qu’ils viennent chercher.

Quoi qu’il en soit, cette simple photo montre que l’interprétation que l’on peut faire d’une image, même si l’on en est l’auteur, change avec le temps. Rien de plus naturel en fait, étant soi-même quelque chose en devenir. Ainsi la photographie n’est pas cette image figée à laquelle on pense parfois. C’est une image animée d’une vie, d’une histoire évoluant au gré des yeux qui la regardent…

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Pas la chanson mémorable de Babs, le jeu, le Memory, celui qui a inévitablement bercé l’enfance de toute personne née après 1959 ! Un double jeu de cartes aux images identiques, carrées, que l’on mélange et puis étale religieusement sur une table bien plane (pour ne pas voir ce qu’il y a de l’autre côté). A chaque tour, un joueur retourne deux cartes, d’abord au hasard. Si, par chance, ce sont les mêmes, il les emporte avec lui. Si, au contraire, elles sont différentes, il les repose tout en mémorisant bien leur position… Et cela passe à quelqu’un d’autre. L’objectif étant de retrouver les paires au fur et à mesure que les cartes sont soulevées et dévoilées par les uns et les autres. D’où l’importance d’être extrêmement concentré à tout moment. Un véritable exercice de mémoire dont j’ai abusé et qui, j’en suis fondamentalement sûre, a contribué  au développement d’une certaine mémoire… photographique. Celle-là même qui, notamment, me permet de me repérer facilement dans n’importe quelle ville inconnue, mais, étrangement, de me perdre allègrement dans un parc, comme Central Park. Tous ces arbres…

Bien. Extraire une photo d’une base de données en comptant plusieurs milliers pour la mettre sous le feu des projecteurs et lui donner vie aux yeux des regards étrangers, relève du même exercice ou jeu de mémoire. Celui de savoir, toujours un peu plus à chaque fois qu’elle est parcourue, ce qu’il y a dans cette base. On finit par se balader mentalement entre les images et les dossiers comme dans les rues d’une ville imaginaire qui s’étendrait au fur et à mesure que le stock de photos s’agrandit. « A droite, tu trouves les photos de Malte ; là, si tu continues tout droit jusqu’au troisième dossier à gauche, il y a quelques essais d’ombres à la galerie du Jeu de Paume. Juste derrière, on s’envole vers l’Italie. Et là-bas, tout au fond, il y a les photos d’enfance… » Cela ferait une belle installation ! Mais j’en perds le fil… Fichue mémoire. Avoir toutes ces images à l’esprit amène forcément à faire quelques connexions en temps réel. « Cela me fait penser à … ou à … » Un jeu de Memory, légèrement plus élaboré, se crée inconsciemment sous nos yeux. Le but n’est alors pas de retrouver deux images identiques (encore que cela pourrait être instructif) mais plutôt similaires. Ainsi en est-il de ces deux-là que tout oppose mais dont la filiation saute aux yeux. Par cette verticalité symbolique, par ce trio de lignes coupant l’espace en trois, trois chemins de terre bien découpés dans un parc royal suédois ; trois tours identiques se découpant dans un ciel bleu new-yorkais. J’avais, pendant quelques jours, retourné la photo du bas. Comme si les buildings n’étaient autres que les racines des arbres… Mais alors, ce qui précède, pensé en léger différé, ne fonctionnait plus. Or, une question se pose chaque jour : qui, du texte ou de l’image, l’emporte sur l’autre ? Suivie d’une autre : faut-il que cette question ait une réponse ?

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Ou l’addition, selon l’endroit où l’on se trouve. Celle que l’on a à régler lorsque l’on va au restaurant. A deux, c’est facile. Mais évidemment, plus le nombre de convives croît, plus la situation devient potentiellement complexe. A la fin. Au moment fatidique. Celui où le serveur vient apporter la petite assiette. Je n’invente rien. La chose est tellement commune que Muriel Robin en a fait un sketch mémorable. « Pardon, Myriam, ça t’ennuie qu’on partage ? » J’avoue avoir été une Myriam par le passé, celle qui n’avait commandé qu’une salade parce que un peu ric-rac et qui n’avait donc pas spécialement envie de participer à l’achat de la côte de bœuf – assiette de cèpes du voisin, néanmoins ami, dans laquelle elle aurait volontiers croqué.  Et puis, allez demander une addition séparée à nos serveurs français ! Au mieux, on vous ramène la carte. Assurément, cette question de l’addition est culturelle. Il y a même une page Wikipédia consacrée à la question où l’on apprend que les Italiens sont les plus pro-partage…

Bon, allez, traversée de l’autre côté de l’Atlantique pour un de ces petits détails du quotidien dont je raffole. A Montréal donc, la question de l’addition – que dis-je, la facture – commune ne semble pas se poser. Que vous soyez 4 ou 11, on vous fait des factures séparées le plus naturellement du monde. Cas à la fois récent et épatant pour la petite française ayant encore en mémoire la tête du dernier serveur français à qui a été demandée une telle opération : 11 à table, avec des commandes prises à des moments différents pour cause d’invités arrivant progressivement, et changeant de place pendant le repas. Un plat par ci, une bière par là, et puis une autre… A la fin du repas, 11 notes différentes et pas une erreur. Pas de malaise à table (ils sont habitués, eux), même si un autre calcul attend tout le monde : le service. Pas compris dans la dite facture. Ajouter 10 à 15%, ou, faire la somme des deux taxes TPS (fédérale) et TVQ (provinciale). Et étonnamment, cette étape semble être systématiquement une source de questionnement : « combien on laisse ? », alors que là aussi, ce devrait être une habitude. Ce petit flou bénéficie en général au serveur qui a accepté de mémoriser les trombines et les commandes de 11 personnes différentes car la somme laissée par onze personnes séparément est toujours supérieure à celle que laisserait une tablée de 11 personnes…

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Voilà que le soleil, totalement ébloui lui aussi par ce lieu enchanteur vers lequel mes pas et mes mots ont déjà convergé plusieurs fois (De l’air, Temps de pause au moins) déclare sa flamme à cette étendue d’eau sur laquelle se reflètent les arbres dépossédés de leurs feuilles par l’hiver. Comme un amoureux transi, il a gravé un cœur brillant à sa surface, encore toute tremblotante d’émotions…

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