Photo-graphies et un peu plus…

Henri

Regarder cette image provoque en moi la même réaction qu’entendre ou lire le nom de Henri Poincaré. Pas Raymond, bien que, dans les faits, cela revienne au même. Question de culture et d’affinités personnelles. Et en réalité, Raymond ou Henri, peu importe. C’est Poincaré qui m’interpelle. A ce détail de taille près qu’Henri était mathématicien – et physicien, et philosophe et ingénieur également selon la devise dix-neuviémiste vaguement célèbre : qui peut le plus peut plus encore – et que Poincaré pour un mathématicien, c’est cocasse cocasse, cocasse au carré donc. Un peu comme un ophtalmologiste qui s’appellerait Le Borgne par exemple. Il se peut d’ailleurs que ce patronyme sibyllin soit en partie à l’origine de sa vocation. Personnellement, cela aurait titillé ma curiosité.

Toujours est-il que je ne peux pas m’empêcher d’essayer, en vain, de dessiner un point carré dès lors que j’entends ou lis ce nom. Or, c’est impossible. Testez pour voir : prenez votre plus belle plume, votre crayon HB ou votre stylet et dessinez-moi un point ? Alors ? Il est rond, n’est-ce pas ? Un point est naturellement rond, d’où le rond point, expression tautologique par excellence communément utilisée lorsque l’on est au volant : « Vous prenez le point, vous prenez le rond, vous prenez le rond-point ! ». Poincaré est-il un oxymore fusionnel pour autant ?

Et quid, alors, de ce « Sammelpunkt », « Point de rassemblement » pour nous ? Et pourquoi se retrouve-t-il dans un panneau carré ? Il n’y a absolument aucune logique dans ce choix. Et si ce panneau semble indiquer un endroit où se réunir, en l’état, point de rassemblement en effet. Nada, que dalle, nichts. Personne ! (Mot trouble brandi à la fois pour signaler la présence d’êtres humains – il y a 13 personnes à table – mais aussi leur absence – il n’y a personne à table. Bref, personne donc. Les nouvelles vont bien vite, s’exclamerait le chat de Geluck tandis que celui de Schrödinger chercherait encore à donner au point une double forme ronde et carrée simultanément…

Que faut-il comprendre alors ? Que les rassemblements sont interdits au pied de ce panneau ? « Point de rassemblement ici ! » Ou, au contraire, qu’ils y sont attendus. Se pose alors la question de la pertinence du recours au mot « point » quand on sait que c’est « le plus petit élément constitutif de l’espace géométrique, c’est-à-dire un lieu au sein duquel on ne peut distinguer aucun autre lieu que lui-même ». Il n’a donc aucune largeur ni épaisseur ni longueur ni dimension. Un point est un point, un point c’est tout, même si tout le reste – les ronds, les carrés, les sphères, les polyèdres réguliers, les pentadécagones, les érables, les pâquerettes, les briques, les huttes, les chèvres, les araignées, les clémentines, les biscuits et même les vieillards – n’est finalement qu’un ensemble de points agglomérés et collés les uns à côté des autres. Comment donc des personnes – celles de la présence -, même schématiquement incarnées, pourraient-elles se retrouver sur un unique point, fût-il de rassemblement ? Ce modeste panneau est bien plus énigmatique qu’il n’y paraît…

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Pavillon'aire

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Celle-là, j’ai réussi à l’attraper avec mon épuisette à papillons il y a quelques jours à peine. Ni trop courte, ni trop longue, exactement la taille nécessaire pour se prendre correctement dans le filet. Je l’avais vu passer il y a quelques années déjà, mais dans la précipitation, elle m’avait échappée… Le stress… Ce n’est effectivement pas tous les jours que des expressions paradoxales se présentent à nous. Ainsi en est-il des « 4 coins du globe » ou, parfois, « de la planète » qui, nous le savons depuis Aristote et même Platon, c’est-à-dire il y a très très longtemps (IVe siècle avant JC), est ronde. Patatoïde en fait, ou plutôt aplatie aux pôles, ce qu’ont montré plus récemment les images satellites. Certains l’ont imaginé plate ou ayant la forme d’un cylindre avec deux faces plates et une certaine épaisseur, d’autres qu’elle était accrochée à un pilier pour ne pas tomber… A quoi était lui-même fixé le pilier, l’histoire ne le dit pas…

Et quel est le point commun entre un disque et un cylindre, les deux formes pressenties pour notre planète ? Ils n’ont pas d’angles ! Or, en l’absence d’angles, nous pouvons conclure en celle de coins. Et en l’absurdité d’une expression comme « les 4 coins du globe », même si ledit globe comporte quelques petits coins de paradis… C’est toute la subtilité de la langue française. A la fois sur le coin et sur le paradis, dont il faudrait alors discuter de l’existence, ce qui nous mènerait probablement très loin. A des années lumières d’ici. Qui, contrairement à ce que l’on pourrait croire, n’est pas une durée mais une distance… Bref, tout comme la Terre n’a pas de sens, elle n’a pas de coins non plus. Mais cela se complique… Dans l’ancienne cosmologie chinoise, le ciel était rond et la Terre carrée. Ce qui change tout. Car, le carré est très précisément connu pour la perfection de ses angles, droits. Ainsi, à cette époque reculée, aller aux 4 coins du globe pouvait avoir un sens, indépendamment du fait que la Terre n’a pas de sens donc, et qu’un globe, que la Terre soit ronde ou carrée, reste un globe, comme l’œil. Imaginons-nous, par exemple, quelques instants, avec les yeux carrés ou cubiques. Il nous serait alors impossible de « rouler des yeux ». Ce serait dommage ! Revenons à la cosmologie chinoise… Le rond du ciel était circonscrit dans le carré terrestre de telle sorte que les quatre coins de la Terre n’étaient pas recouverts par le ciel et étaient perçus comme des « territoires incultes peuplés d’êtres non civilisés » (cette analyse semblerait provenir du sinologue Michel Granet). Contrairement à aujourd’hui, se rendre aux quatre coins du globe à cette époque n’était donc certainement pas très positif et glorieux puisqu’il s’agissait d’aller à la rencontre de sauvages. Ceci dit, l’autre est toujours un peu un sauvage pour soi… Même si c’est encore un abus de langage ! Quant à savoir si cette expression vient de l’empire du milieu, je n’en ai fichtre aucune idée !

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