Photo-graphies et un peu plus…

Si le cahier à spirales sur lequel Pascal (comparaison rapide des écritures) a rédigé son commentaire était posé sur une table intentionnellement placée juste avant la sortie d’un salon de la maquette ou de la pêche, j’en comprendrais à la fois la nature et l’intérêt, même si j’ai du mal à saisir en quoi l’obtention d’une mouche télécommandée (c’est quoi ?) pourrait aider à organiser un salon de la mouche (qui me laisse par ailleurs un peu dubitative). Seulement, pas de petits avions ni de cannes télescopiques dans les environs, puisque ce cahier recueillait les témoignages des visiteurs d’une classique galerie d’art. Photographies ou peintures, j’ai oublié. Le Pascal, conscient de la singularité de son message et imaginant, à juste titre, qu’il puisse être entendu au premier degré – on est dans une galerie d’art contemporain, je précise – a d’ailleurs cru bon de rajouter, picto attention à l’appui, qu’il ne s’agissait pas une blague.  Ou plutôt que « Ceci n’est pas une blague » quand d’autres parlaient de pipe. Honnêtement, j’ai du mal à voir ce que cela pourrait être d’autre. Mais passons…

Quand nous est offerte la possibilité de poser un cahier aux feuilles blanches pour que d’autres, quelle que soit l’occasion, s’y expriment, on a le secret espoir que les mots qui y figurent soient, d’une part, agréables, et d’autre part, en lien avec la raison pour laquelle ce cahier existe. S’ils sont agréables et qu’ils nous sont réellement adressés sans pour autant être connectés à la raison du pourquoi, cela va aussi. Extrapolons. Le cahier – le lieu où déposer un commentaire donc – peut aussi être virtuel. Par exemple, sous les duos qui s’accumulent sur ce site. Il y en a de temps en temps, de vrais, et c’est toujours un plaisir de les découvrir et de les valider (aucune censure). Pourtant, il y a quelque chose qui m’ennuie, et qui n’est que la contrepartie du fait de s’exprimer sur la Toile : le spam-commentaire.

Par exemple, il y a Christine qui m’écrit, à propos de Bon débarras : « Great article. Thank you to tell us more useful information. I am looking forward to reading more of your articles in the future. » (envoyé par une société de maquillage) et Rodney, pour le même article, « Just wanted to say you have a great site and thanks for posting!… » (envoyé par un site de finance). Ou Canon Cameras qui me lance pour Le Fossé : « Wow, marvelous blog layout! How long have you ever been running a blog for? you make running a blog look easy. The whole look of your website is great, well the content material! My site is on tuuuuuuuut (je vous épargne la pub). » (provenant d’un site comparateur d’appareils photos, il y a de l’idée). Ah oui, et il y a Steve aussi, qui m’interpelle sur Figure imposée pour me dire : « how’s life ? www.loucamino.com admin discovered your website via search engine but it was hard to find and I see you could have more visitors because there are not so many comments yet. I have found website which offer to dramatically increase traffic to your website biiiiiiiiiiiip they claim they managed to get close to 1000 visitors/day using their services you could also get lot more targeted traffic from search engines as you have now. I used their services and got significantly more visitors to my blog. Hope this helps 🙂 They offer seo elite seo report biiiiiiiiiiiip back link building Take care. steve » (le Steve, qui se donne la peine avec son Take Care et en signant, venant de la boîte miraculeuse qui fera passer mon nombre de visiteurs quotidiens à 1 000). J’ai aussi « Had to tweet this. I ride when I can – but will have to do this all next week. More people certainly should. » ou encore sur Bon débarras qui a décidément eu beaucoup de succès « Surely a perfect piece of writing! We’ve book marked it and sent it out to all of my friends since I know they’ll be intrigued, thank you very much! biiiiiiiiiiiip » (envoyé par un site sur les régimes).

Bref, il y en a d’autres, du même acabit, c’est-à-dire : toujours élogieux – une partie de moi voudrait y croire -, mais toujours en anglais aussi – alors que mes textes sont tous en français et qu’une personne comprenant la langue de Rousseau (il n’y a pas que Molière !) pourrait alors faire ses notes dans cette langue -, toujours un poil à côté de la plaque (ce qui nous ramène à la mouche télécommandée), et toujours envoyés par une entreprise qui me veut du bien, me vendre des vacances en famille, me faire maigrir, placer mon argent, me faire acheter des voitures miniatures… Facile de faire le tri avec les vrais commentaires : écrits en français et en rapport avec le contenu, par des personnes que je connais en général (cela doit aider à se laisser aller), qui ne me vendent absolument rien mais, au contraire, me donnent beaucoup…

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Le Capitaine se redresse et lance, à la volée, en pleine rue : « Mais c’est pas vrai ! » Il s’offusque. Colère instantanée, surprenante car rare. Devant un panneau publicitaire. « Fukushima quand même ! » Face à un slogan surtout. « Ce ne sont pas quelques gouttes qui vont nous arrêter. » Une côte bretonne, une grosse vague passant au dessus de la digue, une estafette bleu électrique venant apporter la lumière à une maison en retrait. Dernière publicité d’ERDF. Le Capitaine a raison. C’est indécent. C’est même pire.

Comment ont-ils pu oser une telle suite de mots quelques mois seulement après le séisme, suivi du tsunami meurtrier, dévastateur et de la catastrophe nucléaire, encore sur les braises, qui ont touché les côtes Pacifique du Japon ? Il faut relire la phrase maintenant, à la lumière de cette brève recontextualisation. « Ce ne sont pas quelques gouttes qui vont nous arrêter. » Faut-il voir plus loin qu’une affligeante erreur de jugement de communicants ne voyant pas plus loin que le bout de leurs cils, donc vraiment pas très loin ? Y a-t-il, derrière cette insolente affirmation, un sous-texte provocateur, un message politico-économique proche du : « Ce n’est pas parce que tout le monde nous tombe dessus en ce moment, que des pays reviennent sur leur parc nucléaire, que la population et les politiques se divisent plus que d’accoutumé sur les questions énergétiques que nous allons baisser les bras, que nous allons réviser notre stratégie. Nous passerons entre les gouttes. La tempête finira bien pas passer. Et nous serons là. Partout sur le territoire. » La juxtaposition avec Eva Joly, dans ce journal ramassé dans une rame de métro hoquetant, n’en est que plus ironique… Et d’une certaine manière, aussi à double sens, compte tenu de sa posture actuelle…

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… enfin, peut-être pas ce morceau quand même ! Certes, les plages du monde sont parsemées de déclarations d’amour polyglottes et éphémères, mais c’est bien la première fois que j’en croise une qui soit adressée à quelque chose d’inanimé, de la viande en l’occurrence… « J’aime la viande » : cette revendication creusée nerveusement en lettres capitales de plus d’un mètre sur cette dune québécoise n’est-elle pas un poil étrange ? J’ai vu son auteur filer tranquillement après avoir commis son forfait, une jeune fille gracile aux cheveux longs et à l’air fier. A qui adresse-t-elle ce cri de carnivore désespéré ? Probablement à son père, pêcheur, qui l’oblige à manger le poisson qu’il extrait chaque jour péniblement du Saint-Laurent depuis qu’elle a des dents et est en mesure de mâcher, et qui devrait passer devant cette tendre masse sablonneuse dans la prochaine demi-heure…

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… un propriétaire de voiture peut, aux Etats-Unis, personnaliser sa plaque d’immatriculation. 25 $ très précisément. Ce n’est pas beaucoup, surtout si on convertit en euro, ce qu’ils ne font pas puisqu’ils sont Américains. Alors, à côté de BOB 1 (oui, encore lui), BOB 2, BOB 3 qui laisse subtilement entendre que Bob a au moins trois voitures, des CAR4U, ou encore des BOBANDME, il y a les philosophes, les auto-suffisants (ah, ah !), les poids lourds de la pensée.

Ainsi en est-il du conducteur de la voiture à laquelle appartient cette modeste plaque : POWER. Puissance donc, et pourtant, il ne s’agit pas d’une voiture électrique. Cinq petites lettres capitales qui dessinent instantanément et de façon caricaturale le bonhomme. Une femme ne choisirait pas ça, si ? Le mot, pas l’homme. Une masse, mélange de muscle et de graisse – la bière, c’est terrible ! -, des mâchoires carrées et souvent serrées – pas besoin de plus avec les onomatopées -, une assurance sans faille qui lui permet de clamer des énormités sans jamais avoir peur du ridicule. Le genre de type qu’un bon steak et des patates ravissent. D’ailleurs, il est éleveur et amateur de rodéo. Enfin, quand j’écris amateur, j’entends pratiquant. Power, quand même ! Il sait comment les mater, les bêtes ! Enfin, moins maintenant, à cause de la bedaine… La bière. Alors, pour s’occuper et faire travailler son bras gauche, il va au Casino de l’Etat voisin. Régulièrement. Il y a un jeu de rodéo dans le coin, là-bas. Il lui rappelle l’arène. Même s’il esquisse un sourire quand les lumières de la machine se mettent à clignoter, il a gardé son air rustre et patibulaire. Ah oui, et il a des poils sur le torse ! Ceci dit, je préfère l’humour, même involontaire, d’un power en grosses lettres, que le sérieux angoissant de prêcheurs motorisés se baladant en Mustang…

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Et bien, ne faites pas cette tête ! Quoique, pendant 2 microsecondes, je me suis profondément interrogée sur le statut de ce vieux monsieur inanimé, ton sur ton, affalé dans un de ces fauteuils en cuir sombre qui parsèment les six étages du MoMa où défilent, dans un ballet incessant, touristes en quête des Demoiselles d’Avignon et locaux aspirant à un peu plus de retenue… Courte ou longue sieste ? Personne en panique autour de lui, il doit encore respirer. D’ailleurs, un livre, probablement trop lourd pour être porté à bout de bras, est posé sur ses genoux hiboux joujoux poux. Ceci dit, il y a pire que mourir sous le coup de la beauté d’une œuvre en compulsant un livre d’art !

Question de point de vue évidemment et d’interprétation, l’idéal étant quand même de finir le livre, de le refermer, et de se relever, même difficilement, pour s’extraire de cet antre où de vraies natures mortes sont placardées sur les murs blancs. Vous savez, les fruits directement sur la table ou savamment agencés dans des coupes, les lapins morts, les bouquets de fleurs colorées, les pichets de vin, parfois un crâne ou deux pour mieux justifier le style… Mais, lorsque l’on se penche sur le cartel pour découvrir l’auteur de la pièce en question, à côté du nom, ce n’est pas « nature morte » qui est inscrit mais « still-life ». Une traduction, pourtant tri-centenaire, qui transpire ce point de vue culturel sur le trépas et, qui, à la mort, mot tabou, trop sec, trop brutal, trop vrai outre atlantique, préfère l’espoir de la vie, encore là même si silencieuse, immobile… Comme ce vieux monsieur, là, avachi mais toujours en vie… Enfin, il faudrait peut-être aller vérifier quand même.

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