Photo-graphies et un peu plus…

Contre-nature

Dans un groupe, il faut toujours qu’il y en ait un qui se distingue, qui ne fasse rien comme les autres et a fortiori, qui se fasse remarquer. De près ou de loin. Tout avait pourtant bien commencé pour P4 – comprenez, le Palmier n°4, que l’on commence à compter par la gauche ou par la droite -. Une belle ascension verticale, parfaitement droite, digne des plus hardis et dans la lignée de ses camarades de place. Et puis, tout d’un coup, alors que, a priori, rien ne l’y prédestinait, la rébellion : P4 se courbe, P4 s’incline, P4 s’enroule, P4 se réforme, P4 vire de bord, se tord étrangement et joliment, P4 court-circuite le chemin que la tradition avait tracé pour lui pour en définir un nouveau, singulier, inimitable, où il est le seul maître à bord. Car il est libre P4. Y en a même qui disent qu’ils l’ont vu danser…

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Inside

Lui n’a assurément pas peur de ce qui se profile de l’autre côté. De la vague. Même si l’idée est justement de ne pas l’atteindre. L’autre côté. Car cela signifierait qu’il l’aurait ratée. La vague. Lui, il préférerait la prendre. La vague. Debout, même. L’effleurer. A peine. La sentir se dérouler sous ses pieds. Et cheminer avec elle le plus loin possible. Debout, toujours. Jusqu’au bout. Jusqu’au point de départ. La plage. Alors, pour mettre toutes les chances de son côté tout en sachant dans sa chair que ce n’est pas à lui d’en décider mais à l’océan, il observe calmement les vagues déferlantes, la houle lointaine et les surfeurs depuis la plage. Après quelques minutes faussement silencieuses, il se penche vers sa planche posée sur le sable encore tiède de la belle journée déclinante, accroche son leash à sa cheville droite, et entre dans l’eau, refroidie par le départ du soleil, qui tend ses muscles comme un réflexe. Il progresse lentement, non que le fond soit jonché d’obstacles. Il continue simplement de se mettre en condition. Et maintenant, de repérer les espaces. Ceux dans lesquels il va pouvoir se glisser. De repérer le moment. Celui où il va pouvoir s’élancer enfin pour aller la chercher. La vague.

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Résilience

Traverser une caldeira à pied se transforme rapidement en une fascinante leçon de vie et d’espoir. Car, là où la terre a tremblé, là où la lave a coulé et tout ravagé sur son passage, la vie trouve toujours une faille pour se développer, se multiplier et reprendre sa place… Quitte à ce qu’elle soit différente.

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La poule ou l'oeuf ?

Il faut imaginer, un peu comme lorsque vous renversez une boîte de puzzle devant vous – que, personnellement, je prononce [pœzœl] et non [pœzl] contrairement à certains -, que ceci n’est qu’une pièce, qu’une infime partie d’un gigantesque banyan, composé d’un vaste réseau de racines aériennes toutes connectées les unes aux autres desquelles filent d’interminables branches horizontales. Si longues et si lourdes à vrai dire qu’elles ont besoin d’être soutenues, comme le font des béquilles auprès des accidentés, afin de ne pas s’effondrer et plier sous leur propre poids. A ceci près qu’il ne pousse pas un 3e bras ou un 3e tibia à ces malheureux, alors qu’ici, tout vient de l’intérieur !

Comment ne pas penser que le banyan réfléchit et définit une stratégie de survie ? Ainsi, comment décide-t-il, alors que la branche s’échappant du tronc central est encore courte, d’en faire émerger un nouveau tronc-racine sur lequel elle pourra à la fois se reposer et s’appuyer pour se propulser plus loin encore et explorer l’inconnu en toute sérénité ? Connaît-il, à l’avance, la taille finale de la branche ? Fait-il de savants calculs mathématiques pour déterminer où sera situé le barycentre de cette portion de son corps et, par conséquent, à quel endroit précis il doit stimuler la pousse de l’assistance à branche en danger potentiel ? Et comment choisit-il la branche qui bénéficiera de cette aide parmi toutes celles qui émanent de lui ? Ces troncs-bis – et la métaphore qu’ils nous invitent à faire avec une poignée de valeurs humaines telles la solidarité, l’entraide, la compréhension, l’empathie, le respect… – sont fascinants, et par extension la nature elle-même, éternelle inspiratrice et guide…

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Le refuge

En foulant le sol de Puuhonua o Honaunau, en tournoyant entre ses hauts palmiers tout droit sortis d’une carte postale envoyée du paradis commun, en glissant les pieds dans le sable blanc et fin de sa plage, difficile d’imaginer que se jouaient là, au 17e siècle, des drames à répétition. Là, donc, un ancien refuge pour délinquants de l’époque ayant, volontairement ou pas, transgressé les lois sacrées locales ou « kapu ». Les tabous des anciennes lois hawaïennes.

Qu’un homme du peuple regarde ou touche un noble était par exemple interdit, a fortiori qu’il marche dans ses pas voire laisse malencontreusement traîner son ombre sur un sol sacré ; qu’un homme et une femme mangent ensemble n’était pas plus autorisé : et pas de chichi en ce temps-là, enfreindre ces tabous était passible de mort. Elle seule était en effet en mesure d’éviter la redoutable ire des dieux, se traduisant potentiellement par des éruptions volcaniques, des tsunamis, des tempêtes ou des séismes, le tout étant géologiquement fort probable dans cette zone tectoniquement active de cet océan Pacifique au nom bien trompeur (quand bien même Alfred Wegener n’allait naître que deux siècles plus tard)…

Le seul moyen de réchapper à la vindicte populaire – sans avoir tué de lion pour autant – était d’atteindre un de ces refuges sacrés, à temps, c’est-à-dire avant les chasseurs survoltés (alors même que l’électricité n’existait pas encore). A l’issue d’une période de durée variable de pénitence, le pécheur recevait, par l’entremise d’un kahuna (ou prêtre), le pardon des dieux qui renonçaient alors, merci à eux, à leur déchaînement destructeur et (sur)naturel digne des pires scénari de notre dérèglement climatique contemporain. Il pouvait alors rentrer chez lui, totalement blanchi, et reprendre une vie sociale normale, comme si de rien était…

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En toute discrétion

Il est certaines personnes qui semblent poser naturellement tant leur façon d’être au monde et aux éléments paraît, paradoxalement, maîtrisée et préméditée. Ainsi en est-il de cet homme perché sur sa roche volcanique, que je ne connais absolument pas et dont je ne peux m’approcher sans me faire remarquer qu’à la faveur du vacarme ambiant qui perfore le silence de ses incessants éclats tonitruants et couvre toute autre manifestation sonore. En l’occurrence les bruits éventuels de mes déplacements et celui, avéré, du déclenchement de ma boîte à images. Je n’espère qu’une chose : capter cette osmose, cet échange non verbal, méditatif, contemplatif entre cet être aux cheveux de jais et cet océan habité, et ainsi saisir cette étrange juxtaposition entre la paix qui émane de lui et l’excitation marine. Curieusement, le regarder regarder ces vagues venant s’échouer avec fracas sur ces sculptures de magma saisi par le froid est incroyablement reposant.

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C'est la jungle !

Finalement, nous avons tous quelque chose en nous de…, non, pas de Tennessee !, de Johnny… Weissmuller, aka Tarzan, lorsque nous lançons une recherche sur Internet. Et que, sans pour autant pousser le moindre cri (le sien – un yodel autrichien inversé passé en accéléré pour les uns, un montage incroyable de voix humaine, d’aboiement de chien, de rugissement de hyène, de blatèrement de chameau et de son de violon pour les autres – a marqué des générations entières de tympans et je suis quasi sûre que vous l’avez déjà mentalement reproduit depuis que vous avez commencé à lire ce texte), donc de lien en lien, comme lui de liane en liane, nous nous éloignons petit à petit, non seulement de notre point de départ, mais parfois même, souvent pour être tout à fait honnête, de notre quête initiale jusqu’à ne plus savoir réellement où nous sommes ni comment ni pourquoi nous sommes arrivés là, passant, en quelques clics, d’une simple vérification sur ce cri primal du premier autrichien célébré à Hollywood au top 10 des labyrinthes en France (cri > oreille > pathologie > labyrinthite > labyrinthe…). Fort heureusement, comme l’a dit en son temps Christophe Colomb, qui s’y connaissait fort bien en détours : « On ne va jamais aussi loin que lorsque l’on ne sait pas où l’on va ». Voilà qui devrait réjouir les vagabonds numériques que nous sommes devenus. Mais, pour boucler la boucle for et rassurer les moins aventureux d’entre vous, je serais tentée de combiner cette pensée d’explorateur à un proverbe sénégalais : « Quand tu ne sais pas où tu vas, retourne toi et regarde d’où tu viens »… Dans la jungle dense, ce peut être confus, même pour Tarzan. En revanche, en langage informatique, c’est déjà plus facile : reculer d’une, de deux, de trois, de six pages, ou consulter directement l’historique pour revenir au point de départ !

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Rapports de force 1

Pour me retrouver fortuitement face à cette inattendue peinture murale qui m’a instantanément envoyée à 11 817 km de là 3 ans 4 mois et exactement 4 jours auparavant, il a fallu que je me laisse guider par plusieurs indices, non perçus comme tels sur le moment. Le premier ? Une irrésistible, autant qu’incompréhensible, envie de voir le minuscule Manneken-Pis avant de quitter Bruxelles. Le deuxième ? Fuir ledit lieu le plus vite possible en remontant la rue du Chêne, car totalement déserte. Le troisième ? Quelques dizaines de mètres plus tard, tomber œil à œil avec son pendant vêtu, géant et voyou peint sur un mur donnant sur une ruelle a priori sans intérêt.

Rapports de force 2

Le quatrième ? S’approcher pour prendre une autre photo sur laquelle ne figure pas le matériel rouge de Kontrimo. Et découvrir que la ruelle n’est pas si banale car elle ne donne sur rien. Plus précisément, il s’agit d’une impasse. Et au bout de cette impasse se cache une forêt. Celle ci-dessus. Une forêt bidimensionnelle. Une forêt de fiction en somme. En moi, une joie – cette sensation d’avoir découvert un trésor sans avoir eu à creuser, littéralement – teintée de tristesse – voilà où les hommes de la ville en sont rendus : peindre des arbres sur les murs pour faire venir la nature à eux. Et c’est à cet instant précis que m’est apparue le souvenir de cette vieille maison hawaïenne, méthodiquement mangée par les racines d’arbres immenses dont la croissance n’est entravée par personne… Quel magnifique contre-pied à ce mur bruxellois, que je suis toutefois heureuse d’avoir rencontré pour le lien indéfectible qu’il a permis de créer avec son écho hawaïen, illustrant ainsi des rapports de force diamétralement opposés entre le bâti et la nature.

Rapports de force

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Terrain de jeu volcanique

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Parenthèse estivale

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