Photo-graphies et un peu plus…

Un phénomène étrange se produit régulièrement lorsque je suis à l’étranger. C’est quasiment un sans faute d’ailleurs, ce qui n’est pas sans soulever certaines questions. Peut-être cela vous arrive-t-il aussi ? De reconnaître des Français alors que vous ne pouvez pas les entendre. De les reconnaître à distance. Comme ça, instinctivement. Une intuition. Même de dos, comme la paire ci-dessus. Vous les voyez et vous vous dites : « ceux-là sont Français, c’est certain ! ». Aucun indice : la grappe que vous observez ne cherche pas à s’insérer, comme si de rien était, dans une file d’attente d’un pays où elles sont scrupuleusement respectées et où l’on vous regarde de fait comme un extraterrestre si vous osez bafouer les règles locales en vigueur ; elle n’est pas non plus en train de critiquer tout ce qu’elle voit, tout ce qu’elle touche, tout ce qu’elle entend, tout ce qu’elle mange… Quand on croise ces spécimens-là, malheureusement non rares, deux voies s’ouvrent à soi : s’enfermer dans un mutisme temporaire, le temps de dépasser l’orage ; ou, au contraire, adopter un comportement diamétralement opposé en se montrant encore plus prévenant et poli que de nature pour compenser leur déficit en bonnes manières auprès de nos hôtes communs. Non, là, la grappe est neutre. Et pourtant, elle dégage un je-ne-sais-quoi incontestable de Français. Est-ce les traits du visage, les pieds, la posture, le style vestimentaire, la coupe de cheveu, la façon d’être, seul, en duo, en groupe ? Qu’a ce couple, par exemple, hormis une certaine concordance de phase dans le mouvement – même jambe d’appui, même regard légèrement tourné vers la gauche hors champ (une fontaine sculptée plutôt jolie) – totalement indépendante, a priori, de leur identité nationale, pour que je n’ai aucun doute sur leur origine ? Émettons-nous des sortes de phéromones asexuées nous permettant de détecter les êtres de notre propre patrie en territoire inconnu ? Cela reste un mystère…

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Si, si, le voyageur peut avoir la pression ! En particulier, lorsqu’il sait qu’a priori – après, dans l’absolu tout est possible – il n’ira qu’une seule fois dans sa vie – concept totalement différent du CAFAMUFODAVI – à l’endroit qu’il s’apprête à découvrir. Une fois, c’est déjà une grande chance parfois, mais cela reste peu malgré tout. Cette hypothèse est souvent liée à la distance qui sépare ladite destination de son lieu de résidence. Car, qui dit loin, dit généralement coûteux. Au moins pour le transport.

Certes, le voyageur peut aussi être riche, auquel cas, la pression ressentie sera toute autre, peut-être au moment de choisir entre un massage californien et un massage suédois… Insupportable dilemme à la solution évidente : les deux bien sûr ! Non, je parle du voyageur lambda, celui qui a travaillé toute l’année, qui a éventuellement économisé sur ses sorties, ses cigarettes, ses tenues pour s’offrir une aventure au bout du monde (le bout du monde étant une notion toute relative).

Ce voyageur-là, au moment même où il pose les pieds sur le tarmac, le quai, le trottoir, au moment où il respire l’air de ce nouveau pays pour la première fois, il sait que le temps est désormais compté. Conscient de l’unicité du moment, une partie de lui cherchera donc à voir un maximum de choses dans le temps imparti, de quelques jours à quelques semaines au mieux pour un séjour classique. Une gageure évidemment, le « vite fait bien fait » ayant ses limites, notamment en voyage. Mais la pression – celle de ne rien manquer – est trop forte… Et à l’issue de son tour bien organisé, il en aura probablement plus vu que les locaux eux-mêmes pensant avoir le temps de visiter leur propre pays ou ville puisqu’ils y vivent. Cela ne l’empêchera pas de ressentir une légère frustration en remontant dans l’avion, le train, la voiture car, forcément, il n’aura pas « tout » vu ou n’aura pas pu faire « tout » ce qu’il aurait voulu faire… Il arrive aussi parfois que la raison l’emporte sur ce désir d’exhaustivité et de consommation d’ailleurs : le voyageur décide volontairement de réduire ses ambitions, indépendamment d’événements naturels tels qu’une coulée de lave susceptible de lui bloquer  irrévocablement la route, acceptant ainsi d’en voir moins mais de le faire mieux. Sans doute est-ce dans de tels moments qu’il gagne en maturité et en sagesse…

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