Photo-graphies et un peu plus…

« L’impossible photographie » disait l’affiche. Le défi attire l’œil… Et donne envie d’aller voir, même si, juste après, il est écrit « prisons parisiennes (1851-2010) ». Pour quelqu’un qui a soif de liberté, s’y rendre relève presque du paradoxe.

Avant de m’engouffrer dans les salles sombres du Musée Carnavalet consacrées à cette exposition inédite, documentaire  et très instructive sur le milieu carcéral dans la capitale, je me retourne, les yeux rivés vers le long couloir droit qui s’enchaîne dans mon dos. Et suis témoin du jeu de cache-cache entre l’ombre et la lumière, projetant, de temps à autre, les barreaux des fenêtres sur les petits carreaux du sol. Etrange écho… Une silhouette tronquée les piétine nonchalamment, montrant indirectement le chemin vers l’issue de secours !

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Absolument pas ! Authentique relique britannique en plein cœur de la Méditerranée, sur une île anciennement annexée par l’Empire qui y a laissé quelques habitudes… Ses très symboliques cabines rouges donc, ses petits déjeuners bacon-œuf-haricots rouges, mais aussi sa conduite à gauche, sans le flegme qui lui est, sous d’autres latitudes, attaché.

Le duo subtilement éclairé formé par cette cabine, posée au beau milieu de la placette devant le tronc d’un arbre aux branches protectrices, et ce banc vert en fer forgé fraîchement repeint, accueillant, semble tout droit sorti d’un musée à ciel ouvert… On tourne autour sans vraiment pouvoir l’approcher. Une certaine solitude s’en dégage. Nostalgie peut-être. La cabine, qui permet de garder un lien avec des personnes éloignées ; le banc, qui, à l’inverse, unit les êtres déjà proches. Aujourd’hui, on les dirait abandonnés. Leurs couleurs vives les inscrivent encore dans le présent, mais la distance qui nous sépare d’eux transforme le tableau en photographie tirée d’une époque ancienne…

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… et savoureux. Mais un combat contre quoi ? contre qui ? Contre l’enchaînement des événements ? Contre le déchaînement des éléments ? Contre le temps, finalement, encore et toujours… On a beau voir les vagues venir, s’avancer inlassablement vers la côte avec la houle comme un escadron de fantassins bien remontés, on ne sait jamais quel spectacle elles vont offrir en se heurtant à la digue. Il y a, en théorie, tout un protocole à respecter lorsque l’on s’attaque aux eaux internationales se mouvant avec des idées pacifistes clamées haut et fort… Le regard choisit une vague, décide qu’elle a un fort potentiel explosif et la suit seconde après seconde avec une excitation certaine. Car, soyons clair, par jour de grande marée, ce que le regard attend, ce que le corps attend, c’est la puissance, la force de l’eau contre la terre, la bataille de la Nature contre les murs que l’homme a érigés pour s’en protéger. Quand il devient certain que la vague élue fera bien ce que l’on attend d’elle, commence alors la négociation, celle de la distance à garder entre toutes choses pour que chacune soit respectée… La marge de manœuvre est ténue, regard et corps s’approchent de la frontière, l’apprivoisent pas à pas, car ce qu’ils veulent sentir, voir, saisir au plus près, c’est le contact, la confrontation, la dispersion, ce moment où l’eau est arrêtée net dans sa course par la pierre solidaire et se mue instantanément en main de fer pour aller s’échouer dans un sublime fracas sur le sol…

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Certains reviennent de leurs voyages avec des photos de vacances… De mon côté, je réalise que, de plus en plus, je m’extrais de mon sommeil assaillie de photos de rêve. Pendant les quelques minutes suivant mon réveil – ensuite tout s’évanouit – je me souviens m’être baladée dans des contrées imaginées, amalgame de paysages connus et irréels, allant à la rencontre de parfaits inconnus ou d’avatars d’anciennes connaissances. Toujours avec l’appareil en bandoulière, déclenchant là où je le ferais s’il s’agissait d’un véritable voyage… Il arrive que ce tourisme de mon inconscient me fasse remonter le temps… Et jusqu’à aujourd’hui, c’est toujours vers le passé que je me suis tournée… Un passé que je n’ai pas vécu pour autant… Mais là n’est pas le plus curieux ! Il y a quelques jours, en transférant mes photos du jour sur mon disque dur, l’opération a subitement été stoppée. Certaines images bloquaient… J’ai finalement réussi à les extraire de l’appareil… Comment dire…  J’avais  comme une sensation de déjà-vu, mais aussi la certitude de n’être jamais allée là « en vrai »… Impossible ! Tout dans l’image relevait du passé, les couleurs, les vêtements, les coupes de cheveux, les enseignes… Puis j’ai compris : mes photos de rêve devenaient réalité…

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Etapes de vols imperceptibles à l’œil nu saisies par l’extension de mon regard. La photo, qui enregistre parfois le mouvement, peut aussi le capturer, le stopper net, comme si elle avait le pouvoir d’arrêter le cours du temps pour nous montrer ce que nous ne sommes pas en mesure de capter en temps réel. Comme si un simple clic-clac nous ouvrait les portes d’un autre niveau de réalité. Tout semble alors immuable. Cela donne à cette image une impression insensée, quasi contre nature.

Des oiseaux, des pigeons pour être juste, chacun figés à une phase différente de leur vol, formant un ensemble erratique dans le ciel, convergeant malgré tout vers un unique et même but : attraper ces quelques miettes de pain jetées à la volée par un généreux maltais. On pourrait croire qu’ils ont été posés là, juste pour l’image. Mais posés sur quoi ? On s’attendrait presque à les voir tomber, comme s’ils se réveillaient subitement d’un doux rêve dans lequel ils se seraient échappés des vitrines de la maison Deyrolle. Tout est en fait parfaitement maîtrisé, tout est en fait parfaitement normal… Et le vol, n’est-il pas ce chemin parcouru pour atteindre un objectif fixé, enchaînement de pas dont on n’a pas toujours conscience et rendus invisibles par notre impatience, mais qui existent bel et bien ?

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Aujourd’hui, je ne pourrais plus faire cette photo… Ce n’est pas une question de condition météo, de disponibilité ou d’envie, mais une simple question de faisabilité. Un mur de béton anti-bruit (et donc anti-photo) a été déposé entre la rue et le chantier de ce parking souterrain dont j’ai déjà dévoilé les mystères il y a quelques jours, de telle sorte que les machines sont désormais tronquées aux deux-tiers. Aucun intérêt. La succession de dalles sera bientôt recouverte d’une « fresque urbaine », histoire de transformer le gris brut en couleurs vives. C’est sûrement préférable pour les voisins dont les murs doivent, malgré tout, jouer la samba, comme certains rétroviseurs de Vespa… Bref, il ne s’est écoulé qu’une poignée de jours entre le moment où je me suis décidée à photographier ce chantier – après être passée un certain nombre de fois devant en me disant, « la prochaine fois, je m’arrête » -, et celui où il est devenu invisible pour le curieux rivé au trottoir… Cela aurait été fâcheux, à mes yeux, que je me réveille trop tard, que je me heurte à un mur et passe à côté de cette image que j’ai eu plaisir à retravailler ensuite pour lui faire dire ce qu’elle n’avouait pas spontanément. Ce n’est qu’une photo, pourtant. Mais toute photo n’est-elle pas une opportunité que l’on saisit ou pas ?

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Il n’est pas évident, de nos jours, de prendre les inconnus en photo tout en ayant l’intention de rendre leur image publique… Le droit à l’image, dont nous sommes tous heureux de pouvoir bénéficier individuellement, a sensiblement changé la donne de la photo « humaniste » ou de l’instant. L’image animée n’est, bien sûr, pas en reste. Rapidement, des parades ont été trouvées pour pouvoir utiliser ces images, malgré ce droit de chacun à disposer de la représentation de lui-même : des zones de flou ou pixelisées sont apparues sur des visages reconnaissables, puis ont été rajoutées sur les logos ou toute évocation de marque pour limiter toute suggestion publicitaire inconsciente aux « regardants »…

La stricte application de la loi a conduit à des images entièrement floutées, donc totalement absurdes car dépouillées de leur signification. A quoi sert l’image si elle ne montre plus rien ? A contrario, pouvoir lire sur certains réseaux sociaux que untel a été identifié sur telle photo, dont il ne connaît peut-être pas l’existence, est tout aussi angoissant. « Identifié », un mot qui relève clairement du vocabulaire policier, comme si un méfait avait été commis, comme si la traque était lancée… Mais la traque de quoi ? De la vie des autres ? Finalement, le droit à l’image a peut-être du bon… Et ce n’est pas ma baigneuse volontairement étêtée pour éviter tout litige qui s’en plaindra !

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