Photo-graphies et un peu plus…

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Quel que soit l’endroit dans le monde – ici, Tokyo où tout semble parfois optimisé, parfois jusqu’à l’absurde -, il semblerait que ce soit toujours la même chose : pour une personne qui travaille réellement, il y en a 5, 6, 7 autres qui font les inspecteurs des travaux en cours et l’observent faire, tout en maintenant bien les bras croisés dans le dos. Il ne faudrait pas donner l’impression que leurs mains puissent être utiles…

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PEROU - VOYAGE - ETATS D'AME SUR LE MACADAM # LIMA EN COULEURS

Il y a quelques semaines, je partageais la recette de l’organisation que l’on m’avait généreusement transmise dans La règle des 4. Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts, de l’air est passé par Vierzon, de la terre a été déplacée par camions, du feu s’est propagé avec passion. Et voilà que six nouvelles lois ont fait leur apparition, se sont immiscées dans l’équation, ruinant presque nos belles intentions… Mais, comme nous le disions au 17e siècle, un bon averti en vaut deux !

Alors, fringantes mesdames et pimpants messieurs, sachez, avant de vous lancer une nouvelle mission , que :

– il est mieux de « prioriser les tâches les plus difficiles en début de journée pour optimiser son énergie » (c’est la Loi de Laborit). Corollaire immédiat : cela met tout de suite les oiseaux de nuit sur la touche à moins de pouvoir redéfinir la notion de « début de journée »…

– « une tâche effectuée en continu prend moins de temps qu’une tâche réalisée en plusieurs fois » (c’est la Loi de Carlson). Corollaire immédiat : éviter de réagir instantanément à toutes les notifications, limiter la procrastination, fermer sa porte, ne pas lancer de lessive…

– « toute tâche prend plus de temps qu’on ne l’avait prévu » (c’est la loi de Murphy, qui, pour moi, était plutôt celle dite, grossièrement, de « l’emmerdement maximum », c’est-à-dire que si quelque chose commence à mal tourner, alors cela va continuer dans ce sens). Celle-ci se présente à la fois comme une conséquence logique de la Loi de Carlson non respectée mais aussi comme une preuve manifeste de notre optimisme ou, selon que vous voyez le verre à moitié vide ou moitié plein, de notre incapacité à définir correctement les différentes étapes composant la tâche en question…

– « plus on a de temps pour réaliser une tâche, plus cette tâche prend du temps » (c’est la loi de Parkinson, que je vais essayer de ne pas oublier). Là aussi, cela semble assez logique puisque si nous avons le temps, nous nous autorisons à nouveau à ne pas respecter cette incontournable Loi de Carlson… Sachant par ailleurs que, selon la loi de Murphy, toute tâche prend plus de temps qu’on ne l’avait prévu, avoir du temps pour réaliser une tâche n’est vraiment pas un cadeau que l’on nous fait…

– « passé un certain temps sur une tâche, notre efficacité diminue et devient même négative » (c’est la loi d’Illitch). Ce qui fait passer encore plus de temps sur ladite tâche car il faut malgré tout aller au bout, alors même déjà que toute tâche prend plus de temps qu’on ne l’avait prévu… On ne tournerait pas un peu en rond là ?

et enfin, la dernière :

– « 80% des résultats sont produits par 20% du travail effectué » (et c’est la loi de Pareto) : compte tenu de tout le temps imprévu finalement perdu lorsque l’on s’attèle à une tâche, cela n’est pas vraiment étonnant… Malheureusement, il y a de fortes chances que ces 20% soient complètement dilués dans tout le reste et, de fait, pas du tout consécutifs, ce qui aurait permis de s’arrêter là et de gagner en efficacité mais bon, l’histoire de l’humanité en a décidé autrement. Cette dernière règle me fait d’ailleurs penser au « Vase de Confucius » dont j’ai entendu parler pour la première et unique fois au Vietnam il y a 3 ans. Le principe : un trou dans le récipient fait qu’il se vide dès qu’on essaye de le remplir à plus de 80% car nous n’avons pas réellement besoin de ces 20 derniers % pour être comblés et heureux… Voilà qui est sain !

Moralité, il faut vraiment être motivé voire un brin inconscient pour s’atteler à une tâche sachant tout cela. Deux options s’offrent à nous : vivre dans l’ignorance ou aller tout de suite à la plage !

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Je ne sais pas comment vous fonctionnez, vous (oui, nous sommes tous un peu des machines, ne nous leurrons pas !), mais, personnellement, je suis une adepte des listes. Et je ne parle pas spécifiquement des listes de courses. Mais plutôt des listes de choses à faire… Les listes, donc, j’en fait matin, midi et soir. Ce qui peut donner l’impression que j’ai beaucoup de choses à faire. En tout cas, c’est ce dont je veux me convaincre noir sur blanc. Je fais des listes à court terme – le programme de la journée -, des listes à moyen terme – ce qui serait bien d’achever d’ici la fin de la semaine ou du mois – et des listes à long terme – réussir ma vie, mais chacun sait que ça ne veut pas dire grand chose. Evidemment, ce que l’on met dans la liste à moyen terme a une incidence directe sur la liste à court terme, puisque ce qui est à faire pour la fin de semaine ou de mois ne se fera pas tout seul, c’est-à-dire sans intégrer, même de façon partielle, une voire plusieurs liste(s) à court terme. A fortiori, la somme des listes à court et moyen termes est sensée vous permettre de répondre aux objectifs de votre liste à long terme. Nous voyons donc assez rapidement comment cette segmentation du temps – le vôtre, le nôtre, le mien – et des activités qui le décomposent peut devenir un véritable casse-tête lorsque le matin, devant votre feuille blanche, vous commencez à lister les affaires du jour…

La première règle à observer pour établir ce programme est de jeter un œil à celui de la veille. Il y a en effet malheureusement souvent un reliquat, une petite, ou grande d’ailleurs, chose que l’on n’a pas eu/pris le temps de faire et qu’il faut malgré tout achever dans un délai raisonnable (ie pour être en mesure de respecter la liste à moyen terme…). Voilà, consciencieux, vous reportez donc cet inachevé en tête de votre liste, que vous complétez par le reste, ce que vous planifiez d’abattre en ce jour précisément. C’est le matin, il est tôt, vous êtes relativement optimiste sur votre capacité de travail et de concentration, les lignes de votre petit carnet se remplissent vite, et avec elles, votre journée défile sous vos yeux.

Je fais une parenthèse : de façon très pratique, j’alterne entre des listes classiques – une ligne, une action – et des topogrammes – ma petite révolution interne -, qui permet de relier certaines actions entre elles en les scindant en différentes étapes. Psychologiquement, c’est mieux. Exemple : vous avez un article à écrire sur Hawaii (c’est mon cas pour le prochain Umag). Sur la liste linéaire, j’écrirai : article Hawaii. Tout de suite, comme ça, c’est un peu bloquant. Dans le topogramme en revanche, je décomposerai : sélection des photos, envoi au maquettiste, recherche des informations, rédaction. C’est exactement la même quantité de travail mais le fait de l’avoir découpée en petites étapes le rend beaucoup plus accessible. Et puis, cela donne l’occasion de barrer une phase intermédiaire sans attendre d’avoir complètement fini. Or raturer (d’un trait sec et sûr le matin, ou, en fin de journée, de plusieurs appuyés et nerveux) un, idéalement, des élément(s) de sa liste est absolument primordial pour que cet exercice même de dressage de liste conserve un sens à vos yeux ! Fin de la parenthèse.

J’évoquais l’optimisme matinal chaque jour renouvelé malgré ces fameux reliquats qui devraient pourtant nous mettre la puce à l’oreille. Le matin, d’une certaine manière, vous êtes un idéa-liste. Vous croyez que tout est possible, que, même si les journées ne feront jamais plus de 24h, vous aurez le temps de faire tout ce que vous aviez prévu aujourd’hui plus ce qui vous reste de la veille donc, et sûrement de l’avant-veille et de la semaine passée aussi. Ce n’est pas que vous n’y mettiez pas du vôtre – peut-être un peu – ou que vous ne sachiez pas vraiment vous organiser – peut-être un peu – mais le problème avec les listes, c’est qu’elles sont systématiquement perturbées par les imprévus, les impondérables, ce qui vous tombe dessus sans prévenir et que vous ne pouvez vous permettre de reporter pour une raison x ou y. C’est dans ces moments-là, alors que cela fait 4 heures que vous n’avez rien barré sur votre joli topogramme fait avec amour à 8h12 le matin même, que vous vous sentez totalement sous l’eau, submergé et que vous comprenez qu’à nouveau, tout cela était bien irréa-liste !

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Je ne sais pas si cela se passe comme ça aussi dans votre vie, professionnelle ou privée, mais peut-être plus professionnelle malgré tout, et, en réalité, il n’y a aucune raison pour que je sois privilégiée en la matière, mais j’ai la désagréable impression que la rapidité avec laquelle nous accédons aujourd’hui à n’importe quelle information ou n’importe quel contenu a une très mauvaise influence sur la perception que certains – appelons les, des donneurs d’ordres – peuvent avoir du travail et en particulier, du temps raisonnablement nécessaire pour réaliser un travail de qualité. Sous ce prétexte relativement récent qu’il suffit de quelques clics pour absorber tout le savoir du monde, d’aucuns croient que le monde est devenu un instantané géant, comme les soupes chinoises ou le café lyophilisé. Qu’en gros, il suffit d’un peu d’eau chaude pour que tout prenne forme, soit digeste, absorbable voire bon.

C’est un raisonnement très pernicieux qui nous place dans une position totalement absurde consistant à enfoncer des portes ouvertes comme, par exemple, rappeler que la Terre ne s’est pas faite en 7 jours, que les azulejos ne sont pas apparus comme ça, du jour au lendemain, sur les murs de l’Alcazar de Séville ou que, même pour le café soluble, il a fallu que la météo soit favorable à la croissance des caféiers, qu’ils donnent de belles graines, qu’elles soient récoltées, séchées, torréfiées, conditionnées, dispatchées, vendues, absorbées… En gros, l’eau chaude versée sur les petits grains marrons formant une montagne odorante au fond de notre gobelet biodégradable n’est que l’ultime étape d’une chaîne initiée des mois auparavant et que nous avons complètement gommée de notre conscience.

Avec le travail bien fait – qui est un noble objectif -, c’est un peu pareil : certains ont déjà oublié, bousculés par cette illusion d’immédiateté promise par la modernité et l’impatience qu’elle fait naître en chacun de nous, qu’il requérait réflexion – donc du temps -, prise de recul – donc du temps -, discussions croisées – donc du temps à nouveau, et d’autres choses encore du même acabit… Et contribuent ainsi, dans le même temps, à nier ce qu’est le travail lui-même, tout en s’étonnant que le résultat ne soit pas à la hauteur de leurs espérances. Preuve qu’ils n’ont même pas intégré leur propre mutation d’homme pressé. Ce qui est peut-être encore plus problématique car ce n’est pas leur propre fonctionnement qu’ils mettent en cause mais bien celui de ceux qu’ils sollicitent.

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Le téléphone sonne. Il est à peine 12h01. Grandement l’heure d’aller se remplir la panse pour mieux penser. On se retrouve en bas ? Il est 14h33. Il est quelle heure déjà ? 14h33 ! Ah, zut, j’ai pas vu le temps passer, il faut aller se chercher un truc à manger ! Tu me prends un coca ? Il est 13h26. Aujourd’hui, je déjeune correctement. J’en ai marre de manger devant mon écran ! A table. T’as fait quoi ce week-end ? On est lundi. J’ai bossé sur le dossier machin chouette. Je suis allé marcher dans les bois. C’est vraiment bon ici, on devrait venir plus souvent. Ciné, expo, amis, comme d’habitude. Oh, pas grand chose. Tu me fais goûter ? Je me suis remis de la veille. Il a fait un sale temps. Lessive, ménage, rangement, les trucs du dimanche quoi. Je n’ai r-i-e-n fait et bon sang, ça fait du bien pour une fois. T’as vu le match ? Bon, pour la réunion de demain matin, t’as pu avancer ? On peut en parler maintenant si tu veux. Non, moi, je ne vais jamais au cinéma. Ah. Et ? Ni au musée. Mais tu ne pourrais pas parler de choses que l’on connaît ? Alors, ce match ? Au prix où ils sont payés, ils pourraient au moins taper dans la balle ! Même mon fils ferait mieux qu’eux ! Hum, hum… Bon, il faut qu’on  s’organise une réunion pour parler de la prochaine réunion. Tu cales ça ? Dis, t’as entendu ce qui s’est encore passé avec bidule truc ? Non, raconte ! Chut, elle arrive… Cela tombe quel jour le 1er mai cette année ? Un dimanche ? On se fait toujours avoir. T’as l’air étrange ces derniers jours… Quelque chose ne va pas ? Ah, ah, ah ! C’était drôle quand même… A certaines heures de la journée, la vraie solitude, même si elle peut sembler légèrement pathétique vu de l’extérieur, est, parfois, la meilleure des compagnes.

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Ceci est un homme fumant une pipe. Et même mieux, c’est un agent de nettoyage de la Ville de Paris s’offrant une petite pause pour tirer sur sa pipe. Dans le Marais.

Même des années après l’avoir prise, cette photo me fait sourire. D’abord du fait de la concordance des couleurs entre sa tenue (et sa fonction) et la pharmacie devant laquelle il est posté (et sa fonction). Nettoyer nos rues des saletés et impuretés qu’on y laisse voire jette pour l’un ; nettoyer notre corps des microbes et miasmes que l’on attrape, parfois, en se promenant dans la rue, où s’accumulent toutes sortes de saletés et d’impuretés que d’aimables agents vert et jaune balayent régulièrement, parfois en faisant une pause devant une pharmacie où l’on entre, de temps en temps, pour se débarrasser des microbes et miasmes que l’on a attrapés dans la rue…

Maintenant, s’il n’avait pas eu cette pipe à la bouche, je n’aurais certainement pas déclenché. S’il n’avait pas eu cette pipe à la bouche, il aurait été un « simple » agent de la ville en charge d’une partie de notre bien-être. La pipe a donc un rôle primordial dans l’existence même de cette image. Image qui est aussi la matérialisation d’un a priori : mon étonnement de voir qu’un agent de nettoyage puisse fumer la pipe. J’avais une représentation différente de l’amateur de pipe… En tweed, à Londres avec un lévrier au bout du bras. Ou sur un banc, sur l’île de Tatihou, avec des rides profondes et un teint buriné par les années passées en mer. C’est foncièrement stupide a posteriori. Mais, c’est ça, un a priori. L’ignorance est souvent à son origine.

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Je ne parle pas de celui devant lequel certains se recueillent derrière ces immenses portes en train d’être lavées des pêchés de la ville qui s’y sont incrustés, mais bien de ce petit homme en combinaison blanche, posté au sol, les deux mains sur les hanches, la tête rivée vers les hauteurs, à observer ses camarades à l’ouvrage, peut-être même à leur donner des instructions voire des ordres. Le boss quoi, dans tout ce qu’il a de plus caricatural. On en a tous croisés des comme ça.

Bien entendu, qu’il le soit ou pas vraiment importe peu ici… L’image n’est qu’un prétexte. Elle pourrait être interprétée totalement différemment. En fait, ce petit homme en combinaison blanche, posté au sol, les deux mains sur les hanches, la tête rivée vers les hauteurs, à observer ses camarades à l’ouvrage fait enfin une pause après une heure de grattage minutieux avec masque et tuba tant le produit utilisé pour le lavement est toxique. Il vient juste de passer le relais au cosmonaute du premier niveau et admire, las, les mains fatiguées reposant sur les hanches, le travail accompli… Dans quelques secondes, il va passer un pot à sa collègue de droite pour lui éviter de descendre. Tout est possible. Et, c’est à la fois la force et la faiblesse de l’image. Le choix se fait alors de façon totalement subjective, selon l’humeur du jour du preneur d’image ou du regardant. Bien entendu, cette humeur étant, par définition, fluctuante, l’autre hypothèse pourra être préférée à un autre moment par la même personne. One point pour la relativité !

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