Photo-graphies et un peu plus…

Une chose est certaine : vous aurez beau lire, relire, re-relire, re-re-relire et même re-re-re-relire un article, un journal, une lettre, un mail, un cartel, un texte lambda que vous avez rédigé et qui est destiné à être diffusé, il restera toujours au moins une couille timide. Une coquille si vous préférez. C’est comme ça ! Au bout d’un certain nombre de relectures, certaines lettres en trop ou en moins, certains espaces oubliés ou ajoutés, certaines fautes grossières ou totalement innocentes, deviennent irrémédiablement invisibles. Ce que vous savez parfaitement car ce n’est pas la première fois que vous écrivez un article, un journal, une lettre, un mail, un cartel, un texte lambda destiné à être diffusé. D’où l’intérêt, à un moment d’épuisement visuel absolument normal, de poser le papier en question sur un bureau qui n’est pas le vôtre, mais idéalement celui d’une personne douée avec les lettres, pour qu’elle puisse y jeter un regard neuf, celui-là même qui vous a quitté après la 6e relecture… Pourtant, malgré cette ultime précaution, il arrive que de vulgaires erreurs survivent au quintuple passage du peigne fin orthogrammairiphique… Heureusement, une fois l’article, le journal, la lettre, le mail, le cartel aux yeux de tous, il y a toujours une bonne âme pour vous annoncer, avec un grand sourire ou avec dépit, que vous en avez oublié une voire, quand c’est possible, pour vous corriger plus ou moins élégamment et discrètement… Maintenant, le but est de savoir où se trouve la coquille de ce texte !

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… on accepte ce que l’on rejetait fermement dans le temps. Je m’entends encore le dire (ou presque) : « Jamais j’n’irai nager dans ces piscines parisiennes ! Faire la queue pour nager, franchement, ça a pas d’sens ! ». Oui, à cette époque, je ne mâchais pas mes mots… Et pourtant, si un citadin veut brasser, crawler, papillonner, il doit malheureusement se plier à cette réalité, le faire en compagnie de ses – nombreux – congénères, tout aussi ravis que lui, et accepter certaines règles de conduite, à la fois logiques du fait des circonstances et totalement absurdes par ce qu’elles imposent.

Le topo est simple : vous vous approchez du bassin un peu à reculons (vous pensez encore à ce que vous vous disiez il y a quelques années), vous choisissez une ligne (après une courte analyse mathématique sur les corps plongés dedans et défiant la loi d’Archimède), vous entrez dans l’eau (avec votre joli bonnet, vos lunettes qu’il faudra écoper dans quelques mètres voire votre pince-nez qui ne tient pas) et vous attendez le bon créneau pour vous élancer (comme sur une bretelle d’autoroute). Clignotant, coup d’œil du côté de l’angle mort pour éviter un corps à corps dès le départ, et puis c’est parti. Vous avez réussi à vous glisser entre un dauphin et deux copines qui papotent en se persuadant qu’elles font aussi du sport. Le dauphin ne vous pose pas réellement de problème même s’il vous éclabousse de son crawl maîtrisé pendant quelques secondes, le temps de doubler la personne qui lui bloque le chemin vers la victoire, et que vous finissez par atteindre inexorablement… Sans pouvoir la doubler pour autant puisque sur cette deux voies à double sens, le trafic est temporairement congestionné dans le sens inverse…

Voilà que vous naginez, comme vous piétinez parfois à marcher avec des personnes au pas lent… Naginer, comme toute action faite à un rythme non naturel, est très fatigant. Et puis, c’est agaçant. Vous êtes quand même là pour faire quelques longueurs… Pour suer, vous dépenser… Pour sortir de votre zone de confort, comme disait l’autre. Et bien, non, comme au supermarché, comme à l’entrée du métro, comme devant les images d’une expo à succès, vous faites la queue pour avancer. Un regard désespéré sur une autre ligne ? L’eau est-elle plus bleue ailleurs ? Vous tentez une incursion et pensez aux petits hérissons écrasés sur le bas côté d’avoir voulu traverser la chaussée… Une image effroyable qui vous fait changer d’avis instantanément et tenter le tout pour le tout : le doublage sous-marin… Après tout, quitte à se déplacer dans un volume, autant en exploiter toutes les dimensions. Une stratégie qui n’est pas sans risque : d’abord de coup de pied, ensuite de surprise du doublé voyant une tâche sombre lui passer en dessous et émerger juste devant elle… N’empêche, vous avez réussi à passer, à avancer, à finir votre longueur. Plus vous nagez, plus vous absorbez ces petites taquineries comme un airbag, les chocs ; plus vous nagez, moins vous entendez ce qui se passe autour de vous ; plus vous nagez, plus vous entrez dans votre bulle en vous disant que, finalement, les piscines parisiennes, c’est pas si pire…

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C’est incroyable à quel point les communicants n’hésitent pas, parfois, à user d’arguments fallacieux pour faire passer les messages de leurs clients, même si c’est pour le bien de tous. Ici, dans les toilettes publics d’un centre commercial à Chicago. Publicité étatique qui affiche une esthétique des années 1950 de femmes soumises à leurs maris aux larges épaules mais respecte l’exigence de diversité et de représentation des minorités des années 2000 (en faisant toutefois dire à la dame noire en rouge, qui a une excellente vue, une phrase absolument absurde, que personne de sensé ne prononcerait dans le monde réel) : image donc totalement anachronique, en plus d’être farfelue.

Par ailleurs, le fait que cette affiche soit placardée dans les toilettes des femmes alors que c’est monsieur qui est directement visé pose plusieurs questions : ne se sont-ils pas trompés de lieu et y a-t-il la version « femme » chez les hommes ? les femmes sont-elles chargées de prêcher la parole salubre auprès de la gent masculine ? existe-t-il des statistiques prouvant que les hommes ne se lavent pas assez souvent les mains et que c’est pour cette raison qu’ils ne trouvent pas de partenaires pour danser au bal des pompiers du 4 juillet ? des chercheurs d’Harvard ou du MIT (jamais ensemble puisqu’ils se font concurrence) ont-ils réussi à établir une corrélation forte entre déficit de séduction et prévalence à certaines maladies ; et enfin, les femmes sont-elles des êtres si éthérés et purs que ces basses questions d’hygiène ne les concernent pas ? En fait, les femmes, elles s’en lavent les mains !

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J-1, c’est ce moment, effroyable évidemment, où l’on réalise que l’exposition, le spectacle, le festival que l’on avait repéré(e) alors qu’elle (ou il) venait tout juste de commencer et que l’on voulait absolument voir va s’achever ou fermer ses portes dans les tous prochains jours. Voilà que tout d’un coup, il faut courir musées et galeries pour réussir à découvrir ce qui était partiellement planifié depuis quelques semaines voire quelques mois. Autant de rescapés d’un naufrage où il y a, il faut se le dire, peu de survivants. Malheureusement, quelle que soit la durée de la manifestation et la motivation initiale, le phénomène du J-1 est assez récurrent, comme un dommage collatéral des excès de vitesse du temps… Et je ne sais plus ce qui est le plus effroyable : le fait de ne pas réussir à isoler deux ou trois heures de son temps pour visiter une exposition ou assister à un spectacle, celui de ne pas s’être rendu compte qu’il s’était écoulé trois mois entre l’instant où l’on s’était dit : « Il faut que j’aille voir cette expo / ce spectacle ! » et le J-1, ou enfin, celui de manquer un rendez-vous avec la création… Probablement un mélange des trois…

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Vous entendez ? Rien ? Si, si, concentrez-vous, vous en entendez forcément un, sourd, permanent, tant et si bien que vous l’avez totalement intégré à votre environnement sonore quotidien : le bruit de fond… Celui-là même qui fait que vous n’êtes que très rarement en paix dès lors que vous vous extrayez de votre petit univers, de votre chez-vous, de vos heures de sommeil. Et encore… Cela peut ronronner à côté ! Quand vous vivez en ville, celui qui vous accompagne toute la journée n’est autre que le bruit de fond de la circulation, double vitrage ou pas. Il n’y a pas un moment où personne ne bouge, où tout s’arrête. Un bruit d’aspirateur baryton… Vous le troquez temporairement pour les claquements de pièces métalliques du métro, les couinements des freins de bus, les sonneries de fermetures de porte, de demandes d’arrêt, de passages piétons, les sifflets des agents de la circulation, les klaxons des automobilistes exaspérés, puis par la soufflerie de votre bureau – celle qui vous amène chaleur en hiver et fraîcheur en été -, à laquelle s’ajoutent bientôt le grésillement du néon situé juste au dessus de votre siège, le souffle d’asthmatique de votre ordinateur qui ventile, la symphonie de l’imprimante commune qui se déclenche de façon totalement aléatoire pour vous, le brouhaha de la parole libérée au RIE, le tapotement incessant du pied droit de votre collègue stressé, les vibrations du métro qui font trembler votre verre d’eau et vous font craindre l’arrivée imminente d’un T-Rex… Le bruit de fond tourne en boucle, il s’impose à vous, à nous. Et, tout en nous absorbant dans son écho technologique, il nous coupe du monde dans lequel nous vivons, pose un filtre. Et voilà que pour l’oublier, pour ne plus l’entendre, nous chaussons des prothèses auditives : un casque. Qui lui-même, sans que nous fassions ce lien pour autant, diffuse un nouveau bruit de fond, une mélodie, une chanson, en tout cas, des sons que nous avons nous-mêmes choisis et que nous acceptons donc plus aisément…

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