Photo-graphies et un peu plus…

Paradoxe temporel

On ne sait pas trop par quel bout la prendre, cette photographie… Il y a des signes – des gens essentiellement, beaucoup même – et des indices – l’environnement dans lequel ils évoluent, leurs postures – en pagaille. Mais je l’aime ce fouillis pictural, cette atmosphère éthérée à la fois festive, mystérieuse, peut-être angoissante un peu aussi.

Malgré tout, je me dis, c’est dommage. C’est dommage de ne pas avoir déclenché une seconde plus tôt. Une seconde plus tôt, le lutin rouge à casquette actuellement au milieu de l’image se serait glissé dans la seule zone vide d’humain de la composition. Il aurait été entier ; la petite fille du premier plan n’aurait pas eu n fond perturbant le regard, et l’homme central en polo vert et lunette de soleil (qui, je n’ai pas encore compris pourquoi, me fait penser au T1000 de Terminator 2), n’aurait pas été tronqué lui non plus. Le regard serait passé d’une silhouette à l’autre sans s’arrêter.

Mais, qui peut réellement savoir ce qui se serait passé une seconde plus tôt pour les autres… La main de la femme au T-Shirt blanc aurait-elle été levée, comme ça, se démarquant nettement dans la fumée ? Le père du premier plan aurait-il eu la tête tournée, en tout cas suffisamment pour nous laisser deviner un sourire, et faire comprendre, par la même occasion, que ce qui se trame ici n’est certainement pas un drame ? L’homme à droite aurait-il eu son appareil photo ainsi levé et dirigé dans la direction opposée à celle vers laquelle les regards semblent se concentrer, accroissant encore un peu plus le mystère : pourquoi regarde-t-il dans cette direction alors que tout semble se passer de l’autre côté ? En fait, une seconde avant, la photo aurait peut-être été complètement différente et beaucoup moins intrigante…

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Mort à Venise

C’est un peu comme le nez au milieu de la figure… Il a beau être au milieu donc, très présent forcément, voire plutôt imposant (le relief principal de notre visage, jusqu’à parfois se transformer, pour certains, en véritable péninsule), il arrive que nous passions à côté, tout absorbés que nous sommes par ses satellites gravitant autour avec harmonie – la gondole (à Venise, oui), le vaporetto, le motoscafo, le traghetto, le taxi bateau ou encore la barge – ou bien si peu préparés à le voir là, à cet instant précis, qu’en effet, nous ne le voyons pas.

Et au milieu donc, il y a un énorme paquebot rempli de fiers croisiéristes qui glisse sur les eaux peu profondes de la lagune et auquel personne ne semble faire attention. Logique, me direz-vous, tout le monde lui tourne le dos. C’est que le traître ne fait quasiment pas de bruit ! Mais quelle surprise quand les yeux tombent dessus en balayant naïvement l’horizon à la découverte des innombrables splendeurs architecturales de la Sérénissime ! Et quelle aberration que ces monstres qui convergent régulièrement vers le bassin Saint-Marc via le canal de la Giudecca.

Aberration écologique évidemment : ces bâtiments flottants de près de 100 000 tonnes, de plus de 300 mètres de long (presque deux fois plus que la place Saint-Marc elle-même) et quasi 40 de large, hauts comme de grands immeubles, provoquent des remous qui fragilisent dangereusement les fondations, donc les millions de pilotis sur lesquels repose la Cité des Doges depuis des siècles. Humaine forcément : comment les passagers peuvent-ils ainsi parader sur le pont supérieur pour admirer une ville qu’ils contribuent à détruire ? A croire qu’ils ne voient pas plus loin que le bout de leur … (hum, trop facile) ! Bien sûr, lobbies et riverains s’écharpent depuis des années, des voies alternatives sont étudiées. Mais pour l’heure, les premiers ont la main. Et en attendant la prochaine bataille navale, ce nez-là continue malheureusement de défigurer affreusement le paysage !

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A partir de là...

… les rues ne sont plus indiquées donc demandez votre chemin ! Une évidence bien entendu ! En pratique, tout dépend de l’endroit où vous êtes. Où que vous soyez dans le monde, vous avez en effet deux façons de découvrir une ville que vous ne connaissez pas. Bien entendu, il y en a bien plus que deux, mais c’est parfois reposant d’aborder la vie avec une âme binaire ! La première : partir à l’aventure sans plan ni objectif précis en tête quitte à passer juste à côté de l’incontournable. La seconde : définir un plan d’attaque avec étapes prédéfinies.

Dans le premier cas, seule votre envie et votre curiosité vous guident. Peu importe, au final, que vous ne sachiez pas précisément où vous êtes. Cela fait partie du voyage. Dans le second cas, une carte peut être utile. En écrivant cela, je réalise à quel point cette phrase est potentiellement une espèce en voie de disparition. Car aujourd’hui, pour se repérer et se rendre quelque part sans effort, nombreux sont ceux qui s’appuient sur leur extension connectée : leur smartphone géolocalisé doté d’un GPS. Que c’est triste !

Pour les besoins de ce billet (et faire perdurer la magie de nos errances citadines), faisons donc cette hypothèse pré-nostalgique que vous préférez toujours lire des cartes. Le plus souvent, associées à un certain sens de l’orientation, elles suffisent amplement ! Mais il peut arriver également que ce ne soit pas le cas. « A partir de là, les noms de rue ne sont plus indiquées sur le plan, demandez votre chemin. » Retour à la phrase départ. C’est bien beau mais vous ne parlez pas javanais, ni japonais d’ailleurs, ou si peu. Même si vous êtes incapable de vous repérer finement, vous savez toutefois que vous n’êtes pas si loin du but. Alors, vous vous lancez vers l’inconnu. En l’occurrence, un épicier à qui vous essayez de faire comprendre que vous cherchez un ancien sento reconverti en café tout près d’un très vieux onsen. Fastoche !

Malheureusement, vous n’avez pas imaginé, en posant la question dans l’idiome local que votre interlocuteur allait logiquement en déduire que vous le maîtrisiez et donc vous répondre tout naturellement – c’est-à-dire très rapidement – dans sa langue natale. Interloqué mais poli, vous l’écouterez patiemment en hochant la tête comme vous l’avez vu mille fois fait depuis votre arrivée, ce qu’il interprétera comme un acquiescement et un signe de compréhension de votre part, alors que vous n’y entendez absolument rien et n’attendez qu’une chose : la fin de son interminable explication, qui vous incite à vous poser une nouvelle question. Est-elle aussi longue car fourmillant de détails sur tout ce que vous allez rencontrer sur votre chemin ou car le lieu recherché est finalement bien plus loin que vous ne le croyiez ? Evidemment, vous ne le saurez jamais.

De fait, après l’avoir remercié dix fois minimum, vous vous éloignerez lentement mais sûrement vers la première direction indiquée (et que vous aviez miraculeusement comprise), disparaitrez à un angle avant de vous arrêter net pour vous replonger dans votre carte pleine de défauts mais ayant cet avantage indéniable à ce moment de parler la même langue que vous. Là , faute d’alternative, vous combinerez les deux façons de découvrir une ville : « ça doit être par là ! » (accompagné d’un geste vague vers là bas donc). Quelques minutes après, chance ou pas, vous tomberez sur ledit sento tant convoité. Vous pousserez la porte sans y croire vraiment et vous vous poserez dans un coin avec cette sensation d’avoir traversé la terre entière pour y arriver, aussitôt remplacée par celle, délicieuse, d’être dans un monde à part.

 

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