Chaque année on se dit la même chose, et pourtant, chaque année, à cette même période, qui revient bien trop vite à mon goût, on réédite exactement ce que l’on s’était promis de ne plus réitérer : ses courses de Noël au dernier moment ! C’est un peu comme les bonnes résolutions du 1er de l’an : on y croit dur comme fer en janvier et déjà, en février, la moitié est victime de la classique épidémie de R.I.R.A. (pour Résolutions Illusoires Rapidement Abandonnées). Autant dire qu’au bout d’un an, il n’en reste plus grand chose…
Après avoir passé des heures à filer de boutique en boutique, à errer consciencieusement entre les rayons en se demandant, sincèrement, si tel ou tel livre, CD, bibelot, jeu, vêtement, sculpture, spectacle, bijou, caillou, joujou plaira ou pas, parce que l’on n’a pas voulu demander à chacun ce dont il avait envie sous le sapin, certain d’être quand même capable de faire cet effort annuel, finalement, on se prend à trouver attractif un « truc » sur lequel on n’aurait même pas posé le regard en temps normal car on l’aurait de suite identifié comme inadéquat : un beau carnet alors que la personne n’écrit pas, une bougie à la vanille alors qu’elle est allergique, un livre de cuisine alors qu’elle ne cuisine pas, un chapeau de paille alors qu’elle ne part jamais en vacances (c’est triste ça), un déguisement de wonder woman alors qu’elle déteste les soirées à thème… Les mauvaises idées, on en trouve à la pelle, ce ne sont pas elles qui font défaut. Mais voilà, se retrouver à faire ses cadeaux de Noël à une semaine de l’échéance – très en avance pour certains donc – oblige à revoir ses exigences à la baisse pour une vulgaire question d’impatience, de manque de concertation et d’imagination : les mauvaises idées se muent en opportunités, en « Et pourquoi pas ? », en presque bonnes idées puis en cadeaux… L’important, dans ce contexte de stress extrême, n’est pas de faire plaisir dans le futur mais de rayer, ici et maintenant, une ligne sur la liste des personnes à gâter ! Et hop, une de moins ! Comme si c’était une victoire… Et si jamais le doute – en réalité, un éclair de conscience – venait à s’insinuer dans nos choix, il nous suffirait de penser comme cette dame, dont j’ai attrapé la phrase décomplexée et décomplexante au vol dans un grand magasin : « De tout manière, quoique l’on prenne, ça n’ira pas ! »… Allez, promis, l’année prochaine, on s’y prendra plus tôt !
Une fois n’est pas coutume, je commence par le texte car ce qui suit devrait être un joyeux bazar. Tout comme le sont certains étals de vide-grenier amateur, où l’on trouve tout et souvent, n’importe quoi, parmi lesquels des objets dont nous voudrions nous-même nous débarrasser s’ils nous appartenaient. Et que nous sommes pourtant prêts à acquérir car à 1 €, le « n’importe quoi » prend du galon et peut encore faire des heureux… On se dit : « A ce prix-là, ce n’est pas grave si cela ne fonctionne pas, si cela casse dans dix jours, si je ne le mets pas, si je le perds, si on me le vole, si… Au pire, je le revends au prochain vide-grenier ! ».
Du coup, j’ai loué mon mètre linéaire car, comme avant un déménagement hâtif, j’ai besoin de faire un peu de vide dans mon dossier hebdomadaire où j’accumule les photos envisagées pour ces duos quotidiens. Il y en a quelques unes que je ne peux plus voir en peinture, certaines prennent la poussière, et de nouvelles idées s’accumulent dans les carnets avec d’autres photos… Et puis, ce sont les vacances, cette coupure tant attendue où, comme au 1er janvier de chaque année, nous tentons de prendre de bonnes résolutions (soit dit en passant, c’est simplement car nous avons enfin le temps de nous poser, de sortir la tête hors de l’eau, et donc de penser, que nous essayons de reprendre la main sur notre quotidien pour les mois à venir ; ce que nous appelons communément des résolutions donc). Bref, trêve de bavardage, il est faussement 6h du matin, l’heure de tout déballer sur mon stand et d’essayer de lier ces images, dans l’ordre où elles se présentent à moi alors qu’elles n’ont rien en commun.
C’est parti :
Il faut toujours un point de départ. Une gare aux ombres énigmatiques et un sombre passager fuyant feront amplement l’affaire…
Oublions la gare de la ville où on y danse on y danse et prenons la vedette ! Cet îlot qui, de la crête de Crater Lake, a des allures de vaisseau fantôme (comprenez, on ne le voit pas tout le temps), ressemble, depuis le niveau de l’eau, à un trou noir, une sorte de grotte inversée dans un décor de rêve…
Qui nous ferait ressortir directement dans les ruelles de Kyoto où, un peu avant la tombée de la nuit, les geishas défilent en silence et sous le crépitement des flashs de badauds les attendant au tournant…
Je me suis alors demandé où pouvaient les conduire leurs pensées à cet instant précis où elles n’étaient plus qu’un personnage au visage figé, qu’une icône aux yeux des autres dont ils voulaient rapporter une image à tout prix… Peut-être sur cette plage Quileute de La Push, de l’autre côté de l’océan Pacifique, où reposent ces trois rochers majestueux…
Et où, paradoxalement, on traverse les paysages à vive allure…
Au risque de se heurter à un mur étrangement colonisé par du lichen déshydraté… Heureusement, une manœuvre réflexe permet d’éviter le choc frontal mais elle nous projette directement à l’embouchure de ce nouvel abysse, de cette sombre porte carrée sans fond apparent.
A l’autre bout de laquelle se trouve une plage normande éclairée sporadiquement par des pétards de fête nationale. C’est là que ça se gâte, que je perds le fil et que tout s’enchaîne sans transition ni autre explication que de courtes légendes lapidaires…
Paris, Nuit Blanche… Succès démesuré. Approcher l’installation de Vincent Ganivet relève du parcours du combattant. Lassés, les gens passent à côté sans lui jeter un œil.
Sagrada Familia. La lumière, dont je force volontairement le trait, inonde ce lieu d’une beauté sans pareille provoquant un séisme émotionnel de 9 sur l’échelle de Richter…
Pour le cliché, tout simplement. Impossible de se trouver à un tel endroit sans penser à un calendrier. Cela a quelque chose d’un peu ringard et en même temps, la ringardise a parfois ses avantages…
Sous les poursuites roses, une montagne humaine se lève et fait une hola aussi difficile à saisir que magique à voir… S’ensuit une avalanche d’images non légendées, un mélange de chaud et de froid, d’ici et d’ailleurs, de réalité et de faux-semblant, de proche et de lointain… Des images qui s’enchaînent sans d’autre raison que celle imposée par leurs noms qui s’enchaînent.
Voilà, en un coup d’ailes, c’est fini. Le stand est quasi vide. Je me sens légère tout d’un coup…
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Share on FacebookLa lumière était blanche, et même éclatante. Il y avait un escalier au milieu de mon champ visuel, un très long escalier étroit s’enfonçant à l’infini que je découvrais depuis la plus haute marche. Au bout de quelques secondes, mes yeux s’étaient acclimatés à cette vive luminosité et j’avais fini par voir une silhouette monter tranquillement […]
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