Le chemin semble tout tracé. Des marches de pierre habitées par le temps et l’air iodé. Au sommet, une petite ouverture donnant sur un ciel bleu clair, sans nuage à l’horizon. Et pourtant, à l’issue de cette ascension, de l’autre côté de cette courte fenêtre, une seule vérité s’impose : celle du vide, de l’inconnu et de l’angoisse tétanisante qu’ils font naître avant même de les avoir découverts…
Il est étrange d’entendre des gens s’exclamer : « C’est le paradis ! » car, s’ils y sont – et a fortiori, si on y est, puisqu’on les entend – c’est, qu’ils sont au moins morts. Et malheureusement, nous avec. Tout comme l’on se fait une idée de « Dieu » alors que personne ne l’a vu, on en élabore une du paradis dont, a priori, personne n’est jamais revenu. Il suffit de lancer une petite requête par images sur le moteur de recherche aux deux O pour s’en rendre compte. Ainsi, sur cette planète bleue, bien vivante même si toussotante, le paradis est-il souvent associé à cette longue plage de sable blond bordée de palmiers desquels tombent, à toute période, de délicieuses noix de coco, et sur laquelle cassent de magnifiques vagues d’une mer assurément chaude aux eaux turquoises et poissonneuses, le tout, cerné par une nature luxuriante et accueillante… Un passage par Hawaii donne donc, en théorie, un aperçu de cette énigmatique image d’Epinal. Et, il faut l’admettre, très agréable.
Ce voyage devrait d’ailleurs être prescrit à chacun d’entre nous au moins une fois dans notre vie, pour que nous soyons en mesure de déterminer si nous voulons réellement y aller. Après. Certains auraient peut-être en effet une vie totalement différente s’ils pouvaient tester le paradis terrestre. C’est vrai, le soleil, la plage, les cocotiers, ça en fait rêver beaucoup mais ça ne plaît pas à tout le monde. Il en est qui ne supportent pas la chaleur par exemple, qui détestent le poisson cru, qui s’énervent de trouver encore des grains de sable dans leurs chaussures un an après être allés à la plage où ils se sont d’ailleurs ennuyés à mourir… Oups, pardon. Non, décidément, le paradis peut ne pas être un but en soi.
L’alternative ? L’enfer. Qu’il faudrait pouvoir aussi tester pour les mêmes raisons. Etrangement, une recherche équivalente sur le double O ne donne pas de photographies, à l’instar du paradis, mais des dessins, des peintures, des collages, des affiches de films, des bulles de BD, en somme, des représentations d’un univers que l’on imagine aisément rouge, sanglant et monstrueux. Comme si l’enfer ne pouvait exister sur Terre. Passons sur cette mise en miroir aberrante mais, de fait, instructive… Seulement voilà, Enfer, c’est justement le nom du canyon ci-dessus, où serpente cette rivière, maléfique certainement, au creux de cette belle vallée verdoyante et de ces montagnes encore arborées. Hell’s Canyon en VO. Cet enfer là n’a rien d’effrayant ni de repoussant. Il n’est ni rouge, ni sanglant, ni monstrueux. Au contraire, il donne envie de l’arpenter.
Je suis bloquée : j’ai aimé l’enfer, j’ai aimé le paradis. Alors, que faire ? Vivre, en attendant.
J’aime la Bretagne. Je ne connais pas tous les Bretons, mais tous les Bretons que je connais – et je ne parle pas que de ceux qui inscrivent Bretagne dans la case Pays de leurs formulaires administratifs -, où que l’on soit, ne peuvent s’empêcher, à un moment, de lâcher fièrement un « On a la même chose en Bretagne ! ». C’est un cran au-dessus du « ça ressemble à » du voyageur, qui, lui, fait des connexions entre les différents endroits qu’il a déjà visités sans les faire converger vers une destination précise. Que vous soyez à la montagne, au soleil (ah, ah…), au bord d’une mer chaude, le Breton trouvera toujours le petit mètre carré qui le ramènera en une micro-seconde à sa terre natale ou d’adoption, chez lui. C’est charmant voire, amusant. Ceci-dit, parfois, le Breton a raison, comme ici, à Bandon, sur la côte sud de l’Oregon. On se croirait sur un chemin des douaniers finistérien ! Voilà que je m’y mets aussi !
Le soir venu ou au petit matin, des êtres étranges arpentent parfois les plages équipés d’une extension de bras et d’un casque. Ils les balayent en long en large et en travers, au sens figuré, en quête d’objets métalliques enfouis sous le sable – quelques pièces, bijoux et autres capsules de bouteilles – et perdus par les plagistes du jour ou de la veille. D’autres tracent le même chemin sinueux, la tête également penchée vers le sable, sans pour autant rechercher ce qui brille. Pour ceux-là, le butin se compose de beaux coquillages, de grains de sable remarquables, de galets bien lisses, de morceaux de bois flottés… Souvent, ces trésors, petits, ne se laissent pas voir du premier coup d’œil, ils requièrent un peu de concentration, d’effort, de sélection… De loin, on repère un coquillage à fière allure, on s’approche, on se baisse, on le ramasse, on lui retire grossièrement le sable qui lui colle à la carapace, on le regarde avec cet air de juge arbitre d’un 100 mètres hommes aux Jeux Olympiques et on décide soit de le mettre dans notre poche, soit de lui rendre sa liberté et de le rejeter nonchalamment au sol…
Exceptionnellement, le trésor trouvé sur la plage est immensément grand et extrêmement surprenant. Inutile de se pencher pour le voir, il s’impose à tous comme une fontaine à eau en plein milieu du désert. Ainsi en est-il de cet arbre mort dont les racines, tournées vers l’océan, reposent sur la plage, tandis que son tronc est partiellement inhumé dans le sable, derrière. Un arbre gigantesque, au bois lisse lavé par le sable, le vent, le sel… Un arbre accueillant au fond duquel on peut se lover sans crainte… Un arbre ludique que l’on peut escalader facilement… On tourne autour, on s’extasie, on le caresse avant d’être secoué par une question pourtant évidente : comment est-il arrivé là ? Ses congénères ne sont pas du même bois. Amené par les hommes ? Pour quelle raison ? Et comment ? Je sais que les Egyptiens ont réussi à ériger des pyramides sans grue, mais quand même… Se pourrait-il que l’océan, un jour de grande colère, ait eu la force de balloter ce mastodonte peut-être tombé d’une falaise et de le faire s’échouer sur le sable, rendant ainsi à la Terre ce qu’elle a engendré ? Même si un « non » incrédule s’affiche machinalement sur l’écran de contrôle, ce dernier est bien en peine de lui trouver une alternative plus convaincante…
Haut en couleurs, tonitruant, festif, mystique et spirituel, le Pèlerinage de Matsu (ou Mazu) qui vient de commencer est l’événement le plus emblématique et populaire de la vie culturelle et religieuse taïwanaise. Inscrit au « patrimoine culturel immatériel » de l’Unesco depuis 2009, la procession taoïste suivant un ensemble très précis de rituels est l’un des événements […]
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