Photo-graphies et un peu plus…

… la belle neige de Mont-réal, ainsi fond, fond, fond, trois p’tits mois et puis s’en va ! Montréal fond. Littéralement. Et soudainement. La ville goutte et s’égoutte de partout dans un clapotis symphonique orchestré par le ciel lui-même. Les bouts de glace, fragilisés par un redoux temporaire, se disloquent, tombant sur le trottoir dans un fracas de corps qui lâche, comme un modèle après six heures de pose intense. Les beaux petits tas de neige pure se muent en flaques marronnasses. Les mégots de cigarette bien dissimulés sous le manteau blanc remontent à la surface par dizaines. A moins que cela ne soit elle qui remonte à eux. La neige redevenue eau dévale les pentes, même faibles. Le filet dynamique file, innocemment, sans se douter qu’il va bientôt se jeter dans la gueule d’un caniveau émettant un son de rivière souterraine agitée. C’est la fête en bas après plusieurs semaines de statu quo dans le monde lumineux. Le paysage n’est pas toujours très beau, mais qu’est-ce que la beauté face à quelques degrés de plus ? Les oiseaux sifflent, les visages sourient, les écureuils tentent une sortie, certains s’élancent en petite tenue quand d’autres préfèrent, passifs, se shooter à haute dose de vitamine D… Profitons-en, l’accalmie est de courte durée. Demain, retour au négatif !  Les gouttes vont-elles s’arrêter en route ?

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Parfois, une même caractéristique peut être à la fois une qualité et un défaut, un même objet source de progrès ou de régression, une même personne générer de l’amour ou de la haine, sans que cela soit paradoxal ou incompatible. C’est alors notre humeur du moment qui nous pousse à voir soit son côté positif soit son côté négatif. Ainsi en est-il de la photo numérique. Certes, le fait de pouvoir faire des centaines voire des milliers de photos avant de remplir une carte mémoire, de pouvoir stocker toutes ces images sur un support virtuel, en somme, de pouvoir devenir un photographe compulsif et totalement irréfléchi pour pas cher peut, à moyen terme, soulever un certain nombre de problèmes – mais que faire de toutes ces images ?, est-ce que j’en imprime finalement ou pas ?, et si oui, lesquelles ?, et si non, mais à quoi cela sert-il alors ?, je n’ai plus de place sur mon ordinateur, je ne retrouve plus cette photo d’arc en ciel que je suis sûre d’avoir rangée là, à moins que ce ne soit là, quel fichier déjà ?

Ces mêmes raisons peuvent, au contraire, être source de liberté. Je n’aurai, par exemple, probablement jamais tenté de faire cette photo nettement hasardeuse avec un appareil photo argentique. Tout simplement car pour en avoir une qui satisfasse, il faut pouvoir en faire 20 sans craindre de percer son panier car les pellicules se font rares, que le développement a son prix, et que de toute manière, il n’y en aura aucune de bonne. Cette générosité du numérique désinhibe presque totalement. Et l’immédiateté qu’il offre – décriée un jour en ces pages, c’est certain : fais voir ! fais voir ! – n’est alors pas une marque d’impatience, mais une sorte de guide, d’aide en direct pour atteindre, par dichotomie, l’image imaginée. Comme si le numérique avait permis de déployer notre créativité… Cela, c’est évidemment très positif !

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Un matin neigeux. Aucun arc en ciel à l’horizon et pourtant, une mélodie sort de moi encore et encore. Et je n’ai même pas vu Le Magicien d’Oz. Pour tout dire, je ne sais pas vraiment d’où elle sort. Over the rainbow donc. C’est donc cette histoire d’espoir d’un monde coloré, de peines perdues au loin derrière les nuages, de soucis qui fondent comme des boules de glace au citron (si, si), de rêves qui deviennent réalité qui passe en boucle dans ma bouche. Bien sûr, je ne fais que fredonner l’air multicolore et ne découvre que maintenant les paroles de cette chanson créée en 1939 pour Judy Garland. Pour rompre le fil – je ne peux décemment pas rester avec cette chanson accrochée à moi toute la journée -, je décide de tenter l’overdose en l’écoutant en boucle. Direction le site du requin qui groove. Je tapote les quelques lettres du titre et là, s’ouvre devant moi, une liste d’interprétations que j’étais à mille lieues de soupçonner. Un véritable exercice de style ou un bizutage de chanteur ?

Le désir de se défaire de l’arc en ciel se mue en expérience musicale : écouter toutes les interprétations proposées. Une petite cinquantaine au bas mot, Ray Charles, Jewel, Tom Jones, Aretha Franklin, Cosmic Gate, Israël Kamakawiwo’ole, Rufus Rainwright, Barbra Streisand, Beyoncé, Nina Hagen, Jimmy Hendrix, Elvis Presley, Tom Waits, Melody Gardot et j’en passe donc. Il y en a pour tous les goûts, de toutes les époques – jusqu’à 2010 avec Jeff Beck -, de tous les styles musicaux – jazz, techno, électronique, instrumental, ukulele, soul, lyrique, folk… -, des fidèles à l’originale, des déjantées, des inspirées, des amusantes (involontaires je présume), des passionnées, des traduites, des perchées… A chaque fois, la structure et les paroles sont respectées, mais tout le décorum change. Réinventer un classique n’est pas aisé et certains se donnent du mal pour se démarquer. Ecouter ces différentes versions, c’est aussi un peu parcourir l’histoire des courants musicaux de ces 70 dernières années… Cela n’est pas sans me rappeler le couple formé par le négatif et le tirage en photo. Si le négatif est unique – les paroles, la structure -, les tirages – l’interprétation – eux, faits ou pas par la même personne, peuvent se multiplier à l’infini, offrant ainsi des approches totalement différentes d’une même image. Le passage au numérique ne fait qu’étendre le champ des possibles. Mais, d’un certain point de vue, il est aussi réconfortant de constater qu’un tel appel à un monde idéal empli d’amour et de joie – ça a quand même un petit goût de sucre d’orge non ? – a pu être le point de convergence et de ralliement de personnes a priori si opposées les unes des autres…

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A quelques jours d’achever une année complète de duos quotidiens (que se passera-t-il après ?), je réalise qu’aucun ne porte sur la Tour Eiffel. Cela ne pourrait être qu’un constat sans suite. Je n’en ai pas fait non plus sur la pyramide de Gizeh ni sur la Place Rouge à Moscou. Une raison simple à cela : mon corps ne m’y a pas encore traînée. Mais, en parisienne, même lointaine que je suis – la distance étant peut-être liée à cette urgence soudaine, de la nostalgie ? non… – je ressens le besoin, de fait, pressant, de réparer ce presque oubli. Et de consacrer un peu d’espace et de temps à cette figure symbolique dupliquée à des millions d’exemplaires sur des cartes postales, des photos de visiteurs d’un jour ou de toujours.

De mon côté, il faudrait probablement aller fouiller dans les cartons, donc, remonter quelques années en arrière, pour trouver une photo-reproduction de cette tour de fer puddlé montée en 2 ans, 2 mois et 5 jours, et qui a dû patienter 70 années avant de connaître une gloire internationale. Et ce n’est pas lui manquer de respect, il me semble, que de la faire apparaître sous un nouveau jour. En l’occurrence, nuit. Une de ces nuits irréelles et inspirées d’où émanent des images à la fois vraies – pas de post-manipulation – et fausses – ce n’est pas ce que l’on voit en regardant dans cette direction. Une passerelle Debilly désarticulée, un doublé métallique éclairé… La Tour aux 1665 marches s’évade de ce champ où elle est ancrée depuis bien longtemps déjà, traînant son double spectral comme un boulet. Faire trembler l’immuable, un beau dessein photographique, non ?

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A l’heure où beaucoup sont à dénicher des cœurs dans des choux-fleurs, des nuages de lait ou même des miches de pain, c’est une tête de mort qui me saute aux yeux au cœur de ce tronc scié de dépit… N’est-ce pas là un fait bien étrange, qu’un arbre, qui n’est plus, fasse ainsi apparaître la tête d’un humain, qu’il n’a jamais été, mais a fait qu’il n’est plus, sur ses plus jeunes cernes ? Peut-être un clin d’arbre pour nous rappeler que, quoi qu’il en soit, nous finirons tous entre quatre planches de son bois…

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Avec l’hiver, les buissons ardents séparant le chemin du fleuve se sont mus en de frêles brindilles. Des petites tiges caduques et figées s’extrayant tant bien que mal d’une neige légère mais envahissante, et signalant, par leur présence, tel un acte de bienveillante résistance, une frontière désormais invisible et impalpable entre la terre et l’eau claire.

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Nous espérons tous, plus ou moins et différemment, être comblés par notre vie. Les stratégies pour atteindre ce niveau de satisfaction sont nombreuses. Arrêtons-nous sur les deux plus évidentes : la première, croire en sa bonne étoile et attendre que le bonheur ou ce qui est susceptible de le provoquer, se présente à nous comme un bouquet de roses un jour de Saint Valentin ; et la seconde, bonne étoile ou pas, provoquer la chance, les opportunités et, d’une certaine manière, prendre la main sur le hasard, ou le destin, c’est selon les croyances personnelles… N’ayant tous qu’une vie – j’exclus les cas de métempsychose – et n’étant pas doté d’un don d’ubiquité parallèle, nous ne saurons jamais si l’une de ces options est préférable à l’autre. Il faudrait en effet pouvoir les suivre simultanément pour être en mesure de les comparer…

Cette double stratégie fonctionne aussi en photo. Parfois, le projet est très clair, très précis : par exemple, aujourd’hui, l’objectif est de photographier 46 voitures rouges, 23 femmes à chapeau, 12 pigeons sur un arbre et 3 chenilles sur l’herbe. Bon, la tâche n’est certainement pas aisée, mais elle a le mérite d’être définie, de fournir un cadre, et donc de laisser entrevoir une ligne de conduite. Se poster à un carrefour ou chez un concessionnaire Ferrari, aller fureter au rayon chapeau d’un grand magasin ou à la sortie de la messe, faire un tour au Jardin du Luxembourg et enfin, trouver des pêcheurs près d’une pelouse… Parfois, au contraire, il n’y a rien de vraiment arrêté. Comme ce jour-là. Je me suis agenouillée sur les pavés de cette historique rue des Saules sur la Butte Montmartre en espérant, passivement mais le doigt sur le déclencheur malgré tout, que quelque chose se produise. Je ne sais pas quoi exactement, qu’un train sorte de terre, qu’une bande de jeunes déguisés en pois chiche débarque… Evidemment, je ne m’attendais pas à ce qu’un simple canidé dé-laissé et renifleur de pavés entre nonchalamment dans le champ, sans même m’accorder la moindre attention ! Mais, c’est le risque à attendre que les éléments viennent à soi, ce qui s’apparente un peu à la stratégie du confiant-fainéant… Parfois, c’est reposant.

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Voilà une option plutôt radicale et renversante pour s’éviter quelques minutes de colère et un retour chez soi en danseuse après une bonne journée de travail… Mais que ne ferait-on pas pour sauver une selle visiblement très confortable des quelques âmes errantes malintentionnées qui courent les rues et les collectionnent ? Les selles. Que le pédalier soit transformé en récup-canette n’est alors qu’un moindre mal !

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Et si, en allant sur la recette de pain d’épices d’un site de cuisine, une douce odeur d’anis et de miel réchauffé venait nous chatouiller les narines ; et si, sur un site de produits cosmétiques, en cliquant sur telle ou telle bouteille, la fragrance du parfum sélectionné s’échappait de notre ordinateur ; et si, en faisant un match de boxe via notre console, en plus des vibrations nouvellement transmises, une odeur de sang venait rendre le geste virtuel plus vrai que nature, serions-nous réellement comblés et cela rendrait-il le Net plus humain ? Certains le pensent. Surtout les spécialistes du marketing qui y voient une nouvelle manière de se différencier de la concurrence. Et les tentatives d' »odorisation » de la Toile ont fleuri, beaucoup au début des années 2000, moins maintenant vraisemblablement… Il faut dire que la chose n’est pas simple et nécessite un minimum d’appareillage et d’anticipation : un  diffuseur d’odeurs (équipé de cartouches) branché à l’ordinateur, à placer entre le scanner, l’imprimante, la webcam, la tablette numérique et le disque dur externe ; des odeurs préalablement définies avec des clients et évidemment quelques suites de 0 et de 1 bien pensées pour bien synchroniser l’ensemble. Et oui, la réactivité d’un diffuseur d’odeurs n’égale sûrement pas la célérité à laquelle un internaute surfe d’un site à l’autre. Risque de décalage voire de télescopage olfactif garanti : une odeur de friture marine s’échappe de votre diffuseur suite à un passage rapide sur un site photo alors que vous êtes déjà en train de naviguer sur la page du nouveau parfum de Jean Baum… Dommage ! Espérons simplement que les fondateurs du site viedemerde.fr n’auront pas envie de faire ce saut technologique !

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Le passage à la nouvelle année à New York, au même titre que « Voir Venise et mourir » ? Je n’irai pas jusque-là, mais l’être humain, donc, moi, accessoirement, aime se dire qu’il a certaines choses à faire absolument : « c’est à faire au moins une fois dans sa vie ! ». C’est la formule consacrée, quelle que soit ladite chose. Et une fois la fois passée, il se dit ma foi, qu’il peut passer à autre chose, bon consommateur de rêve réalisé qu’il est.

Donc, dans ma liste c’est-à-faire-au-moins-une-fois-dans-ma-vie figure, ou plutôt, figurait : être à Times Square le réveillon du nouvel an, au milieu de la foule, sous les millions de confettis et les feux d’artifice, faire le décompte des dernières secondes de l’année avec des centaines de milliers d’inconnus, crier de joie au passage attendu, se sentir emporté par une vague salutaire de bonne humeur, d’exaltation et de simplicité… Vous savez, toutes ces choses que l’on voit dans les films, des comédies romantiques – je ne citerai que le cultissime Quand Harry rencontre Sally où l’on ne fait d’ailleurs qu’entendre la fête – aux films de science-fiction – un unique exemple aussi avec Strange Days qu’il serait de bon aloi de revoir aujourd’hui. Voilà comment l’on se retrouve à mettre : « Passer un réveillon du 31 à Times Square » sur notre liste CAFAMUFODAVI – un acronyme qui ne passera pas cette histoire…

La proximité aidant, 2010 était l’année indiquée pour rayer cette ligne de cette liste inventée. Envers et contre tout. D’abord, une tempête de neige sans précédent à New York quelques jours avant les festivités, puis différentes mises en garde ou tentatives de découragement : « ça fait 15 ans que je vis ici et je ne l’ai jamais fait, il y a beaucoup trop de monde », « c’est totalement inintéressant ! », « Oh la la, jamais je ne ferai ça, il y a un monde fou ! ». Croyez-vous que cela fasse changer d’avis quelqu’un qui souhaite ardemment réduire la longueur de sa liste CAFAMUFODAVI ? Non ! Bien évidemment. A peine cela ébranle-t-il sa motivation. Soit, il y aura du monde. Renoncer si près du but ne rimerait d’ailleurs à rien et il est toujours préférable de se forger sa propre opinion sur des événements aussi importants !

Après Otages de la nuit, Le tour du Cartier, que je vous invite à découvrir si ce n’est déjà fait, voici donc une nouvelle histoire photographique, La chute du mythe de Times Square ! Oui, oui, vous pouvez cliquer…

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