Photo-graphies et un peu plus…

Il n’y a vraisemblablement pas que moi qui ai été perturbée par la conférence d’hier, quand bien même cette photo a été prise avant hier (ce qui vous donne une nouvelle opportunité de lire Réconfortante quantique). Ce banal écureuil, gardien officiel de terrains de tennis pendant l’hiver, en est tout retourné. Mais qui se cache réellement derrière cette silhouette gracile suffisamment agressive pour vous faire douter de la sympathie des casse-noisettes envers l’espèce humaine ?

Flashback. Je prenais tranquillement des photos de petits monticules de feuilles mortes rassemblées par le vent lorsque je l’ai vu s’approcher de moi. D’abord, au sol. En se cachant plus ou moins derrière des bancs quand je le regardais. Puis, défiant partiellement les lois de la gravitation, à même la grille, se servant de ses griffes pour avancer avec une facilité déconcertante à la verticale. D’où deux questions. Le sang des écureuils ne converge-t-il pas au cerveau ? Et si tel est le cas, disposent-ils d’un système de circulation spécifique leur permettant de rester longtemps la tête en bas sans en éprouver la moindre gêne ? Je m’éloigne un peu, il me suit, et ainsi de suite sur une dizaine de mètres. Chaque fois que je me retourne, il est là, à m’envoyer son regard noir, à tel point que je commence à me demander s’il est capable de se jeter sur moi. Cette simple pensée me fait doucement sourire, car dans cette position, il faudrait au minimum un double salto arrière sans élan pour faire le bond nécessaire pour m’atteindre. Mais, depuis hier, je me dis qu’un certain nombre de choses habituellement inconcevables pour mes synapses, sont, en fait, tout à fait cohérentes. Admettons donc, par exemple, que l’on associe métempsychose et voyage dans le temps… Il se peut donc bien que nous ayons ci-dessus à faire à la réincarnation, 200 ans plus tard, du premier vrai voltigeur équestre de l’histoire du cirque, j’ai nommé Laurent Franconi, qui s’est un temps produit rue du Faubourg du Temple à Paris ! Auquel cas, je serais potentiellement moi-même Bulle, la jument sur laquelle il faisait ses acrobaties ! Cela me semble une explication possible à cette attirance animale… Il y a décidément beaucoup trop de trous de vers dans les parages !

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Une fois n’est pas coutume, j’ai décidé de participer à un concours photo. Sur le site du dit concours sont donnés quelques conseils photographiques aux postulants. On nous conseille de garder en tête la règle des tiers mais de rester créatif. Avec cette règle, il faut imaginer que notre image est divisée en 9 parties et la composer de telle sorte que ses éléments importants soient placés le long de ces lignes imaginaires ou à leurs intersections. On nous suggère aussi de recadrer nos images en fonction de cette règle. J’aurais, naïvement, pensé que les recadrages n’étaient pas autorisés… Et qu’un bon cadrage original faisait partie des critères pour juger de la qualité d’une photographie. Autre conseil : prendre nos photos à l' »heure magique », lever ou coucher du soleil, moments où la lumière est particulièrement chaude, rehaussant tout ce sur quoi elle arrive. Et, pour la touche de mystère, un petit bokeh, ce flou artistique d’arrière-plan qui enjolive tout. Je ne connaissais pas le mot, mais j’ai des exemples…

Bref, après Recette flash, voilà une nouvelle recette de photo réussie. Au vu de celle proposée ci-dessus, autant dire que je n’ai rien compris : la mienne est diablement penchée, on y cherche les tiers, elle a été prise à une heure où le soleil avait déjà déclaré forfait, et le bokeh est loin d’être salvateur. Pourtant, le mystère est là. Cette silhouette filiforme qui nous jette un regard encapuchonné, au bout de la ligne blanche, que l’on suit avec les yeux du début à la fin, comme pour mieux indiquer le chemin à suivre… « Suis-moi ! » lâche-t-elle, à peine audible. Vous n’êtes même pas vraiment sûr de l’avoir entendu… Peut-être l’avez-vous simplement pensé ? A l’heure où j’écris ces lignes, je n’ai pas encore réussi à déterminer si cette présence à l’horizon était inquiétante ou encourageante ! Si, en la suivant effectivement, nous allions tout droit au drame ou, à  l’inverse, à la révélation du positif. Car, la photo, construction picturale s’il en est, a aussi un sens… Trouver du sens, dans quelle mesure est-il important d’en faire un conseil ?

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A peine perceptible, dans cet entre-deux où les couleurs ont disparu, le spectre d’une jeunesse inconsciente, mais courageuse, se jetant dans le vide juste avant que la vague ne vienne se casser dans un fracas assourdissant sur la digue abrupte et menaçante. Et ainsi être certaine, à peu de choses près, d’avoir un minimum de fond sous les pieds lorsque ceux-ci, puis tout ce qui suit, viendront heurter l’eau. Le cœur tambourinant, silencieuse par la peur qui, malgré tout, est là, elle mesure à peine le risque qu’elle court en courant de la sorte… Derrière, dans l’ombre, hors champ, la jeunesse accompagnatrice vocifère, encourage, crie à la poule mouillée, quand, tétanisés, ceux qui l’ont déjà quittée depuis quelques années se demandent ce qui peut bien lui passer par la tête, tout en étant bien incapable de ne pas la regarder faire ces sauts de lange…

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J’ai longtemps cherché comment imager cette notion, celle de « s’oublier ». Envie, plutôt que notion d’ailleurs. Et encore, ce n’est pas exactement cela. S’oublier. Soi, évidemment. Assez rapidement, l’idée de s’effacer progressivement devant un monde qui, a contrario, deviendrait de plus en plus présent, m’est apparue comme le plus approchant de ce que je désirais illustrer.

Mais de simples nuages venant faire les fiers devant un soleil ardent, innocemment aidés par une brise légère mais décidée sont venus balayer les premières mises en scène imaginées. Là, accoudée à la balustrade, à mâter un horizon incertain, tantôt lumineux tantôt ténébreux, j’avais ma représentation. Mon ombre, l’ombre de moi-même, l’image de moi-même, et par extension, moi, disparaissant et réapparaissant au gré de la samba désordonnée des morceaux de ouate céleste. Des allées et venues qui ne se maîtrisent pas. Et un point final : s’oublier. De bas en haut, de gauche à droite. Ne plus s’avoir à l’esprit, ne plus se demander qui l’on est,  s’interroger sur le pourquoi du comment, sur le chemin à suivre, sur la route empruntée, bonne ou mauvaise… Lâcher prise avec cette conscience de soi inhibitrice. La plaie que soi parfois. S’oublier. Pour aller à l’essentiel. Pour passer à des choses plus concrètes, moins autocentrées. Agir. Et ainsi, avancer.

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Ocean Beach, San Francisco. Venant du cœur de la ville par Fulton Street, c’est déjà le bout du monde. La route se termine et de l’autre côté, on se retrouve seul face à l’infini de l’océan. Une langue de sable interminable désertée en semaine, probablement bondée le week-end, fait la transition. Ocean Beach… Avant même d’y poser le pied, je suis renvoyée vers la fiction. Un film. Dark City. Et cette plage dont tout le monde est capable de dire où elle se trouve, mais qu’il est impossible d’atteindre – le train ne s’arrêtant pas à la station. Un mirage, résidu de la mémoire de l’humanité en cours de manipulation. Shell Beach. C’est son nom. Ocean Beach a cet air de Shell Beach quand on sort du bus 38. A la différence près qu’on y arrive…

Et finalement, une fois les pieds bien ancrés dans les grains de silice, l’illusion s’efface, aussitôt remplacée par une autre impression à la vue de ce couple contemplatif. Celle d’être au Japon. Voyage tout aussi fictionnel que le premier, qui l’était par nature, puisque pays demeurant pour l’heure inconnu. Cela ne tient pas à grand chose. L’origine hypothétique du duo et puis, surtout, l’ombrelle. Cette ombrelle me rappelle quelque chose. Je creuse. En direct. Une image me revient. Une vieille femme, japonaise, s’accrochant à son parapluie, que la force du vent et de la pluie a pourtant retourné. C’est une affiche de film. J’en ai conservé une reproduction pendant des années, fascinée par ce face à face entre l’homme (la femme en l’occurrence) et la nature… Rhapsodie en août d’Akira Kurosawa. Même pas vu. C’est bien cette image que réveille la vision de cette ombrelle, même si les conditions climatiques sont ici plus clémentes. Et finalement, après Dark City, la fiction aura conditionné ma découverte du lieu du début à la fin… Etrange comme toutes ces images, réelles ou imaginées, se mêlent pour ne former plus qu’un magma sans cesse alimenté de représentations du monde.

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Des petits gravillons jetés à l’envi sur un bassin un peu trop d’huile… Un tsunami à échelle locale. Front d’ondes de cercles parfaitement concentriques venant grimer le reflet de quelques branches paisibles dessinées au couteau.

Mais grave, l’heure l’est effectivement si l’eau ne tombe plus lorsqu’on la met à la verticale… Il est quelques repères comme celui-ci qu’il ne faut pas bouleverser, sous peine de voir un monde entier s’écrouler. Voire s’écouler…

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… ma bonne dame ! 26 août et le vert des arbres se mue en un camaïeu d’orange… D’autres arbres sont déjà à l’étape de l’indécent effeuillage. Au sol se joue la symphonie des feuilles desséchées et craquant sous les pieds. On dirait qu’on marche sur des gâteaux secs. Réminiscence d’un bon Indiana Jones, les gâteaux secs étant, dans ce cas précis, des insectes. Les insectes, parlons-en ! Cela pourrait être le titre d’une manifestation nationale du Syndicat national des fabricants d’insectes, qui, évidemment, se tiendrait, dans plusieurs villes de France, à l’automne.

Sinon, aucun lien avec l’image… Qui, de toute manière, n’en a pas vraiment avec le propos puisque cette photographie a réellement été prise à la fin de l’automne. Donc, dans le passé, l’automne 2010 n’ayant pas encore débuté. Enfin, si l’on se réfère (et encore pour quelques siècles je pense malgré le dérèglement manifeste des saisons) aux équinoxes, car dans les faits, comme je le relevais précédemment, si. Bref. On fait dire ce que l’on veut aux images. C’est à la fois une richesse et la porte ouverte à toutes les manipulations. Reste que cette construction iconographique est à nouveau un de ces plans génériques qui hantent régulièrement mon inconscient… Ce qui n’a pas forcément de rapport avec le reste, sauf si l’on admet que cette prise de vue étant inconsciente, son choix pour ce duo l’est tout autant…

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Toute absorbée par l’originalité de la forme de la fenêtre de droite – mais peut-on décemment encore parler de fenêtre dans ce cas ? -, j’ai totalement zappé le vieux monsieur qui était derrière la fenêtre de gauche. Il ne s’est révélé qu’au visionnage des photos du jour. Il me regarde. Le sourire n’y est pas vraiment… Je ne suis certainement pas la première à m’extasier devant cette percée murale, ni la première à la photographier. Il se dit peut-être : « Encore une qui croit avoir découvert quelque chose ! ». Lui, c’est l’éternel voisin, derrière sa banale fenêtre rectangulaire, c’est celui que l’on oublie, ou que l’on ne voit qu’après. A posteriori, je ne sais plus quel regard est le plus intéressant : celui, épieur, du monsieur, ou celui, plus mécanique, de la fenêtre à l’allure d’onomatopée ?

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Paris. Un classique soir d’hiver dans le 9e arrondissement. 14°C. Ou peut-être 13. Les lampadaires ont été remplacés par des ampoules géantes. La rue est ridiculement étroite. Je l’emprunte pour cette raison. J’ai des affinités non élucidées avec ce type de voie, j’en ai déjà parlé. Autant dire qu’avec la pluie, la nuit, les reflets, la silhouette et le parapluie, je suis aux anges.

Un polar ? Oui, j’ai peut-être été marquée par un polar étant petite. Ou alors, j’ai été abandonnée un soir de pluie, dans une vie antérieure, et cette image de personne s’éloignant dans la pénombre est celle que j’ai gardée de ma famille d’alors ? Cet événement tragique a laissé en moi une empreinte karmique indélébile (oui, je suis devenue bouddhiste entre temps) et, aujourd’hui, chaque fois que je me retrouve dans un tel environnement, j’ai une petite décharge… Je crois qu’il va surtout falloir creuser encore un peu.

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Et réciproquement. Pendant quelques minutes, cette baigneuse vespérale demeure là, face à l’horizon, figée, les pieds rafraîchis par le va-et-vient de la mer descendante. Autour d’elle, les vagues prennent aussi leur temps, s’allongent sur le sable, s’enroulent élégamment. Elle est seule, dans sa bulle de contemplation, enrobée par le doux mais incessant bruit du ressac. Trois mètres derrière elle à peine, un tumulte dont elle n’a, il faut l’espérer, que vaguement conscience. Une balade post-dînatoire organisée : des joggers, des familles entières ou partielles, des badauds, bavards, se croisant et se décroisant sur la digue, et s’émerveillant devant les deux trois courageux qui osent encore se mouiller à cette heure avancée et venteuse de la soirée.

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