Photo-graphies et un peu plus…

Le temps, a dit le physicien Richard P. Feynman un beau matin, c’est ce qui se passe quand rien ne se passe. Un Prix Nobel ne doit pas dire que des bêtises… Même si d’autres empêcheurs de tourner en rond le définissent d’une manière diamétralement opposée, j’aime bien cette idée, que, quoi que l’on fasse, que l’on s’affole ou que l’on s’affale, pour le temps, objectivement, c’est du pareil au même… Il s’écoule, imperturbable, imperméable aux douceurs comme aux coups, même s’il en réserve à tous ceux qui le vivent. Et donc, vivent.

On a pourtant parfois l’impression qu’il triche un peu, qu’il cherche à casser le rythme, et se pose, de temps en temps, en des lieux très particuliers, un peu à l’écart du tumulte, à l’abri des regards, pour mieux se ressourcer… Comme sur ce carrelet accroché à l’estuaire de la Gironde, toujours debout et fier malgré les tempêtes, les crues, les passages et les années… Regardez-le, assis sur le banc, bercé par le bruissement des feuilles ballotées par le vent et le craquement du bois sous son poids, celui des années. On s’attendrait presque à voir les poissons se jeter directement sur le ponton, tant la sérénité y est palpable…

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Absolument pas ! Authentique relique britannique en plein cœur de la Méditerranée, sur une île anciennement annexée par l’Empire qui y a laissé quelques habitudes… Ses très symboliques cabines rouges donc, ses petits déjeuners bacon-œuf-haricots rouges, mais aussi sa conduite à gauche, sans le flegme qui lui est, sous d’autres latitudes, attaché.

Le duo subtilement éclairé formé par cette cabine, posée au beau milieu de la placette devant le tronc d’un arbre aux branches protectrices, et ce banc vert en fer forgé fraîchement repeint, accueillant, semble tout droit sorti d’un musée à ciel ouvert… On tourne autour sans vraiment pouvoir l’approcher. Une certaine solitude s’en dégage. Nostalgie peut-être. La cabine, qui permet de garder un lien avec des personnes éloignées ; le banc, qui, à l’inverse, unit les êtres déjà proches. Aujourd’hui, on les dirait abandonnés. Leurs couleurs vives les inscrivent encore dans le présent, mais la distance qui nous sépare d’eux transforme le tableau en photographie tirée d’une époque ancienne…

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Se perdre dans une ville inconnue est un vrai délice. Enfin, se perdre… Je m’entends… La découvrir sans plan, sans idée préconçue, sans s’imposer de visiter tel ou tel lieu supposé emblématique comme il l’est dit à la page 32 de notre guide, la découvrir sans la pression du temps qui passe et ce souci qu’il fait naître de tout voir, surtout ce qui est « à voir »… Chaque croisement conduit alors à une unique question : gauche ou droite ? Un véritable apprentissage du choix, s’appuyant sur des raisons différentes à chaque fois selon l’humeur du coin : la mer au bout, du monde qui passe, un reflet d’arc en ciel dans une fenêtre, l’étroitesse d’une rue, des enfants qui jouent, une étrange vitrine, un rideau rouge flottant au vent, jusqu’à rien… Oui, visiter une ville en ne choisissant d’aller que dans les rues où il n’y a personne. La quête de solitude peut en effet être un objectif du promeneur faussement égaré…

Se balader dans une ville inconnue, sans autre but que celle de la parcourir, c’est un peu comme se promener sur les lignes de sa main… sur sa ligne de vie en l’occurrence… On ne sait pas trop où on va, on ne sait pas, qui d’elle ou de la vie, nous conduit vraiment… Elle est là, apparemment bien droite, bien marquée, bien longue, évidente. Mais en s’approchant un peu, on aperçoit quelques ramifications. La ligne s’affine, se gondole, s’écourte puis se termine… La marque de nos choix ? Gauche ou droite… Comment savoir sur quelle portion de ligne conduit tel choix ? Et puis, ces choix, ont-ils déjà été faits ou sont-ils à venir ? A ce moment, on se dit qu’il aurait quand même été bien pratique de naître avec une échelle sur la main… Au moins, on aurait eu un indice sur le moment…

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Certains reviennent de leurs voyages avec des photos de vacances… De mon côté, je réalise que, de plus en plus, je m’extrais de mon sommeil assaillie de photos de rêve. Pendant les quelques minutes suivant mon réveil – ensuite tout s’évanouit – je me souviens m’être baladée dans des contrées imaginées, amalgame de paysages connus et irréels, allant à la rencontre de parfaits inconnus ou d’avatars d’anciennes connaissances. Toujours avec l’appareil en bandoulière, déclenchant là où je le ferais s’il s’agissait d’un véritable voyage… Il arrive que ce tourisme de mon inconscient me fasse remonter le temps… Et jusqu’à aujourd’hui, c’est toujours vers le passé que je me suis tournée… Un passé que je n’ai pas vécu pour autant… Mais là n’est pas le plus curieux ! Il y a quelques jours, en transférant mes photos du jour sur mon disque dur, l’opération a subitement été stoppée. Certaines images bloquaient… J’ai finalement réussi à les extraire de l’appareil… Comment dire…  J’avais  comme une sensation de déjà-vu, mais aussi la certitude de n’être jamais allée là « en vrai »… Impossible ! Tout dans l’image relevait du passé, les couleurs, les vêtements, les coupes de cheveux, les enseignes… Puis j’ai compris : mes photos de rêve devenaient réalité…

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Etapes de vols imperceptibles à l’œil nu saisies par l’extension de mon regard. La photo, qui enregistre parfois le mouvement, peut aussi le capturer, le stopper net, comme si elle avait le pouvoir d’arrêter le cours du temps pour nous montrer ce que nous ne sommes pas en mesure de capter en temps réel. Comme si un simple clic-clac nous ouvrait les portes d’un autre niveau de réalité. Tout semble alors immuable. Cela donne à cette image une impression insensée, quasi contre nature.

Des oiseaux, des pigeons pour être juste, chacun figés à une phase différente de leur vol, formant un ensemble erratique dans le ciel, convergeant malgré tout vers un unique et même but : attraper ces quelques miettes de pain jetées à la volée par un généreux maltais. On pourrait croire qu’ils ont été posés là, juste pour l’image. Mais posés sur quoi ? On s’attendrait presque à les voir tomber, comme s’ils se réveillaient subitement d’un doux rêve dans lequel ils se seraient échappés des vitrines de la maison Deyrolle. Tout est en fait parfaitement maîtrisé, tout est en fait parfaitement normal… Et le vol, n’est-il pas ce chemin parcouru pour atteindre un objectif fixé, enchaînement de pas dont on n’a pas toujours conscience et rendus invisibles par notre impatience, mais qui existent bel et bien ?

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Le train-train quotidien n’a-t-il pas une toute autre saveur lorsque le ciel est bleu, que le soleil chauffe déjà depuis longtemps à l’heure où le réveil sonne et que les hirondelles en sont aux essais de moteurs zélés (ah ah) pour les 24h du Mans locales ? Les fenêtres sont grandes ouvertes, chacun hésite entre telle chemise verte à manche courte et telle jupe bleue légère, se dit qu’il serait grand temps d’acheter des nus pieds (en déplaise à nos chaussures rouges à tous), car cette fois-ci, c’est sûr, l’été s’installe pour de bon…

Le beau temps fait passer presque toutes les tracasseries habituelles, celles qui auraient énervé un jour de pluie, comme si chacun se mettait dans une bulle de tolérance inédite. Nous voilà donc très météo-dépendants, ce qui n’est pas nouveau et même un phénomène très connu des habitants des pays scandinaves et du grand nord en général où les jours s’allongent à faire disparaître la nuit, et inversement. Aujourd’hui, nous allons tous dire : « C’est super ce beau temps ! », « ça fait du bien après cet hiver qui n’en finissait pas ! », « et ce week-end, c’est pareil ! C’est vraiment l’été cette fois-ci »… Aujourd’hui, nous allons peut-être « se faire une terrasse », ou « se faire un pique-nique » sur les quais de Seine en fin de journée comme tous ceux qui se seront dit ça le matin en pensant qu’ils seraient seuls à y avoir pensé. Mais ce n’est pas grave ! Aujourd’hui, il fait beau, tout le monde accepte de tourner un peu pour trouver sa place… au soleil.

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Il peut arriver au faiseur de photo d’être frustré de ne capter « que » l’instant lorsqu’il déclenche. Qu’il achète une caméra, pourrait-on lui lancer ! Oui, sauf que, le faiseur de photo ne veut pas forcément enregistrer le mouvement pour autant… Ce qui l’intéresse parfois, c’est de capturer la trace laissée par le temps qui passe, comme des rides sur le visage ou la lumière se faufilant un chemin à travers le feuillage sur un plan d’eau. Temps de pause. Des canards qui batifolent hors champ, une eau qui se met à onduler, des reflets qui dansent de façon anarchique. L’expectative. On ne sait jamais quelle image va découler de ces concours de circonstances ou rencontres hasardeuses d’éléments issus de mondes parallèles et au cours desquels le faiseur de photo accepte de perdre la main.

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… et du ciel bleu, comme tout lundi qui se respecte. Evidemment, certaines personnes n’aiment pas le lundi. Notamment car c’est le jour de retour au travail. Je leur ferais donc une toute petite suggestion : qu’elles fassent débuter leur semaine au dimanche. Par un jour chômé donc. Changement total de perspective ! Cette légère translation, qui vaut ce qu’elle vaut, ne devrait gêner personne par ailleurs.

Certains ont ainsi des jours préférés, un peu comme avec les parfums de glace ou la forme des escaliers… Ce n’est pas mon cas, bien que j’apprécie particulièrement les escaliers en colimaçon en fer forgé. Personnellement, et là, j’assume totalement mon fayotage auprès du Maître du temps : j’adore les lundis, les mardis aussi, les mercredis, les jeudis… bref, tous les jours de la semaine, qu’il fasse beau, qu’il pleuve, qu’il neige, qu’il vente… bref, par tous temps. En revanche, j’ai un léger différend avec lui sur la perception du temps qui passe. Là, il faut bien l’avouer, c’est l’anarchie  la plus totale ; je dirais même plus : c’est le chaos ! C’est vrai, une journée fait 24 heures quoi qu’il arrive, pas une seconde de plus ou de moins ! Alors, comment expliquer que certains jours semblent s’éterniser quand d’autres, filent à la vitesse de la lumière ? Tout dépend de ce que l’on fait, me dira-t-on ! Certes, mais ce n’est pas si simple : ne rien faire peut aussi passer très vite… Il y a là quelque mystère à élucider… Mais pas aujourd’hui !

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Non pas à voyager dans le temps, mais à laver le temps… Quelle action de la machine à laver sur notre passé ? La chronologie des événements constituants notre vie est bouleversée. Programme long, linge sale : le passage du passé à la machine fait disparaître les mauvais souvenirs, ces tâches, parfois persistantes malgré les lavages de cerveau, incrustées dans notre parcours.

Le présent dans la machine à laver avance tambour battant ! On ne le voit pas filer, il rebondit partout, s’agite, balloté de gauche à droite par les événements. Vite, il est submergé. Programme express.

Pour le futur, le rythme change… Il faut y aller doucement, lentement mais sûrement comme on dit, il faut le ménager, le respecter, le préparer. C’est un peu la soie de la vie, que le temps tisse avec opiniâtreté. Un jeu d’endurance pour ne pas épuiser la matière trop rapidement. C’est sensible, le futur. Programme délicat, donc.

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… réservent parfois d’étonnantes surprises. De bonnes surprises ! Je ne parle pas ici d’hygiène ou de propreté, mais de décoration (volontaire ou pas), de mise en scène, d’attention particulière pour ce lieu « propice », comme le qualifiait l’une de mes anciennes professeurs de français au lycée. Je suis d’ailleurs étonnée qu’il n’existe encore aucun guide des plus originaux « restrooms » parisiens. Un petit Lonely Planet serait même idéal pour cet endroit ! Des hordes de visiteurs ne fouleraient le seuil de cafés, bars, restaurants que pour le plaisir de pousser la porte du fond ou de descendre quelques marches, et ainsi, pouvoir s’extasier devant la joliesse de ce que, souvent, on néglige. Pourtant, chacun y passerait 6 heures par mois soit 3 jours par an. Certes, c’est une bagatelle comparé au temps passé à dormir (1/3 de notre vie), mais quand même !

Bref… Revenons à l’image du jour : elle fait partie de la section « décoration involontaire ». Ce superbe carrelage tapissant la descente et les murs du sous-sol où se trouvent le lieu-dit appartient à un petit bar sans prétention du Boulevard des Italiens, ce qui est déjà en soi un exploit (le sans prétention)… A l’étage, à siroter une menthe à l’eau, on ne s’y attend absolument pas. A posteriori (ah ah), ce n’est pas étonnant, la place ayant conservé son ambiance originelle… La banale transition aux toilettes se transforme alors en vraie expédition… Je disparais quelques minutes avec mon appareil et prends les escaliers sous tous les angles. Heureusement, dans cet intervalle de temps, personne ne s’y rend. La rencontre aurait eu quelque chose de saugrenu. En remontant, j’arbore un sourire relâché n’ayant rien à voir avec la fonction primaire de ce lieu d’aisance.

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