Photo-graphies et un peu plus…

On a l’habitude de dire « Qui se ressemble, s’assemble ! » (c’est même prouvé scientifiquement, c’est dire !) mais je ne pensais pas que cet adage était aussi un critère de choix, inconscient a priori, du banc sur lequel s’asseoir pour sa pause déjeuner. Cela ne vous échappera pas – en tout cas, cela m’a sauté aux yeux quand ils ont dérivé dans leur direction -, ces deux femmes portent des vêtements aux couleurs strictement identiques, chaussures comprises. Elles seraient en jean des pieds à la tête, comme beaucoup de gens aujourd’hui, je n’aurais même pas sorti mon appareil photo. Mais là, avouez que cette association bleu marine / vert empire n’est pas des plus fréquentes et méritait donc son déclenchement ! Le fait qu’elles se soient assises chacune à une extrémité du banc me fait penser, d’une part, qu’elles ne se connaissent pas – si c’était le cas, elles seraient plus proches l’une de l’autre et en train de disserter sur leur télépathie vestimentaire à grands coups d’éclats de rire -, et, d’autre part, qu’elles ne se sont pas regardées du tout avant de s’asseoir – sinon, l’une au moins aurait opté pour un autre siège en remarquant cette étrangeté… Il s’agit donc là d’une extraordinaire coïncidence comme on en croise peu, de celles qui chatouillent toujours un peu l’imaginaire…

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La trêve verbale est terminée. Les mots reprennent leur territoire virtuel !

Croiser une personne connue ou membre du cercle des 6 degrés de séparation à un endroit totalement incongru est toujours un moment fascinant. Comme si le monde était petit, ce qu’il n’est évidemment pas, n’en déplaise aux Enfants du Paradis même si c’est de Paris dont il s’agit alors. Ces convergences – rares – ont ce petit goût de magie que l’on aime associer à certains événements de notre vie. Pourtant pas statisticien, on se prend alors à calculer – ou du moins à faire semblant – la probabilité de survenue de cette rencontre avant de statuer fièrement qu’elle est nulle. Mais voilà, contre toute attente et toute logique, les chemins se sont croisés. Sur Hollywood Boulevard à Los Angeles, sur la route des étoiles donc, un mercredi après-midi d’août ensoleillé, je tombe nez à nez avec des voisins de Vancouver. A Seattle, où les nuits ne sont pas toutes blanches, dans une file d’attente pour un concert, encore un choc frontal avec une personne rencontrée une poignée d’années auparavant à San Francisco. A Hawaii, sur une plage de Kauai au coucher du soleil, les pieds nus dans le sable humide et doré en direction de l’océan, un couple en sort. Nouvelle hallucination ! Nous nous sommes vus pour la première fois la semaine précédente, à Hilo, sur une autre île, alors que nous faisions du couchsurfing chez le même hôte. Rebelote le lendemain sur un chemin de randonnée, ce qui déclenche la prise d’un rendez-vous fixe, maîtrisé, non laissé au hasard cette fois-ci pour en savoir plus… Ce « Pour en savoir plus » nous apprend que nous avons des amis communs. Là, comme ça, à l’autre bout du monde…

Et voilà que la chose s’est reproduite, différemment, à un autre bout du monde (par chance, il y en a plusieurs). Plus polaire. A Tromso. 69°N 18°E. Au nord nord de la Norvège dont le nom porte lui-même la nordicité (excusez du québécisme). Rares sont les villes plus au nord encore. A cette période de l’année, il y fait nuit toute la journée. Ce qui ne signifie pas que la zone est plongée dans une totale obscurité toute la journée non plus. Le soleil ne daigne pas se soulever plus haut que l’horizon mais ses éclats lointains viennent « éclairer » les alentours trois heures par jour… Ce qui laisse 21 heures de vraie nuit ! C’est beaucoup pour nous autres qui sommes habitués à un peu plus d’équilibre entre le jour et la nuit (ce qui me fait penser que les Norvégiens ne doivent pas utiliser l’expression « C’est le jour et la nuit ! »). Bref, à un moment de la journée, un besoin de lumière, même artificielle, se fait sentir.

Or, Tromso a une belle bibliothèque moderne, claire et lumineuse. Un phare dans la nuit polaire. Je pousse la porte d’entrée et suis accueillie par une très agréable chaleur qui me fait ôter bonnet, gants, écharpe, manteau, sous-gants (non, il ne fait pas si froid). Face à moi, une colonne de presse internationale. Je cherche les canards français ayant pignon sur rue dans cet antre du savoir de la ville. Il n’y en a qu’un : Le Nouvel Observateur. Et ce n’est même pas le plus récent. Je l’extrais de son étagère et l’ouvre au hasard. Page 13. Oui, oui, page 13. Je suis médusée. Sur la photo, un ami. Kristophe Noël, mon compère de Médyn et d’autres aventures artistico-photo-littéraires. Là, le type replié sur lui-même pour illustrer un article sur l’autisme qu’il n’est pas, c’est lui. J’en doute alors qu’il n’y a aucun doute à avoir. C’est lui. Comme un film que je rembobine, je me vois choisir d’aller à Tromso pour voir des aurores boréales, entrer dans la bibliothèque pour me réchauffer, prendre Le Nouvel Obs par curiosité d’une francophone en terre étrangère et enfin l’ouvrir, juste comme ça et tomber sur  Kristophe Noël. C’est fou non ? Il y a toujours une interrogation qui filtre dans pareilles circonstances : les coïncidences ont-elles une raison ?

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