Photo-graphies et un peu plus…

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Que c’est beau ! Prochaine destination de voyage ? Plage de sable blond, mer tranquille, ciel bleu aux nuages inspirés… Vous vous y voyez déjà. La petite silhouette qui se détache à l’horizon, c’est vous. Vous en êtes sûr. Mais, ne vous emballez pas ! En bas sur le côté, en tout petit, si petit que l’on ne le voit pas, une petite astérisque mentionne que la photo n’est pas contractuelle. On nous vend du rêve, on nous offre ce que l’on veut voir. Tant pis si, sur place, la pluie est au rendez-vous, si la plage est recouverte d’algues et de bouteilles plastique en fin de dérive océanique, et si une voie ferrée (obsession passagère, ah ah) passe juste de l’autre côté de la barrière de palmiers, venant régulièrement interrompre votre quête de sérénité. Vous y avez cru à un moment, vous avez acheté votre billet et c’est parfois l’essentiel. Un mauvais pli pris parfois par les musées aussi…

Il serait de bon ton d’exporter ce concept d’astérisque aux conférences et séminaires, qui, d’une autre façon, nous vendent (gratuitement certes) du rêve, à travers des mots, des titres et des formulations susceptibles d’attirer le curieux… Bien caché : programme non contractuel. Un exemple. Octobre 2008. « Le futur a-t-il un avenir ? » séminaire organisé par le Centre Pompidou. Journée réjouissante, sur le papier, avec un parterre de connaisseurs sur la scène, des thèmes promettant des échanges passionnants… Qui, dans la réalité, s’effondre comme un soufflé à la cuisson interrompue par la curiosité du gourmand. La moitié des invités est absente. Ils s’excusent. Conférence annulée. L’autre écourtée. L’autre totalement réorientée faute de combattants. Si le futur a un avenir, par nature, le présent ne semble pas en avoir. La salle est progressivement désertée au fur et à mesure que les heures passent. Comme hier. Dans cette petite salle du département Media de McGill. « The human after the post-humanist critique or, the fantasy of Interspecies Ethics ». Impatience. Evidemment, à lire ce titre, on ne s’attend pas à assister à une conférence portant exclusivement sur les animal studies et à voir des photos de chiens (même pas des robots) parsemer la présentation. Non, on ne s’attend pas à entendre parler des théories, notamment de Derrida, sur les relations entre l’homme et l’animal, sur les droits des animaux… Certes, c’est sûrement intéressant mais le fait est que ce n’est pas ce que laissait entendre l’annonce. Par conséquent, l’attention se dissout totalement (Mayde, Mayde, décrochage imminent ! John, je crois qu’on l’a perdu ! Cerveau inactif sur les radars…), la succession de mots prononcés dans une langue étrangère se muant en une sorte de musique d’ambiance imposée. Evidemment, a posteriori, lorsque l’on relit attentivement la présentation habilement complétée entre le jour où on a mis une croix dans notre agenda et le jour J (et que l’on n’a pas re-regardé malheureusement), on peut comprendre qu’elle risque de prendre une autre tournure que celle instillée par le titre. C’est le danger à assister à une conférence avec des idées précises sur son contenu potentiel. Je vais guetter donc la prochaine série sur la communication grand public, peut-être y parlera-t-on de publicité mensongère ?

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50 mètres. C’est la longueur du premier « vol » effectué par Clément Ader le 9 octobre 1890 à bord d’Eole, l’engin qu’il a fabriqué en s’inspirant de la chauve-souris. Sans doute n’imaginait-il pas, à ce moment, que son invention allait, deux siècles plus tard, révolutionner notre appréciation de l’espace, du temps et au final, du voyage.

Aujourd’hui, l’avion, mot bizarrement créé après celui d’aviation, nous mène à l’autre bout du monde en quelques heures (ce qui, soit dit en passant, semblerait dire que le monde a un début et une fin, alors que nous avons déjà vu dans Et pourtant, elle tourne qu’il n’avait même pas de sens). Bref. Ainsi, très rapidement et sans transition, il est possible de se retrouver à un endroit où la langue, la culture, la température, l’heure, les coutumes sont totalement différentes de celles que l’on connaît. Un jour, vous êtes piégé dans les embouteillages à cause de la pluie qui ne cesse de tomber depuis 2 jours, et quelques heures plus tard, vous êtes sur une plage de Bali en train de siroter un cocktail de fruits frais sur un air de java… D’un certain point de vue, c’est de la magie. Une magie qui a largement contribué à démocratiser, voire banaliser, le voyage. Aussi bien le fait d’être ailleurs que le déplacement en lui-même.

Ainsi, lorsque, las de cette instantanéité, on se prend à préférer le train à l’avion, tout semble rentrer dans l’ordre. Qu’importe s’il faut 12 heures pour parcourir 263 kilomètres ! Pour une fois, ce n’est pas le ratio temps / action qui compte, mais le moment, l’instant. Que gardons-nous en mémoire d’un vol de 12h ? Les trous d’air, effrayants ; la nourriture, mauvaise ; la clim’, trop froide ; le film, nul ; le petit derrière, exaspérant… Que gardons-nous en mémoire d’un trajet en train de 12h ? Des paysages splendides, riches et variés ; une rencontre inédite avec des personnes différentes et avec leur culture ; des découvertes culinaires à chaque station vendues par les habitants des villages traversés ; une autre perception de notre temps et de celui des autres. L’un comme l’autre sont fatigants, mais, entre les deux, quand on a le choix, y a pas photo !

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Ce n’est que dans un deuxième temps que l’on voit les cinq petites silhouettes féminines et enfantines se détacher du chemin sur la droite. Et ce n’est donc qu’après les avoir vues que, estomaqué, l’on retourne aux tiges pour tenter d’en extrapoler la taille en ajoutant, virtuellement, les personnes les unes au dessus des autres. 1, 2, 3…, 9, 10, 11, on peut en mettre 11, 12 peut-être. Nous ne sommes décidément pas grand chose aux côtés de simples bambous sauvages…

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Non, non, ce n’est ni une erreur, ni un oubli, ni une blague… Ce rectangle, qui accueille habituellement une image, une vraie, est vide, blanc comme la neige pas encore foulée ou comme une feuille sans inspiration. Il ne s’agit ni de lune ni de loutre. Ce cadre est vide mais, en réalité, il est plein. Plein d’une catégorie très particulière de photographies : celle des photos pas faites (ou PPF, prononcer ppf comme un pff de dépit). Les raisons sont aussi nombreuses que les pétales d’une rose rouge : appareil oublié ou laissé sur la table du salon pour une fois, manque de réactivité, lumière insuffisante, panne de batterie, plus de pelloch (dans l’ancien temps), manque de courage, d’audace, respect de l’autre, que sais-je.

La ppf, c’est un peu comme la malédiction du coup de genou dans le coin gauche de la table basse décidément très mal placée. C’est un truc qui nous arrive inévitablement sans que l’on puisse prévoir quand exactement, qui ne fait pas toujours trop mal sur le moment, mais qui, au bout de quelques secondes, déclenche une douleur aiguë qui se propage dans tout le corps. Pour résumer, on déteste. Car forcément, cette photo pas faite est celle que l’on aurait aimé faire, celle qui aurait été hissée dans le top 5 des photos de l’année en cours.

La photo pas faite est une photo parfaite, parce que, justement, on ne peut que l’imaginer. Ce qui révèle un autre avantage de la ppf : elle ne s’oublie pas, contrairement à toutes celles que l’on a faites, que l’on a quelque part, sur un support virtuel ou réel, et que l’on s’autorise à effacer de notre mémoire car on sait que l’on peut la réactiver en ouvrant un album ou un dossier. La photo pas faite, on la garde en soi comme un coffre dont on serait le seul à avoir la clé, on la préserve comme un tableau de maître, on la regrette comme un match injustement perdu, et lorsque l’on réalise que l’on est en train de ne pas faire une photo, toutes les photos pas faites viennent défiler sur un écran virtuel situé à 5 cm de nos rétines éplorées.

Là, présentement, j’ai trois ppf derrière mes yeux clos. Ce qui signifie qu’il y a eu un récent épisode de ppf. Cet après-midi en fait… La première du trio du jour remonte à quelques années. Direction le Sri Lanka, sur la côte sud. L’océan indien à quelques mètres. Le village vient d’être lessivé par une grosse averse. Les gros nuages, vêtus d’un camaïeu de gris, sont progressivement chassés du village par le vent, tandis qu’un soleil bas, mais plus fort que jamais, réussit à se faire une place dans ce ciel encore chargé. Ses rayons viennent faire briller les feuilles arrosées des palmiers, miroiter le bitume des routes, éclater le blanc des murs, réfléchir les pare-brises des tuk-tuk, vaciller les couleurs des saris… Une splendeur. J’ai laissé mon appareil sur la table. Une deuxième, il y a quelques mois. Paris. Dans un bus, dans la circulation à Saint Michel. Il y a du monde, je suis coincée debout, près d’une vitre. Regardant en direction de la cathédrale Notre Dame, je vois arriver une voiture décapotée, avec, religieusement posé à cheval entre les sièges arrière et avant, un grand crucifix, renvoyant des petites étincelles de lumière à cause du soleil, et le Christ tourné vers le ciel, quand même. Et au volant, un homme en noir, un abbé médiatique, le plus médiatique d’entre eux. Là, devant moi, une décapotable, un crucifix, un abbé au volant, la cathédrale en arrière plan. Une conjonction d’éléments tellement parfaite que photo pas faite. Ppf. Manque de réactivité. Et là. Vieille ville. Où l’on offre, moyennant finance hein, des tours du quartier à bord d’une calèche tractée par deux beaux chevaux. Bien assis dans le fauteuil, un couple de personnes âgées regardant distraitement à gauche et à droite. C’est surtout lui qui accroche mon regard : bien portant, visage rougi, cheveux blancs et surtout une très longue et touffue barbe blanche. Calèche (ou traîneau, c’est un peu pareil), instantanément, je pense au Père Noël (que dis-je, je dis « Père-Noël ? » à voix haute), en repérage incognito avec Mère Noël. Mais je l’ai reconnu ! C’était tellement flagrant que … photo pas faite. Plus assez de lumière ! Ppfffffff….

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Il faut l’admettre, lorsque nous allons au cinéma, notre premier geste à la fin du film est plutôt de rallumer rapidement notre téléphone portable – sait-on jamais, Lady Gaga nous veut peut-être absolument dans son prochain clip ! – que de lire les génériques… Pourtant, ces derniers, de véritables court-métrages pour certains… Ouverture d’une probable longue parenthèse, qui explique que la phrase précédente n’est pas finie : est-ce que cela existe d’ailleurs, un Festival de génériques où, comme son nom l’indique, ne seraient présentés que des génériques de films, avec des palmes etc. En fait, les prix seraient des Plumes… Le générique, n’est-ce pas ce qui permet à un film de prendre son envol ? Plumes d’or, plumes d’argent… Le meilleur récolterait la Plume d’Oie, car les oies sont sacrément voyageuses. Mais, dans le cas présent, il s’agit de générique de fin. Et, définitivement, leur objectif n’est pas d’être créatif, mais informatif. L’un n’empêche pas l’autre, évidemment, mais là, n’est pas la question.

Fin de la parenthèse et suite de la phrase interrompue. …pour certains, réservent parfois quelques surprises. C’est par exemple le cas de celui de L’arbre de Julie Bertuccelli. Tout se déroule tranquillement, comme un générique en somme. On y est plus ou moins attentif… Et puis, sans prévenir, la juxtaposition de trois mots attire le regard. Le générique étant malgré tout un élément assez court d’un film (puisqu’il n’est regardé que par 1% d’une salle), en général, le temps de remarquer quelque chose correspond aussi à celui où il disparaît de l’écran. On reste donc un peu sur notre fin… En l’occurrence, « casting de l’arbre ». On se doute que dans un film s’intitulant L’arbre, l’arbre en question est un personnage à part entière. Et quel personnage ! Cet arbre géant et tentaculaire est absolument magnifique et toute personne normalement constituée devrait tomber sous son charme, même si ce n’en est pas un (c’est un figuier de la baie de Moreton, endémique à l’Australie. En tout cas, dans ces proportions). Il est donc tout à fait logique que certaines recherches aient été faites pour le dénicher ! De là à être casteur d’arbres ! Une révélation ! Parcourir le monde pour trouver un arbre ! Cela me semble être une quête pleine de sagesse… Qui conduit à une nouvelle surprise : la star du film a ses racines bien ancrées à quelques kilomètres de Brisbane. Ville citée totalement par hasard dans le Et pourtant, elle tourne d’hier…

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Est-ce que la fin du monde ressemble à ça ? Si oui, force est de constater qu’elle revêt des atours terriblement attirants… D’aucuns crieront au trucage, à la colorisation maladroite. J’avoue un traitement croisé à l’origine (sur de la vraie pellicule) : des contrastes accentués, des couleurs plus fortes, mais pas de modifications de tonalités ! L’embrasement du ciel était bien réel sur cette plage mordorée puis rougie de la rive sud du Sri Lanka… Le sentiment de petitesse qu’il a fait naître encore plus. Des photos presque oubliées, stockées, comme beaucoup d’autres, dans une quelconque boîte à chaussures, ou peut-être de papier Ilford (le summum du luxe), exhumées et scannées à l’occasion d’un départ.

Quelques années ont passé. Et pendant cet intervalle, ce qui était un spectacle à la beauté à couper le souffle s’est mu en fureur océanique. Un tsunami. Le tsunami. Celui du 26 décembre 2004. Provoqué par le 4e plus fort séisme enregistré dans l’histoire de l’humanité et atteignant jusqu’à l’Afrique du Sud. Sortir ces images de leur cachette ne ravive alors pas seulement les souvenirs vécus, cela soulève aussi une foule de questions sur ce qui ne l’a pas été : cette plage-là a été touchée, c’est certain ; les palmiers joliment balayés par un vent bienveillant ici probablement arrachés… Mais que sont devenues les personnes rencontrées, celles-là dont la maison donnait directement sur la plage ? Ces interrogations sont désormais attachées à ces images comme une abeille sur du miel. Et l’impression initiale de fin du monde prend alors une toute autre tournure…

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Il est des mots que l’on aime particulièrement, essentiellement du fait de leur sonorité. Ephémère, funambule, éclipse… En les lisant à voix haute, j’ai la sensation d’être transportée dans un pays où la musique est faite de mots. J’ajoute à cette micro liste la libellule. Libellule, libellule, libellule… Qui ferait aussi partie d’un top 10 à définir. Un mot qui ne s’utilise qu’avec parcimonie pour la citadine que je suis, les libellules ne faisant que trop peu partie du paysage urbain classique… De fait, c’est toujours un enchantement de les croiser et de pouvoir s’exclamer : « Oh, une libellule ! ». Avec ce corps si fin et irisé, ces longues ailes translucides, cette habileté dans le vol (elles battent des ailes 40 fois par seconde), on les croirait sorties d’un livre de conte pour enfants. Un conte un peu osé, il faut l’avouer, mais tout cela est très allégorique !

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