Photo-graphies et un peu plus…

Voir ou dormir...

C’est un peu comme cette phrase que l’on relit indéfiniment sans réussir à la finir car le sommeil nous prend de court en chemin et nous empêche d’aller au bout, ce qui reste le meilleur moyen de passer à la phrase suivante et, à terme, de terminer un livre. Si s’endormir sur une phrase voire un passage peut être frustrant, cela n’est pas dramatique pour autant : le lendemain, à la même heure et même à toute autre heure de la journée, il suffira de revenir à la même page et à la même ligne pour se retrouver là où l’on s’était arrêté la veille et poursuivre la lecture. Ne pas avoir achevé ladite phrase la première fois ne l’aura pas faite disparaître (ce qui pourrait être un concept en soi) !

En revanche, fermer l’oeil trois secondes à l’occasion, par exemple, d’un voyage en train et voilà que ce que vous n’avez pas vu pendant ce court laps de temps est derrière vous à jamais. Vous auriez beau refaire le même trajet le lendemain à la même heure, tout serait différent. Vous le savez pertinemment, d’où ce duel d’un nouveau genre qui s’installe en vous : voir – et découvrir de nouveaux paysages, parfois somptueux, même si ce n’est pas nécessaire, en attendant d’arriver – versus dormir – ce que réclame votre corps, donc se reposer, pour être au mieux en arrivant, et faire l’impasse sur le paysage qui défile. Vos yeux clignotent, s’ouvrent péniblement, admirent ce qui vit de l’autre côté de la vitre, se ferment de fatigue, vous résistez, ils s’ouvrent à nouveau, c’est toujours aussi beau, vous vous extasiez… ponctuellement… le marchand de sable est déjà de retour… vous lui cédez encore un peu de terrain, mais déjà, les yeux fermés, vous repensez à ces montagnes au pied desquelles vous progressez, vous revoyez ces forêts que vous traversez, vous sentez ce désert que vous fendez ou encore ces villages tout droit sortis d’un western que vous chevauchez, et vos yeux s’ouvrent à nouveau… Hors de question d’en louper un kilomètre ! C’est pour cela que vous avez choisi la lenteur, pour vivre le déplacement, la traversée, pour vivre le chemin et percevoir les transformations… La route, quand bien même elle s’emprunte sur des rails, c’est le début du voyage !

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Le dos de la cuiller

Il est 17h, je suis sensée faire une sieste, mais je suis contre les siestes. Je n’ai bien sûr rien contre les siestes des autres, mais je suis contre le fait de faire moi-même des siestes, même si j’ai parfaitement conscience qu’elles pourraient me faire un grand bien dans un contexte de nuits de plus en plus courtes… Mais voilà, j’ai toujours assimilé la sieste à une pure perte de temps, ce qui est plutôt cohérent avec le fait d’estimer qu’il m’en manque toujours. Car le temps de cette hypothétique sieste est du temps pendant lequel je pourrais m’occuper, faire, fabriquer, créer… Bien sûr, c’est un calcul court-termiste puisque dormir nous permet de nous régénérer, de récupérer physiquement, psychologiquement et intellectuellement – bref, c’est plutôt utile (et même un enjeu de santé public pour les années à venir) -. Mais la raison ne l’emporte pas toujours…

Ceci dit, je reste ouverte aux nouvelles expériences susceptibles de me faire changer d’avis. Voilà donc qu’au coin d’une grande table en bois brut posée au coeur d’une maison chaleureuse, l’on me parle de la méthode de la petite cuiller, notamment utilisée par les pilotes. Intriguée, je questionne. La méthode de la petite cuiller se vit au premier degré et l’unique ustensile requis est donc… une petite cuiller. Nous verrons plus tard que nous pouvons élargir le champ sans perdre le fil. Le postulant à la micro-sieste place donc une petite cuiller entre son pouce et son index, et la laisse pendre dans le vide. C’est le moment de fermer les yeux et de s’autoriser à s’endormir.

Mécaniquement, au bout de quelque temps – je ne saurais vous dire exactement combien de minutes, mais cela n’altère pas la compréhension du phénomène -, notre cobaye entre dans un sommeil léger et ses muscles se relâchent. Suite à quoi, naturellement, la cuiller lui glisse des doigts, tombe dans un fracas métallique qui le réveille brutalement et signe le glas de sa sieste, certes courte mais réparatrice. CQFD. Je me permets simplement une petite suggestion qui paraîtra évidente à tous : pour limiter les risques de transformer cette sieste d’une dizaine de minutes en une nuit en avance, il est vivement conseillé de poser son coude sur une surface dure, du bois, du carrelage, du métal, du verre, et d’éviter tout lit, fauteuil, canapé qui amortiraient totalement le bruit de la chute de la cuiller. Bien évidemment, la méthode la cuiller fonctionne également avec un stylo, un livre, un portable, un verre, un pot de fleurs. Et j’oserais même dire, si vous n’avez rien de tout cela sous la main, avec la tête. Combien de fois, en effet, ultime trahison d’un terrible ennui ou d’une fatigue corsée, vous êtes-vous réveillé en sursaut suite à la chute inopinée de votre tête lourde et endormie ?

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Je suis sûre que cela vous est déjà arrivé à maintes reprises… Vous venez de passer une super soirée chez des amis, au théâtre, dans un parc, au ciné, sur la plage, au concert, autour d’un feu… Bref, hors de chez vous. Ceci dit, ce qui suit fonctionne aussi si ladite soirée s’est révélée désagréable, mais je préfère l’hypothèse optimiste. Poursuivons donc. Il fait nuit, il fait froid, vous êtes fatigué, vous n’avez pas vraiment envie de vous frotter aux transports en commun à cette heure tardive, vous lâchez à voix haute : « Si la téléportation existait, je me jetterais directement dans mon lit ». Fantasme auquel a minima une personne répond toujours : « Moi aussi ! ». Comme si, ce saut de puce, c’était la panacée. Personnellement, je me dois de vous dire que si la téléportation existait, même au faîte de ma fatigue post-bonne soirée, ce n’est pas dans mon lit que j’irais mais bien plus loin… Par exemple, là, sur les bords du Salar de Uyuni, en Bolivie, à l’aube, à admirer le lever de rideau bleu du jour naissant se reflétant dans l’eau du lac et, aux antipodes, l’arrivée solennelle de notre soleil éclairant de ses rais quelques monticules de sel aux allures d’iceberg… Je ne serais assurément pas reposée mais ce serait bien plus beau !

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 Au beau milieu de la nuit, hier, j’ai subitement été réveillée par des secousses. J’ai cru vivre le deuxième séisme de ma vie après un nano-baptême l’an dernier à Taiwan*. J’étais à mon bureau et tout d’un coup, j’ai senti un étrange et bref mouvement latéral. Rien du tout en fait à l’échelle des séismes, ce qui n’ôte rien à ma perception, inédite, d’avoir senti bouger la Terre sous mes pieds. Mais en réalité, la nuit dernière, ça n’était pas un séisme. Mais mes voisins du dessous. Voyez-vous, mes voisins du dessous s’aiment beaucoup, à toutes les heures du jour et de la nuit. Ils s’aiment longtemps aussi. Monsieur est un athlète. Je pense même qu’il pourrait s’inscrire à un prochain Ironman ! Et ils s’aiment bruyamment surtout. Madame est chanteuse lyrique. Ou aspirante. Tant d’amour est évidemment une excellente nouvelle alors que partout sur ce globe, les gens s’entretuent pour un rien. Mais fallait-il vraiment que cette débauche d’émotions s’exhibe sous mon lit ? A des heures où je préférerais dormir et consolider mes souvenirs du jour pour qu’ils durent toujours ? Non, je ne le crois pas. Ces deux-là n’ont-ils pas lu tous ces articles sérieux et angoissés annonçant, statistiques à l’appui et la mort dans l’âme (genre, ces jeunes ne savent plus vivre), que les jeunes générations se désintéressent de plus en plus du sexe, allant jusqu’à préférer se passer de lui plutôt que de leurs smartphones ? Pourquoi fallait-il que mes voisins du dessous soient justement ceux qui fassent mentir les chiffres ?

Au début, c’était amusant – « oh dis donc, ils sont en forme ! », « ce ne serait pas des adeptes du sexe post dispute ? » -, on en parlait avec humour – « il faudrait peut-être qu’ils changent de sommier ? » ou « qu’ils décollent le lit du mur ? » ou « qu’ils mettent des patins sous les pieds du lit ? », on notait les exploits – « hum, 6 aujourd’hui non ? », « ça doit être un 9 ça ? », on dissertait architecture – « c’est quand même très mal insonorisé ces vieux immeubles ! » -, on évoquait même le dilemme en public restreint, confidence qui se soldait systématiquement par la même réponse : « ça doit donner des idées ! ». Alors, oui, en effet, ça donne des idées. Mais pas forcément celles auxquelles les autres pensent… A cette fréquence là – ce qui pousse nécessairement à s’interroger sur sa propre sexualité, passée, présente et future -, les idées ne sont malheureusement pas très bienveillantes. La plus simple, taper un bon coup sur le parquet, histoire de rappeler qu’il est 3h du matin, que ça fait déjà 4 fois cette semaine alors que nous ne sommes que mardi (je fais débuter la semaine à lundi). Sonner à leur porte et disparaître ? Leur suggérer d’acheter une maison où ils seraient libres de faire tout ce qu’ils veulent sans risque de perturber leurs voisins. Celle où a été tourné Basic Instinct est justement à vendre. Une belle opportunité à saisir ! Cette nuit, passablement énervée, j’ai même imaginé scotcher un mot sur la porte à l’attention du triathlète de la part d’une amante imaginaire qui le réclamerait à corps et à cri parce qu’elle avait eu l’orgasme du siècle. 4 fois. Genre Marie qui s’envoie des fleurs dans Quand Harry rencontre Sally pour rendre son amant marié jaloux. Zizanie assurée à l’étage, des cris, des pleurs, des affaires jetées par la fenêtre, dans l’escalier, des « puisque c’est comme ça, je pars ! »… Sauf que ce plan est stupide : primo, les jeunes ne collent pas de messages écrits à la main sur les portes, ils s’écrivent en MP ; deuzio, ils seraient capables de retourner ça en se réconciliant sur l’oreiller ; tertio, je n’en serais pas capable ! Reste donc une ultime solution puisqu’il est impensable que cela dure éternellement : aller les voir, leur demander un peu de respect pour leurs aînés et leur offrir de nouveaux smartphones ET un abonnement à Netflix !

* En écrivant ces lignes, j’apprends que la côte est de Taïwan a été secouée par un séisme de magnitude 6,4 et qu’un hôtel s’est effondré… Deux étrangetés se télescopent : celle d’avoir pensé, dès ce matin, à commencer ce texte par « mon » séisme et apprendre que l’île en a vécu un le jour même ; celle de connaître précisément l’endroit qu’il a frappé voire des personnes qui y vivent…

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Cadeau...

… à tous ceux qui éprouvent quelque difficulté à se lever le matin : une exposition de quelques secondes seulement à cet ensemble immobilier chromatiquement ambitieux devrait avoir raison de votre léthargie pour de bon !

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Le doux ton des rêves

Jusqu’à très récemment, je ne m’étais jamais interrogée sur la couleur de mes rêves, enfin, des rêves en général. Mais une question toute anodine – « Tu rêves en couleurs ou en noir et blanc, toi ? » -, posée sur un bout de trottoir, en plein milieu d’une conversation de coq à l’âne, et à laquelle j’ai machinalement répondu « En couleurs » pour ne pas avouer mon ignorance dont, tout d’un coup, j’avais un peu honte, a tout fait chavirer. Quel stupide réflexe par ailleurs que de se mentir à soi-même et aux autres pour une bête question d’orgueil ! Comment avais-je pu passer toutes ces années à côté de cette question-là, essentielle, alors même que je ne compte plus les interrogations inutiles, vaines et sans fondement qui peuplent mes pensées au quotidien ? Pour me rassurer, j’ai instantanément fait cette hypothèse, convoquant un léger raisonnement par l’absurde pour l’occasion : si j’avais rêvé en noir et blanc, cela m’aurait forcément sauté aux yeux – certes fermés – puisque j’ai la chance de ne souffrir d’aucune anomalie chromatique et donc de percevoir toutes les couleurs possibles – à quelques nuances d’appréciation personnelle près dès lors qu’ils sont ouverts. CQFD. Par ailleurs, une étrange impression m’a alors traversé l’esprit : rêver en couleurs me semblait plus valorisant que de se limiter au noir et blanc. Comme si on pouvait choisir ! Comme s’il suffisait de tourner le bouton « couleurs » avant de s’endormir. On pourrait alors imaginer d’avoir une batterie de filtres à disposition pour rêver en sépia, très contrasté, surex, sous-exposé, couleurs froides, façon sténopé ou plaque de verre… Quoi qu’il en soit, cette micro-analyse ne me permettait pas d’être catégorique quant à la tonalité de mes propres rêves.

J’ai alors essayé de m’en souvenir, non pas du contenu de mes rêves, mais de ce dont ils étaient visuellement constitués, de leur texture, de leurs teintes donc. A nouveau, la couleur s’est spontanément imposée à moi, et j’en tenais pour preuves des aquarelles justement tirées de mes fantasmagories nocturnes que je n’avais jamais eu l’idée de représenter en noir et blanc. Mais là encore, ma retranscription colorée pouvait être imaginaire et exclusivement orientée par ma vie éveillée. Au fond, le doute persistait. De fait, je me suis mise en tête d’y être particulièrement attentive à mon prochain rêve. Ce qui, je vous vois sourire, est une véritable gageure puisque rêver suppose d’avoir atteint un niveau d’inconscience incompatible avec le fait de mener une enquête consciemment et donc d’apporter une réponse claire, précise et indiscutable à la question liminaire. Peut-être, pour en découdre, devrais-je plutôt me concentrer sur cet état de semi-conscience précédant le réveil, où les dernières images construites par notre subconscient se mêlent aux premières sensations d’une nouvelle journée, ce moment où, justement, nos rêves ne se sont pas encore volatilisés, où le reboot matinal automatique s’initialise – je m’appelle Lou Camino, je suis dans mon lit, nous sommes samedi, il faut assez chaud, j’ai rendez-vous dans 2h à l’autre bout de Paris… -, suivi de la formalisation d’une série d’actions à entreprendre dans un ordre très précis pour arriver presque à l’heure ? Une chose est sûre, tout cela demeure un peu flou dans mon esprit…

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Narcolepsie de rue

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Il arrive assez régulièrement que l’on me dise que je me pose d’étranges questions. Je suis quasi sûre que celle-ci en ferait partie. En cherchant le sommeil, ce qui est assez récurrent après une soirée partagée avec mes pixels préférés, il y a toujours un moment où je me demande ce qui se produit dans mon corps pour qu’à l’instant t, je sois encore réveillée, consciente du monde qui m’entoure et qu’à l’instant t+1, je dorme, perdue dans un ailleurs auquel je n’ai pas toujours accès. C’est comme si, chaque soir, après avoir tenté le coup du décompte des moutons dans le ciel ou des cailloux sur la digue, j’étais frappée d’amnésie. Bien sûr, le fait de se poser ce genre de question alors même que j’aspire au vide et au silence n’est pas indiqué. Et en même temps, cela me semble totalement inévitable puisque justement, j’aimerais comprendre ce qui se passe tout en attendant impatiemment que Morphée fasse une halte par ma chambre et m’emporte quelques heures, dont le nombre diminue à vue d’œil. Miracle, malgré les interrogations quotidiennes, le blackout finit toujours par arriver, sans prévenir ! Mais d’où peut-il bien venir ?

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