Photo-graphies et un peu plus…

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Il est des gens qui voyagent seuls par choix (pour être l’unique maître à bord, par exemple, et ne pas avoir à tenir compte des désidératas des uns et des autres) ou par absence de choix aussi (un célibat temporaire, une solitude non assumée, des dates de vacances incompatibles…). Voyager seul a ses avantages (liberté, flexibilité, blablabla) et ses limites : personne à côté de soi, d’intime, de proche, avec qui partager ses sensations, ses émotions ; personne à regarder, l’air entendu – celui qui sait la chance qu’il a -, face à un paysage à couper le souffle ou une situation totalement inédite ; personne, des années après, pour que cette phrase : « Tu te souviens comme c’était beau quand on était… » remporte un quelconque écho… Telle est la frustration la plus facilement exprimée, et partagée, par les vagabonds solitaires.

Ceci dit, voyager à deux n’est pas toujours la panacée ni la garantie de vivre des instants de félicité. Et il arrive parfois que le partenaire d’errance, cet être cher, ne soit pas celui que l’on imagine spontanément. Comme là. Face à cet océan tumultueux, à cette côte nimbée d’une fine couche d’embruns venant flirter avec la forêt toute proche. Ce n’est pas avec son mari, pourtant assis juste à côté, que madame s’extasie devant les éléments mais avec son chien, qui a la bienveillance de regarder dans la direction que lui indique sa maîtresse. Et voilà qu’elle lui parle, tout en lui montrant les vagues cassant sur la plage, les mouettes prises dans le vent… La femme n’en finit pas de murmurer à l’oreille de ce chien, qu’elle tient tout contre elle et à qui elle offre la totalité de sa tendresse disponible, laissant sa moitié officielle sur le ban des oubliés, derrière. Accorder plus d’attention à un animal qu’à un être humain, qui plus est présent, fera toujours naître en moi une sensation étrange, mélange d’incrédulité, d’incompréhension et d’effroi…

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– A quelle heure est le lever du jour demain ?

– 5h39 !

– C’est tôt… (La motivation prend un coup, mais le désir de le voir se lever sur l’océan l’emporte.) Bon, tu mets ton réveil ?

– Ok.

5h39, 5h39, 5h39, 5h39… je me répète cette heure comme une poésie au vers unique et m’endors… Pour me réveiller à 5h39. Normal vous dites-vous, le réveil a sonné tout simplement. Et bien non. J’ai ouvert les yeux naturellement, me suis redressée promptement sur mon lit comme si je devais prendre mon quart sur le pont dans 3 minutes et ai regardé l’heure. 5h39. Le réveil n’a pas encore sonné. Il ne le fera pas. C’est étonnant comme parfois, notre corps se transforme en horloge, comme il nous sort simplement des bras de Morphée quelques minutes avant l’heure alors qu’il nous sait effrayé à l’idée de ne pas entendre le réveil et ainsi de rater tel entretien, examen ou vol…

Dehors, c’est l’aurore. C’est calme. C’est frais. J’emporte ma veste, empoigne mon appareil et je sors. Car la contrainte est un peu photographique aussi. Une partie de moi se dit qu’il est facile de faire de belles photos lorsque l’on est dans un cadre naturellement splendide. Il suffit d’être là. Alors je m’impose un effort, comme pour mériter de pouvoir assister à ce spectacle magnifique. De cette heure où le soleil a rendez-vous avec la lune, l’un et l’autre séparé par un monde, que dis-je, une terre… Quand notre satellite tire sa révérence derrière l’horizon dans des couleurs pastels, l’astre brillant monte lentement, sortant les grands moyens, des rayons ardents mais pas encore suffisamment pour réellement chauffer cet espace refroidi par la nuit. Chaque minute qui passe met en lumière un nouvel élément du décor, comme s’il était soudainement l’élu des dieux. Ainsi en est-il de ce rocher, bien connu des mouettes locales qui, recroquevillées sur elles-mêmes, attendent cet instant où le soleil daignera leur accorder quelque attention, leur redonnant vie pour la journée par la même occasion. Sur la plage, le cœur est déjà chaud.

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