Cette échelle, à un autre moment si engageante, passera l’hiver en solitaire. Deux pieds scellés dans la glace bleu iceberg, deux bras plantés dans le macadam torturé. C’est toujours pour mieux s’en éloigner que les plus curieux s’en approchent. En attendant le redoux, l’explosion des bourgeons et le retour des promeneurs, quand elle est fatiguée de tant de beauté et de silence, elle se repasse les cris de joie des enfants qu’elle a enregistrés, l’été dernier, en prévision de ces moments-là, et qui rebondissent, comme des boules de billard, dans les entrailles creuses de ses membres qui se font cathédrale…
Mystère matinal post-canicule : les hommes, tout du moins, leurs cages métalliques, ont disparu de la circulation ! Je ne vois que deux solutions : soit elles ont pris leur indépendance, profitant de la nuit pour s’évader silencieusement au point mort ; soit les hommes les ont emportées loin de toute civilisation… pour la recréer ailleurs. L’une comme l’autre, désertion totale synchronisée. Il y a peu d’occasion pour l’urbain de voir une chaussée aussi nue ! En temps normal, un vrai paradis pour le travailleur exténué et ayant encore une épreuve à remporter pour achever sa journée, trouver une place où caser sa boite à roulettes.
Mais, le travailleur exténué faisant lui-même partie de ces déserteurs estivaux, il ne pourra goûter au bonheur typiquement francilien de n’avoir que l’embarras du choix pour se garer. En échange, en revanche, il restera piégé des heures durant, avec famille, chat et peluches, sur des routes congestionnées, comme si tout le monde s’était téléphoné pour partir au même moment. La ville ne se laisse pas abandonner ainsi ! S’ouvre alors une période de grâce pour les non motorisés, piétons, cyclistes et autres libérés : la rue est à eux. Les exaspérés du trop-de – bruit, monde, monoxyde de carbone – vont enfin pouvoir retrouver la ville qu’ils aiment, une ville où l’on peut respirer sans craindre l’infection pulmonaire ; une ville animée, mais pas par la fatigue et l’impatience qui en découle ; une ville au pouls rapide, mais qui laisse à chacun le soin de vivre au sien ; finalement, une ville où l’homme n’est pas qu’un morceau quelconque de masse humaine mais où il a sa place en tant que personne.
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Share on FacebookC’est un peu comme avec les blockbusters américains qui égrènent, les uns après les autres, tous les clichés des films de ce genre – au hasard, le pouvoir de l’amour, le mythe de la seconde chance, le sacrifice d’un couple de personnes âgées, la renaissance après les épreuves, la bravoure, le patriotisme, le dépassement de […]
Share on Facebook– Mademoiselle ! – Mademoiselle ? Cette question m’a l’air destinée. Je détache mon œil droit de mon viseur. Baisse mon appareil. Puis me tourne vers la voix. Une dame me regarde. – Vous n’avez pas l’intention de prendre les enfants en photo j’espère ? me lance-t-elle, déterminée. Soubresaut intérieur imperceptible de l’extérieur. Je n’ai […]
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