Photo-graphies et un peu plus…

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On croit toujours qu’une grosse fera mieux le job. Que plus elle est longue, large voire épaisse, plus on sera satisfait. Bien. Au chaud. C’est effectivement ce que je pensais lorsque je suis entrée dans cette échoppe de Hoï An – au Vietnam, soit à 18 444 km à vol d’oiseau de la ville de Coquimbo, au Chili, où j’ai pris cette photo, ce qui ne l’empêche pas d’être pertinente compte tenu de ce qui va suivre, vous allez voir – vendant (l’échoppe) des écharpes que personne, évidemment, ne porterait là-bas pour la simple et bonne raison que la température moyenne annuelle dépasse les 20°C. Je le sais, une moyenne ne veut rien dire, mais croyez-moi, les écharpes vendues à ces latitudes sont pour les touristes (que je suis donc), ce qui leur permet, de retour au bercail, de répondre fièrement à un : « Elle est super belle ton écharpe ! » : « Merci 🙂 ! Elle vient d’Hoï An, au Vietnam ! ». Bla bla bla.

Bref. Il n’est jamais facile de choisir une écharpe, surtout quand il y en a des dizaines et des dizaines différentes face à vous. Cette lapalissade vaut pour tout – remplacez « écharpe » par « yaourt », « voiture », « téléphone », « basket »… – et illustre un mal de notre civilisation occidentale trop gâtée : la difficulté croissante à faire des choix, générant cette sensation extrêmement désagréable d’être « prisonnier » d’une trop grande liberté faisant de nous des insatisfaits chroniques inaptes à gérer le trop de possibilités qui s’offrent à nous. Car chacun le sait, choisir, c’est renoncer au reste, ce dont nous n’avons clairement pas envie, car, dans notre infinie sagesse et humilité, nous avons juste envie de tout ! Si vous avez 19m34s devant vous (une autre lapalissade sauf si vous voyagez dans le temps), je vous invite à écouter un psy en short en parler.

Donc, mon écharpe, je l’ai d’abord choisie pour ses couleurs, vives, très vives, des couleurs primaires diraient certains. Une gamme chromatique me garantissant, de retour au fameux bercail, une pluie de perspicaces commentaires : « Dis donc, c’est bariolé ! », « On doit te voir de loin, c’est pratique », « Oula, ça flashe », « J’oserais pas »… Je l’ai choisie aussi pour ses dimensions – 30 cm de large, 120 cm de long, une maille épaisse – lançant intérieurement à l’Hiver : « tu peux bien débarquer, je suis parée ! ». Ah ah ah ! Et c’est là où je souhaite en venir depuis le début mais je ne sais pas faire court : quand l’hiver fut venu, il en fut évidemment tout autrement. Cela vaut pour aujourd’hui aussi, au figuré. J’ai beau faire deux voire trois tours de cou avec mon anaconda coloré en laine, certes sans grande attention, il y a toujours un moment où je sens un léger courant d’air s’infiltrer, réussissant bon an mal an, mais globalement assez facilement, à se faufiler entre les mailles en points de riz pour atteindre les 2,5 cm2 de chair que mes tours et détours n’ont malencontreusement pas couvert. Et là, voyez-vous, c’est un peu comme ce rouleau de papier toilette que vous faites tourner comme un hamster dans l’espoir d’en attraper le bout, vous n’arrivez jamais à remettre votre écharpe correctement. A l’issue de la 3e tentative infructueuse, exposant chaque fois à l’air frais de nouvelles parcelles de votre petit cou fragile, totalement désespéré et passablement énervé (car vous avez beau avoir vécu cette scène plusieurs fois, l’information ne rentre pas !), vous vous résignez à faire ce que vous vouliez éviter à tout prix : retirer votre veste, manteau, parka, imper, duffle coat, blouson, bomber, Canadienne, ciré, caban, redingote, cache-poussière, paludamentum, raglan, pardessus ou houppelande pour vous envelopper convenablement, donc efficacement… Moralité : avoir le bon outil, c’est bien, savoir l’utiliser, c’est mieux. Quant à être bien entouré, c’est vital ! Voilà, c’est tout !

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