Photo-graphies et un peu plus…

Je ressens toujours une petite gêne lorsque je suis prise en flagrant délit de photographier un ou une inconnue, comme si j’avais été saisie la main dans le pot de confiture, de fraises. Deux stratégies s’imposent alors rapidement : soit baisser maladroitement l’appareil et tourner le dos à mon forfait (pas la plus courageuse), soit rester cachée derrière l’objectif et changer de cadre en attendant que l’observé se lasse (pas très courageux non plus). Le face-à-face involontaire m’indispose, alors, j’essaye d’être rapide lorsque d’aventure, j’humanise mes images.

Personnellement, je n’aime pas me retrouver dans le champ d’un objectif, d’appareil photo ou de caméscope. Je tourne machinalement la tête, remonte mon journal au niveau du visage, fais un détour, voire une grimace… bref, j’esquive. Je respecte donc tout à fait l’agacement potentiel des photographiés d’où mon exigence de discrétion, d’autant plus nécessaire que je ne suis pas équipée d’un téléobjectif d’invisibilité. Reste que lorsque, à mes yeux, le personnage prend le dessus sur la personne, j’ai du mal à ne pas déclencher.

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Mystère matinal post-canicule : les hommes, tout du moins, leurs cages métalliques, ont disparu de la circulation ! Je ne vois que deux solutions : soit elles ont pris leur indépendance, profitant de la nuit pour s’évader silencieusement au point mort ; soit les hommes les ont emportées loin de toute civilisation… pour la recréer ailleurs. L’une comme l’autre, désertion totale synchronisée. Il y a peu d’occasion pour l’urbain de voir une chaussée aussi nue ! En temps normal, un vrai paradis pour le travailleur exténué et ayant encore une épreuve à remporter pour achever sa journée, trouver une place où caser sa boite à roulettes.

Mais, le travailleur exténué faisant lui-même partie de ces déserteurs estivaux, il ne pourra goûter au bonheur typiquement francilien de n’avoir que l’embarras du choix pour se garer. En échange, en revanche, il restera piégé des heures durant, avec famille, chat et peluches, sur des routes congestionnées, comme si tout le monde s’était téléphoné pour partir au même moment. La ville ne se laisse pas abandonner ainsi ! S’ouvre alors une période de grâce pour les non motorisés, piétons, cyclistes et autres libérés : la rue est à eux. Les exaspérés du trop-de – bruit, monde, monoxyde de carbone – vont enfin pouvoir retrouver la ville qu’ils aiment, une ville où l’on peut respirer sans craindre l’infection pulmonaire ; une ville animée, mais pas par la fatigue et l’impatience qui en découle ; une ville au pouls rapide, mais qui laisse à chacun le soin de vivre au sien ; finalement, une ville où l’homme n’est pas qu’un morceau quelconque de masse humaine mais où il a sa place en tant que personne.

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Après les avoir tant attendus – le soleil et son corolaire, la chaleur -, et à peine une semaine après les avoir enfin eus, nous en sommes tous là ! A vouloir mettre les pieds dans l’eau pour faire un tant soi peu diminuer la température de notre corps absorbant… Peu importe le costume ou le tailleur, la chaleur bannit les réserves sociales ! Pour ceux qui n’ont pas la mer à portée de pieds, les villes regorgent de canaux, bassins et de fontaines publics, pris d’assaut dès les premières heures de la journée ! En dépit de toute règle élémentaire d’hygiène, on s’y jette, on s’y noie, on y boit la tasse, on s’y asperge dans une allégresse quasi juvénile, avant de s’allonger sur une serviette de plage comme si on y était… De doux moments de légèreté pour compenser la lourdeur atmosphérique !

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Regarder les gens regarder est souvent plus amusant que regarder soi-même… Car, évidemment, ces homo touristus cherchent quelque chose. Par grappes parlant (ou pas) la même langue mais assurément le même langage – celui de l’index dénonciateur – ils cherchent ce que leur guide leur dit de chercher page 32 dans l’encadré consacré à l’Université de Salamanque, l’une des plus anciennes d’Europe par ailleurs. Une grenouille posée sur une tête de mort noyée sur une façade fourmillant de petits motifs et sculptée par son dernier restaurateur. Elle symboliserait la mort suite au péché de luxure. Plus simplement, la tradition veut que celui qui la voit réussisse son année universitaire. Un soulagement pour ceux qui n’y sont pas allés ou qui sont encore trop jeunes, mais qui la cherchent avec une application toute enfantine…

Evidemment, face à ce spectacle, on se demande comment ce jeu de « où est charly ? » imposé peut-il réussir à soulever autant d’enthousiasme. Et, par extension, si, si le guide avait spécifié que la tradition était de sauter à cloche pied devant la façade, ces visiteurs d’un jour y auraient consenti avec autant d’abnégation… ou de panurgisme… « Elle est là, là, la grenouille, sur le pilastre en haut à droite ! »

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Provoquées par une œuvre lumineuse exposée au Centre Pompidou. Le petit est en émoi. Passe une première fois dans la salle obscure, son père au bout de la main. Il s’arrête net devant cette boîte mystérieuse qui lance des vagues de couleurs régulièrement. Les tonalités changent, le rythme aussi. Boîte de nuit ? Qu’importe, le petit est subjugué. Bientôt, son père se baisse pour être à sa hauteur. On devine que le petit lui dit : « C’est beau » d’un beau enfantin qui traîne en longueur… La découverte artistique se transforme en moment de partage. D’émotion.

Les minutes passent. Vraiment. Le père veut poursuivre la visite, le petit résiste mais pour l’heure, il est encore moins fort que son paternel. Ils disparaissent par l’autre porte. Pour mieux réapparaître une minute plus tard, le petit en premier, toujours avec son père à bout de bras. La traversée de la pièce de 5 mètres de long est une véritable épopée. Comment la faire durer le plus longtemps possible ? Les yeux rivés à la boîte magique, le petit se laisse traîner vers l’autre sortie. Depuis le banc, le spectacle est burlesque… Et le devient encore plus, quand, quelques secondes après, déboule dans la pièce le petit garçon accompagné de sa mère cette fois-ci. On imagine aisément les tractations qui se sont jouées à l’extérieur. Jamais vu un intérêt si vif pour une œuvre d’art, certes très attrayante pour les yeux, de la part d’un enfant de cet âge ! Au final, je ne sais plus ce qui est le plus beau.

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C’est curieux comme, de haut, un être humain est un être humain, un être vivant avec deux jambes, deux bras, une tête, un tronc… L’universalité de la silhouette, ici flottante, me plaît. Le tableau composé par cet ensemble paraît totalement erratique. Mais regarder ces silhouettes évoluer quelques minutes prouve que c’est totalement le contraire. Chacune avance d’un pas très décidé et avec une régularité de métronome vers sa destination finale, hors-champ…

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Se lover dans un fauteuil rouge de salle obscure peut, dans le meilleur des cas, conduire à ressentir un flot d’émotions. Des émotions de base, joie, peur, tristesse, surprise, colère… Et des émotions dites secondaires, car elles en sont des combinaisons : amour, haine, nostalgie, confiance, gratitude, embarras, envie, mélancolie… On y pleure, on y rit, on y pleure de rire, on s’y tortille, on s’y cache les yeux, on y respire, on s’y énerve, on s’y détend, on s’y ennuie, on y mange, on s’y embrasse, on y dort… En somme, on y vit ! If these walls could talk, ils auraient beaucoup à raconter !

On vit des émotions vraies et sincères face à des vies imaginées et montées à cet effet, avec lesquelles, malgré tout, on garde une certaine distance, celle occupée par l’espace entre la fiction et la réalité. Il arrive pourtant, exceptionnellement, que chez certains spectateurs, cette distance semble infinitésimale voire inexistante. Samedi par exemple, la jeune femme d’à-côté était corps et âme de l’autre côté de l’écran, lâchant des « non, non, non… » à l’approche d’un danger comme le clament les enfants au spectacle de Guignol… Imaginez sa réaction quand le personnage principal s’est violemment fait renverser par une voiture ! Un grand cri strident que les 6 autres personnes de la salle n’ont pu qu’entendre. Puis, elle a fondu en larmes ! Excessif mais sincère. Evidemment, le spectateur de cette scène-là ne peut être que décontenancé. Il peut même sourire (j’avoue, j’ai souri)… C’est la première fois que je voyais une personne de cet âge vivre autant une fiction ! Quelle fatigue émotionnelle ce doit être à chaque fin de séance ! Et quelle est la couleur d’une vie sans filtre ?

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Marches, grille de ventilation, tableau… Qu’est-ce que la création ?

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… la photogénie naturelle des musées. Toujours le même, qui, après avoir honoré l’horizontalité, passe au vertical lumineux…

Les expositions temporaires du Musée d’art moderne de la ville de Paris, dont les collections permanentes sont en accès libre (ne pas hésiter à leur rendre visite…), m’a parfois (souvent ?), plongée dans une certaine perplexité, voire, comme dirait Dupont ou Dupond, dans une perplexité certaine… Il doit me manquer certains codes pour bien saisir toute la puissance de certaines des œuvres dépouillées présentées aux yeux de tous avec beaucoup déférence.

Dans ces cas-là, le plus énigmatique se trouve parfois dans le petit texte accolé à l’œuvre… J’en avais noté un à l’occasion de l’exposition de celles de Carsten Höller et Rosemaire Trockel (ce qui remonte à quelques années déjà). Juste une phrase : « Certaines pièces apparaissent comme la nouvelle formulation d’un dispositif montré précédemment dans un contexte différent, répondant ainsi à la nécessité interne du développement d’une réflexion. » Quelle structure alambiquée pour se défendre du fait que ce travail a déjà été exposé, et peut-être sous une forme moins aboutie ! Voilà, je me souviens avoir été agacée par ce pseudo snobisme contemporain. C’est toujours le cas ! Un de mes anciens professeurs d’université, un homme qui avait officiellement la tête dans les étoiles et qui du coup était souvent en retard, avait l’habitude de railler ceux qui utilisaient des mots compliqués pour dire des choses simples et se donner des airs plus intelligents… Il n’y a pourtant rien de déshonorant à être compris !

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L’info est arrivée hier matin, comme une fleur, sur ma boite mail (merci !)… Envoyé de mon iPhone, dit le message. Une image inédite, un coup de pub de génie : des canapés suédois posés le long d’un quai de métro, devant une bibliothèque fictive. Alternative moelleuse aux sièges plastiques rigides. Il paraît que certaines personnes passaient à côté sans se rendre compte de leur présence… Le métro-boulot-dodo n’a jamais été aussi condensé !

Un quai, qui affiche parfois le visage le plus triste au monde, déguisé en salon, ça ne se loupe pas. Une petite boucle par le sous-sol parisien et hop, me voilà, en fin de journée, sur le quai d’en face. Le plus drôle, c’est la réaction des gens… Certains regardent les canapés comme s’ils n’en avaient jamais vu de leur vie, passant au large comme s’ils pouvaient mordre… D’autres s’y jettent nonchalamment, comme s’ils étaient déjà chez eux. Quelques personnes s’en approchent discrètement, déchiffrant les étiquettes accrochées aux accoudoirs, comme si c’était déjà samedi après midi dans la boutique de Franconville… Et puis, il y a celles qui s’y lovent tendrement, qui ne peuvent s’empêcher de sourire, car, quelque part, elles ont la sensation de vivre quelque chose d’original… et qui, portées par cette allégresse inopinée, se mettent à discuter cordialement entre elles ! Ce qui, ceux qui prennent le métro le confirmeront, est chose rare… Il faut au moins marcher sur le pied de son voisin pour que quelques sons, voire des mots, soient émis… Mettez un canapé, et ça change tout. Vive le canapé, le nouveau créateur de lien social !

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