Photo-graphies et un peu plus…

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Finalement, faute de chocolat avant le prochain ravitaillement, nous avons fait des crêpes ! La Bretagne est dans la place ! Sans drapeau. D’ailleurs, la Nouvelle Zélande a failli être le seul pays visité ces dernières années sans que nous ne tombions sur un Gwenn ha Du flottant au vent, accroché à une fenêtre, cousu à une tente, scotché à un pare-brise ou encore porté comme coupe-vent… C’est un peu une private joke entre nous, mais cette propension des Bretons à annoncer la couleur – noir et blanc hein – partout où ils passent me fait invariablement sourire.

Il nous a donc fallu aller jusqu’à Akaroa, à côté de Christchurch, sur l’île du sud, pour en voir un. Présence légèrement biaisée car Akaroa, village niché au creux d’un volcan érodé de la Péninsule de Banks, est le dernier et unique bastion français du pays – nous y avons même trouvé une vraie baguette, c’est dire ! Car, à l’instar de nombreux territoires et îles sur cette planète, la Nouvelle Zélande – Aotearoa – « Le pays au long nuage blanc » a été colonisée. Son histoire connue reste d’ailleurs étonnamment récente ! Les Māoris, arrivant de Polynésie (les historiens ne savent pas d’où précisément même s’ils ont des pistes) à bord de wakas (pirogues), grâce à une maîtrise de la navigation qui force l’admiration encore aujourd’hui, sont les premiers êtres humains à y poser le pied, a priori entre 1000 et 1200 après J.-C. Cela fait encore débat. Le premier contact avec les Européens, et plus précisément le néerlandais Abel Tasman – nom attribué aujourd’hui à un magnifique parc naturel au nord de l’île du Sud, que nous nous réservions pour la fin et que nous n’avons pas pu parcourir car il nous a fallu traverser le Detroit de Cook (un autre des grands explorateurs de ces temps anciens où la planète n’était pas cartographiée au millimètre près) en urgence pour rallier Wellington – date de 1642. Mais le gaillard repart dare dare avec ses deux navires, la rencontre avec les Māoris, pleine d’incompréhension mutuelle, ne se passant pas très bien (pour preuve, le nom de Murderers Bay que Tasman donne au lieu de rencontre). Plus personne ne s’aventure aussi loin avant 1769 et la mission scientifique de James Cook. Le débarquement des Européens ne s’arrête plus, la Nouvelle Zélande devient une colonie britannique en 1840, sur fond de traité – celui de Waitangi – signé par plus de 500 chef Māoris (et refusé par autant). Malheureusement, ce traité signe aussi leur déclin : la traduction en māori qui en est faite ne reflète en effet pas clairement le texte original, certains mots ou certaines notions en anglais – la propriété foncière, la souveraineté, la gouvernance entre autres… – n’ayant pas d’équivalent dans la culture Māori. En particulier, les Māoris – pour lesquels, dans la tradition ancestrale, tout est lié, les personnes, la nature, les objets animés comme inanimés – se perçoivent comme des gardiens de la Terre et en aucun cas des propriétaires. Une posture humble qui résonne étrangement aujourd’hui.

Et voilà une bien longue digression pour expliquer que les Français sont arrivés trop tard en Nouvelle Zélande et ont dû se contenter du port d’Akaroa ! En même temps, c’est important l’Histoire, et on l’oublie trop souvent… Dire que tout cela a commencé avec une histoire de pénurie de farine… Ce n’est pas ce que je pensais aborder aujourd’hui. Les pensées vont où elles veulent, les mots les suivent. Après mes réflexions d’hier, j’avais en tête quelque chose de plus léger, de factuel, sur le confinement à la mode Nouvelle-Zélande. Je ne citerai que cette initiative locale observée ces derniers jours au gré de nos pérégrinations circulaires dans le quartier : des ours en peluche, tous orientés vers la rue, ont fait leur apparition aux fenêtres des maisons et des appartements. Comme ça, sans un mot, sans une bulle, des petits, des grands, des blancs, des verts, des rayés… Chaque jour un peu plus, et rapidement rejoints par des poupées, des lapins, des ânes, des girafes, des lions, bref, l’arche de Noé, comme si les habitants avaient été remplacés par ces artefacts aux vies imaginées. Une rapide recherche sur les journaux du coin a apporté la réponse à ce déballage trop prématuré pour faire penser à Noël : il s’agit bien d’un appel à la population, pas d’un mimétisme collectif, l’intention étant d’occuper les enfants pendant leur balade quotidienne en leur proposant une chasse à l’ours pacifique. Mais, dans les faits, je n’ai vu que des adultes les prendre en photo… D’ailleurs, je ne sais pas où sont passés les enfants : nous n’entendons guère plus que l’horloge de la cuisine dont les secondes semblent plus pressées que d’habitude, la hache du voisin, la scie circulaire d’un autre, une sirène de police par ci par là et quelques tuis (des oiseaux d’ici 😉 ) a qui se demandent peut-être quelle mouche nous a piqués…

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