Photo-graphies et un peu plus…

Premier cycle

Ne vous fiez pas à cette image de Kandy – pas l’héroïne orpheline globe-trotteur de nos jeunes années qui attendait désespérément son prince sur la colline, non, Kandy, la ville sri-lankaise -, c’est un leurre : dans la vraie vie, les enfants ne restent pas sagement en rang deux par deux en attendant qu’on leur dise quoi faire. Dans la vraie vie, ils chahutent, ils trépignent, ils se harponnent, ils s’écharpent, ils crient, ils courent sur la route en dépit du danger et d’un bon sens qu’ils n’ont malheureusement pas encore acquis.

J’adore les enfants ! Oui, je sais, après cette introduction, ça sonne un peu faux. Je précise donc ma pensée : à petites doses – pas nécessairement homéopathiques -, j’adore les enfants. Voilà, comme ça, c’est mieux. Les doses peuvent être estivales par exemple – le moment préféré des parents qui se délestent de leurs merveilles du monde auprès de leurs propres parents, frères, sœurs, oncles, tantes, bouchers, zoos (ceux où les animaux évoluent en liberté quand même)… : ça tombe bien, c’est l’été. Youpi ! Il y a quelques jours, le premier en fait, m’est venue cette étrange pensée : « D’une certaine manière, s’occuper d’enfants est intellectuellement reposant ». Pas le temps de tergiverser, de douter, de se poser des questions existentielles et/ou abstraites auxquelles on peut se permettre de chercher les réponses des années durant sans avancer d’un iota : le luxe de la nullipare heureuse.

Non, à problèmes concrets, réponses instantanées : les gâteaux sont là, apporte m’en un s’il-te-plaît (morfale mais polie quand même) ; ton maillot est mouillé ? tu n’avais qu’à le sortir de ton sac ; ne mets pas les mains dans ta bouche, tu vas attraper un staphylocoque doré et tu ne réussiras jamais à t’en débarrasser ! ; va te brosser les dents, tu as un bout de salade en 12 (pour ceux qui me lisent régulièrement…) ; ne jette pas du sable sur la petite fille, elle ne t’a encore rien fait ; ne va pas te noyer quand je regarde ailleurs ; tu as bu ? (de l’eau, je précise) ; non, je ne gonflerai pas ta bouée géante pour la 10e fois… Allez donc caser un questionnement sur le sens à donner à votre vie là-dedans ! Le repos n’est évidemment que relatif : si l’esprit fait une pause, le corps est à l’agonie !

Les jours suivants, on se dit tout simplement que nous sommes en train d’interpréter notre propre version d’Un jour sans fin, le célèbre film d’Harold Ramis dans lequel Phil Connors, un monsieur météo auquel Bill Murray prête ses traits grincheux, revit indéfiniment la même journée dans une ville sans intérêt apparent : jour après jour, les mêmes événements, à quelques variantes cosmétiques près – la couleur du short, la couleur du ciel, la couleur de la menthe à l’eau… – se produisent dans le même ordre, aux mêmes heures, pendant la même durée ; jour après jour, on répète les mêmes sentences que la veille, sans fléchir mais en espérant, comme Phil Connors, qu’un jour, prochain, c’est-à-dire avant la fin des vacances, cela finira par rentrer, que l’on n’aura plus à imiter le perroquet et que nous pourrons enfin passer à une autre journée !

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juillet 28th, 2015

J’ai été récemment découvert une oeuvre d’art basée sur un subtil jeu de couleur en perpétuel changement, un peu comme nos kaléidoscopes d’enfants, mais dont les changements, tellement lents, et rendus presque imperceptibles sont censés plonger l’observateur dans un état méditatif… Je n’ai pas testé, malgré la présence des bancs posés à la disposition des visiteurs… Toutefois, la lecture de ton article me rappelle cette oeuvre, car, avec le recul, je me rends compte que l’on peut y voir une allégorie de la vie d’une mère… avec un schéma qui semble de jamais vouloir changer et qui pourtant évolue sans qu’on en prenne conscience. Et pourtant, un jour, d’un coup, comme sortant d’un rêve, on réalise que, pourtant, si, quelque chose à changé. On donne toujours des mises en garde, des avertissement, des conseils, des « ordres » – parce qu’il faut bien parfois – mais ce ne sont pas exactement les mêmes qu’avant. Le schéma reste le même, mais le motif, les couleurs ont changé. On s’en félicite un moment, on observe avec nostalgie et curiosité ce que notre vie est devenu.. puis on retombe dans l’hypnose, le schéma quotidien jusqu’à la prochaine prise de conscience.

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