Photo-graphies et un peu plus…

Introspection inopinée

La lumière était blanche, et même éclatante. Il y avait un escalier au milieu de mon champ visuel, un très long escalier étroit s’enfonçant à l’infini que je découvrais depuis la plus haute marche. Au bout de quelques secondes, mes yeux s’étaient acclimatés à cette vive luminosité et j’avais fini par voir une silhouette monter tranquillement les marches. Elle était si petite que j’ai cru qu’elle n’arriverait jamais au sommet. Et plus elle montait, plus j’avais l’impression qu’il s’agissait là de mon double. J’aurais même presque pu penser que c’était moi, ce que je n’ai pas tout de suite admis puisque j’étais déjà ailleurs. A observer toute la scène. L’intuition n’était pas mauvaise pourtant…

Sans m’être jamais vue de l’extérieur, a fortiori monter un escalier, je reconnaissais cette silhouette. Au pire, ce visage. C’était bien le mien. C’était donc bien moi qui revenais des profondeurs. J’étais d’un calme olympien. Il ne me restait plus qu’une poignée de marches à franchir pour atteindre le sommet quand j’ai amorcé une sorte de travelling arrière. Je suis à nouveau redevenue petite et là, alors même que j’étais sur la toute première marche de l’escalier, j’ai vu mon oeil droit apparaître. Je venais en fait d’arriver au bord de ma propre pupille…

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Par anticipatio

Qu’ont en commun Total Recall, Strange DaysThe GameDark City, The Truman Show, Passé virtuelPleasantvilleMatrixeXistenZ et Dans la peau de John Malkovich ? Ce sont tous des films américains oui et ils datent tous du 20e siècle oui aussi mais surtout, ils placent leurs personnages dans a minima deux mondes, a fortiori deux « réalités », qu’ils en aient conscience ou pas, qu’ils vivent donc dans l’illusion ou pas. Cette situation les amène à douter rapidement de la nature de leur monde, et, pour certains, à douter du réel lui-même. Et face à un réel souvent désenchanté, laissant peu de place à l’espoir, obscur, chaotique, violent, décadent ou déjà simulacre de lui-même, le salut des personnages vient alors de l’ailleurs, des réalités alternatives, des mondes parallèles voire virtuels dans lesquels ils plongent ou sont plongés, rendant plus complexe leur retour à un réel, d’autant qu’il n’est pas toujours celui qu’ils croient.

J’évoque ces films aujourd’hui parce que récemment, je me suis assise sur le siège H10 de mon cinéma habituel pour absorber le dernier Spielberg en 3D, Ready Player One. Au-delà des multiples références et auto-références au cinéma des années 80 et 90 ravissant les quarantenaires mais laissant sur le tapis une partie des millenials et de la génération Z – « je n’ai pas vu The Shining… » lance un personnage mi-figue mi-raisin -, son film, qui nous envoie en 2044, pose un certain nombre de questions sur notre perception de la réalité et notre interaction avec elle, sur notre rapport aux mondes virtuels, sur l’omniscience des réseaux sociaux, sur la place du jeu dans notre vie – et donc de l’évasion voire de la fuite -, sur notre identité flottante et flexible – ce que nous sommes « en vrai », ce que nous sommes « en faux » sur les réseaux -, sur les valeurs virtuellement humaines ou humainement virtuelles de part et d’autre de cette frontière ici bien délimitée entre monde réel et monde virtuel.

J’évoque ces films aujourd’hui car, il y a 20 ans, ils constituaient le corpus d’étude d’un essai que j’ai consacré aux mondes virtuels au cinéma et à leur interrelation avec la réalité. Et il y a 20 ans déjà, le réel l’emportait après un premier round pourtant accablant où le virtuel le mettait KO en quelques scènes. A tel point que ce passage au virtuel ne semblait, finalement, être là que pour affirmer la toute puissance du réel. Il ne s’agissait alors plus de l’effacer ou de l’oublier, mais de lui redonner du corps, de la substance, de l’intérêt pour y vivre mieux. Spielberg, sans condamner les technologies d’immersion – l’enjeu n’est pas du tout là – ne fait ainsi que répéter ce message envoyé il y a plus de 20 ans déjà, sachant que lui-même nous projette peu ou prou dans 20 ans. D’une certaine manière, cet écho ravive l’un des rôles clés du film d’anticipation et/ou de science-fiction : alerter en amont sur des dérives perceptibles dès aujourd’hui pour réorienter le cours de l’Histoire à venir à temps et réajuster des comportements, tant individuels que collectifs… Il semblerait donc, à la lumière de son film, que nous n’ayons pas réellement compris les messages jadis transmis par les réalisateurs. Bien au contraire, en matière de virtuel, le rythme s’est même grandement accéléré ! En 1927, André Breton écrivait dans Le Manifeste du surréalisme : « Viendra un jour où ce ne seront plus les hommes qui feront les choses ; ce seront les images qui les feront sans eux. Ce jour-là, on sera assis devant un écran, on ne sera plus des vivants mais des voyants ». 89 ans après, la prophétie se réalise. Or dans la vie, tout est une question d’équilibre. Il faut donc espoir garder !

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La légende du rock

Il n’avait rien vu venir… Un soir de juin 1984, il s’était allongé sur ce rocher de grès rouge entre Twyfelfontein et le massif de Brandberg. Il avait son casque vissé sur la tête d’où s’apprêtait à résonner Les Planètes de Gustav Holst. Ce soir-là, William avait décidé de compter les étoiles car il n’en n’avait jamais vu autant en une fois. Après avoir appuyé sur le bouton Lecture du walkman que lui avait offert son père pour ses 18 ans, il avait commencé le recensement : 1 étoile, 2 étoiles, 3 étoiles, …, 148 étoiles, …., 2432 étoiles, …, 7379 étoiles… Holst avait achevé ses sept mouvements depuis belle lurette et William s’était lui-même endormi d’épuisement, toujours le regard pointé vers le ciel. Mais il avait continué à compter les étoiles pendant son sommeil et ne s’était jamais réveillé. La légende dit que, certains soirs de juin particulièrement stellaires, en collant une oreille sur son corps désormais pétrifié, on l’entend encore compter… 38 485 984 257, 38 485 984 258, 38 485 984 259…

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J'peux pas, j'ai piscine

… J’peux pas, j’ai océan

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Contre vents et marées

… parfois, il est inutile de lutter.

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Au bout du couloir

Je ne retournerai pas en arrière, je ne retraverserai pas ce couloir à rebours pour me trouver à nouveau dans cette dernière salle, au bout du bout du monde, cette salle que j’ai cherchée frénétiquement dès que j’ai mis le pied, enfin les pieds, dans ce musée, où j’espérais glaner quelques indices sur sa localisation précise. Tout au long de ma quête, j’ai maté d’un oeil distrait et discret les 700 ans d’histoire de l’art qui défilaient à mes côtés. Je me suis quand même arrêtée, une poignée de fois, tant c’était saisissant de beauté. Puis, je repartais en mission : le trouver. Allais-je vraiment devoir arpenter les 12000 m2 de l’antre culturel pour le rencontrer ? Ce jeu de piste auquel me conviaient les conservateurs était-il réellement nécessaire ? Sur mon chemin, je l’imaginais sublimement mis en lumière, seul sur son mur, au coeur de tout. Ne le voyant pas, j’ai même douté, à un moment de sa présence en ces lieux, pensant qu’il avait été prêté à une autre institution, qu’il faisait alors des heureux à des milliers de kilomètres de là, alors que j’y étais aussi pour lui. Il a ainsi fallu aller au bout, au bout du bout du monde donc, pour me trouver face à lui et être saisie d’une émotion si forte – ventre serré, pulsation accélérée, chaleur instantanée, fébrilité incontrôlée – que des larmes ont réussi, sans s’annoncer, à s’échapper. J’ai dû les sécher, pour débrouiller l’image, et je me suis posée, face à lui. Après quelques minutes, je l’ai abandonné. Je ne retournerai pas en arrière, je ne retraverserai pas ce couloir à rebours, je ne me retrouverai plus devant Le voyageur contemplant une mer de nuages

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Cette image est issue d’un travail documentaire initié en 2012 auprès de la Compagnie de théâtre Le Bouc sur le Toit. S’il est en stand-by, je l’imagine toujours en cours et, à vrai dire, je ne lui vois pas spécialement de fin. Les choses prennent le temps qu’elles doivent prendre. Au cœur de cette démarche durable, le processus de création, qui me fascine, quel que soit l’objet de la création. Comment les idées prennent-elles vie et forme ?

On ne se rend pas toujours compte, au moment où on les prend, de l’impact de certaines décisions sur nos vies futures. Je me contenterais ici de parler de « vie photographique ». A posteriori, je peux aujourd’hui affirmer que ce choix de suivre cette Compagnie – d’abord par curiosité et amitié – a marqué un tournant dans mon parcours photographique. Il m’a obligée à me rapprocher – c’était le but officieux – de mes semblables – quand bien même ceux-ci étaient en « représentation » – alors que j’aurais très bien pu continuer à errer dans ma zone de confort : le paysage, naturel ou urbain… C’est impressionnant, de s’approcher. Effrayant, forcément. Et passionnant bien évidemment. Je l’ai (re)découvert avec eux.

Cette scène-là, d’une infinie poésie, n’a pas passé l’épreuve du travail de recherche. Les répétitions et tâtonnements l’ont transformée en une matière bien plus brutale et frontale, faisant de cette photographie une trace, précieuse à mes yeux, de ce qui n’a été qu’une tentative, une idée voire même un rêve.

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Fragile équilibre

Nous regardons la vie avec les yeux que nous imposent les moeurs de notre époque. Et parfois, aveuglés par des automatismes trompeurs, nous la voyons de travers, ce qui lui ôte une part de son charme et de sa poésie naturels. Ainsi, non, cette femme quasi statufiée au pied de cette énigmatique formation rocheuse sculptée par la mer au fil des siècles n’est pas rivée à son téléphone. C’est tout le contraire même. Perdue dans un monde qui semble ne compter qu’elle, si elle lève ainsi délicatement sa main, c’est simplement pour rassembler ses cheveux anarchiquement balayés par les vents violents, imperceptibles dans cet univers minéral où rien ne s’agite à l’échelle du temps humain, et ainsi dégager son doux visage qui semble destiné à traverser les âges.

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Tout feu tout flamme

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L'aventure intérieure

Je serais exactement dans le même état de suspicion et d’expectative si je me retrouvais, sans avoir été prévenue, à délirer dans mes propres vaisseaux sanguins !

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