Photo-graphies et un peu plus…

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Il arrive assez régulièrement que l’on me dise que je me pose d’étranges questions. Je suis quasi sûre que celle-ci en ferait partie. En cherchant le sommeil, ce qui est assez récurrent après une soirée partagée avec mes pixels préférés, il y a toujours un moment où je me demande ce qui se produit dans mon corps pour qu’à l’instant t, je sois encore réveillée, consciente du monde qui m’entoure et qu’à l’instant t+1, je dorme, perdue dans un ailleurs auquel je n’ai pas toujours accès. C’est comme si, chaque soir, après avoir tenté le coup du décompte des moutons dans le ciel ou des cailloux sur la digue, j’étais frappée d’amnésie. Bien sûr, le fait de se poser ce genre de question alors même que j’aspire au vide et au silence n’est pas indiqué. Et en même temps, cela me semble totalement inévitable puisque justement, j’aimerais comprendre ce qui se passe tout en attendant impatiemment que Morphée fasse une halte par ma chambre et m’emporte quelques heures, dont le nombre diminue à vue d’œil. Miracle, malgré les interrogations quotidiennes, le blackout finit toujours par arriver, sans prévenir ! Mais d’où peut-il bien venir ?

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Une fois n’est pas coutume, je commence par le texte car ce qui suit devrait être un joyeux bazar. Tout comme le sont certains étals de vide-grenier amateur, où l’on trouve tout et souvent, n’importe quoi, parmi lesquels des objets dont nous voudrions nous-même nous débarrasser s’ils nous appartenaient. Et que nous sommes pourtant prêts à acquérir car à 1 €, le « n’importe quoi » prend du galon et peut encore faire des heureux… On se dit : « A ce prix-là, ce n’est pas grave si cela ne fonctionne pas, si cela casse dans dix jours, si je ne le mets pas, si je le perds, si on me le vole, si… Au pire, je le revends au prochain vide-grenier ! ».

Du coup, j’ai loué mon mètre linéaire car, comme avant un déménagement hâtif, j’ai besoin de faire un peu de vide dans mon dossier hebdomadaire où j’accumule les photos envisagées pour ces duos quotidiens. Il y en a quelques unes que je ne peux plus voir en peinture, certaines prennent la poussière, et de nouvelles idées s’accumulent dans les carnets avec d’autres photos… Et puis, ce sont les vacances, cette coupure tant attendue où, comme au 1er janvier de chaque année, nous tentons de prendre de bonnes résolutions (soit dit en passant, c’est simplement car nous avons enfin le temps de nous poser, de sortir la tête hors de l’eau, et donc de penser, que nous essayons de reprendre la main sur notre quotidien pour les mois à venir ; ce que nous appelons communément des résolutions donc). Bref, trêve de bavardage, il est faussement 6h du matin, l’heure de tout déballer sur mon stand et d’essayer de lier ces images, dans l’ordre où elles se présentent à moi alors qu’elles n’ont rien en commun.

C’est parti :

Il faut toujours un point de départ. Une gare aux ombres énigmatiques et un sombre passager fuyant feront amplement l’affaire…

Oublions la gare de la ville où on y danse on y danse et prenons la vedette ! Cet îlot qui, de la crête de Crater Lake, a des allures de vaisseau fantôme (comprenez, on ne le voit pas tout le temps), ressemble, depuis le niveau de l’eau, à un trou noir, une sorte de grotte inversée dans un décor de rêve…

Qui nous ferait ressortir directement dans les ruelles de Kyoto où, un peu avant la tombée de la nuit, les geishas défilent en silence et sous le crépitement des flashs de badauds les attendant au tournant…

Je me suis alors demandé où pouvaient les conduire leurs pensées à cet instant précis où elles n’étaient plus qu’un personnage au visage figé, qu’une icône aux yeux des autres dont ils voulaient rapporter une image à tout prix… Peut-être sur cette plage Quileute de La Push, de l’autre côté de l’océan Pacifique, où reposent ces trois rochers majestueux…

Et où, paradoxalement, on traverse les paysages à vive allure…

Au risque de se heurter à un mur étrangement colonisé par du lichen déshydraté… Heureusement, une manœuvre réflexe permet d’éviter le choc frontal mais elle nous projette directement à l’embouchure de ce nouvel abysse, de cette sombre porte carrée sans fond apparent.

A l’autre bout de laquelle se trouve une plage normande éclairée sporadiquement par des pétards de fête nationale. C’est là que ça se gâte, que je perds le fil et que tout s’enchaîne sans transition ni autre explication que de courtes légendes lapidaires…

Paris, Nuit Blanche… Succès démesuré. Approcher l’installation de Vincent Ganivet relève du parcours du combattant. Lassés, les gens passent à côté sans lui jeter un œil.

Sagrada Familia. La lumière, dont je force volontairement le trait, inonde ce lieu d’une beauté sans pareille provoquant un séisme émotionnel de 9 sur l’échelle de Richter…

Pour le cliché, tout simplement. Impossible de se trouver à un tel endroit sans penser à un calendrier. Cela a quelque chose d’un peu ringard et en même temps, la ringardise a parfois ses avantages…

Sous les poursuites roses, une montagne humaine se lève et fait une hola aussi difficile à saisir que magique à voir… S’ensuit une avalanche d’images non légendées, un mélange de chaud et de froid, d’ici et d’ailleurs, de réalité et de faux-semblant, de proche et de lointain… Des images qui s’enchaînent sans d’autre raison que celle imposée par leurs noms qui s’enchaînent.

Voilà, en un coup d’ailes, c’est fini. Le stand est quasi vide. Je me sens légère tout d’un coup…

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Etre au bon endroit est une chose plutôt positive et agréable qui fait éprouver un doux sentiment de satisfaction à celui qui s’y trouve. Y être au bon moment s’avère encore mieux ! Envolons-nous vers le nord-ouest de Kyoto et larguons les amarres à l’entrée du Ryoan-ji. Ce nom ne vous dit peut-être rien mais ce temple abrite le plus célèbre jardin zen au monde et, à ce titre, est inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco. Voilà pour l’introduction touristique. En revanche, vous en avez sûrement vu des images car c’est un fond d’écran très prisé, justement pour la paix et la sérénité qu’il dégage, essentielles lorsque l’on s’apprête à travailler : quinze rochers entourés de mousse verte soigneusement dispersés sur un tapis de petits cailloux strié minutieusement au râteau. Métaphore en minuscule de la Nature : vagues, îles, montagnes… Il faut en effet un peu de calme et de solitude pour pouvoir apprécier toute la puissance de cette installation moderne vieille de plus d’un demi-millénaire, être capable d’entrer dans une phase de méditation et ainsi atteindre un état d’éveil !

Malheureusement, calme et solitude ne sont pas toujours au rendez-vous même si tout le monde a laissé ses chaussures à l’entrée. Réussir à apercevoir lesdits rochers (ils sont 15 en fait) derrière la barrière humaine photographique relève déjà d’un patient exercice de zénitude… Il faut attendre qu’une personne cède sa place pour pouvoir avancer et enfin les découvrir. Ce n’est que la première étape d’un long cheminement. Les trois petites marches qui surplombent le jardin, telles des gradins, sont noires de gens faisant semblant de méditer. L’intention de départ est bonne mais j’ai du mal à croire que cela soit possible dans ces conditions peu propices à l’introspection… Là encore, exercice de patience : les places assises sur les marches se libèrent une à une. Mais que peut-il bien se passer une fois que l’on a réussi à se loger entre deux candidats à l’éveil ? Beaucoup se contentent de prendre des photos (peut-être pour personnaliser leur fond d’écran !), certains se jettent dans leur guide ou fascicule pour en savoir plus, d’autres regardent laborieusement la composition en se disant qu’ils sont bien au bon endroit mais absolument pas au bon moment.  Une tradition veut que, quel que soit le point de vue, l’on ne puisse voir que 14 pierres à la fois (effet collatéral : tout le monde les compte pour vérifier : 1, 2, 3, 4… 14 et réalise, qu’effectivement, il en manque une, sauf que ce n’est jamais la même…). Vraisemblablement, le nombre 15 symboliserait l’achèvement, un état connu pour être inatteignable… Les dés étaient donc pipés dès le départ par les facétieux créateurs du Ryoan-ji !

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