Photo-graphies et un peu plus…
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Girafes au carré

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Tranches de vie

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Lorsque vous vous rendez à Londres par exemple, vous savez que, si vous le désirez, vous pouvez voir Buckingham Palace ; dans le golfe du Tonkin, la Baie d’Halong ; si vous allez à New York, vous vous attendez à apercevoir la Statue de la Liberté ; à Gizeh, la pyramide de Khéops ; à Paris, la Tour Eiffel ; à Niagara, les chutes éponymes ; à Yulara, Ayers Rock et ainsi de suite. Même si vous n’y êtes qu’une seule et unique journée. De façon générale, vous savez que, sauf cataclysme totalement imprévisible mais possible, en vous déplaçant sciemment à tel ou tel endroit pour admirer tel monument ou telle merveille de la nature, vous pourrez effectivement observer l’objet de votre désir. Le voyage a ses certitudes et elles sont les bienvenues. D’un certain point de vue, c’est la moindre des choses puisque cet élément convoité – naturel ou créé par l’homme donc – peut être ce qui a motivé l’évasion. Et il est rassurant de pouvoir se reposer sur leur pérennité même si les uns et les autres se dégradent irrémédiablement, du fait du temps qui passe et qui polit tout sur son passage, et de la présence même de l’homme, même respectueux de ce qui l’entoure.

Au même titre que les photos publicitaires sont généralement non contractuelles, cette convergence du désir du voyageur et de la réalité n’est pas garantie, quels que soient les efforts fournis ou les conditions réunies pour y accéder. Elle est certes courante, mais pas certaine. Vous pouvez ainsi planifier une semaine de safari au Kenya et ne voir que d’affreuses hyènes, de banales antilopes ou d’amusants suricates alors que vous rêviez de croiser le regard de lions, de girafes, d’éléphants ou encore de zèbres… Bon, j’avoue, vous n’auriez vraiment pas de chance… Reste que la rencontre avec ces animaux, même évoluant dans un parc et suivis à la trace par des pisteurs dévoués et missionnés pour vous satisfaire, est aléatoire, hors de portée de ce que vous maîtrisez habituellement. Et c’est en partie ce doute, cette attente pleine d’espérance qui rend la confrontation si puissante lorsqu’elle arrive. Et la frustration immense lorsqu’elle n’a pas lieu.

Il en est de même avec les phénomènes extra-terrestres. En particulier, les aurores. Boréales, australes, ne chipotons pas pour les hémisphères… Même lorsque les conditions optimales sont réunies donc — faire l’équilibriste à l’extrême nord du globe (entre 63°N et 70°N) – ce qui n’est déjà pas une mince affaire – ; choisir la bonne période, entre septembre et mars – ce qui laisse une fenêtre assez large – ; privilégier une année où l’activité du soleil, à l’origine de ce spectacle renversant, est à son apogée – en ce moment et pour un an encore ; multiplier les chances d’en voir – en restant plusieurs jours dans ladite zone –, vous pouvez rentrer bredouille de votre pêche au miracle atmosphérique ou avec quelques sardines dans le filet alors que vous rêviez de marlins, d’espadons et autres barracudas. En l’occurrence, cette aurore-là, si belle soit-elle avec le recul, est une sardine. Si déplacé que cela puisse résonner pour qui n’en a jamais vu. Niveau 1 sur une échelle en comptant 10. Ce qui laisse imaginer le séisme sensoriel que peut provoquer la vue de cette danse autant particulière que particulaire de niveau 5, 7 voire plus. Un Graal émotionnel que j’ai, par chance ou malchance, pu ressentir, à l’occasion de mon dépucelage auroral totalement inattendu il y a une douzaine d’années. Un Graal émotionnel que je cherche donc à revivre depuis, que je souhaite à chacun d’éprouver tant il dépasse l’entendement, et qui motivera une nouvelle évasion avec son lot d’aspiration, d’inspirations, de gorge serrée, de larmes versées et d’éblouissement certain… Et finalement, ne pas être sûr de ce que l’on va découvrir ailleurs est une belle façon de ne pas se lasser du voyage…

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Je ne les retrouvais plus, ces photographies. Enfin, pas celles-ci justement, ou alors, en partie seulement. C’était à une autre époque… Celle où l’argentique était roi, avec ses pellicules et ses délais de livraison. Pas de nostalgie dans ces mots. Simplement, je resitue le contexte. Aujourd’hui, avec le numérique, la notion de pellicule, au-delà de l’objet lui-même, de cette petite bobine à film noir avançant au fur et à mesure que l’on déclenche, est devenue totalement obsolète. Encore que nous pourrions la comparer à la carte photo, dont la capacité est bien plus impressionnante ! Aujourd’hui, si l’on veut faire une photo à 125 ISO et la suivante à 400 ISO avant de revenir à 125 voire passer à 800, il suffit d’aller dans le menu et de choisir sa sensibilité… Simple comme bonjour !

Dans le temps, pas si lointain, ce changement était un peu plus complexe… Il fallait rembobiner la pellicule, laisser la languette dépasser un peu pour pouvoir la réutiliser, bien noter à quelle vue on s’était arrêté sur le métal lui-même, puis installer une autre pellicule dans la boîte à images, faire ses photos et éventuellement, revenir à la première bobine. Cette dernière opération n’était pas sans risque : en réinsérant la pellicule partiellement utilisée dans son habitacle, il fallait en effet tenter de la caler comme la première fois, ne pas oublier de mettre le cache sur l’objectif, veiller à bien compter le nombre de vues déjà faites pour éviter les catastrophes, c’est-à-dire les superpositions indésirables, et déclencher éventuellement une ou deux fois supplémentaire pour plus de sécurité. Malgré toutes les précautions prises et les calculs faits, une surprise était toujours possible…

Il était ainsi tout à fait envisageable que le chiffre noté sur la pellicule, vous indiquant d’une part, qu’elle a déjà été impressionnée, et d’autre part, à quelle vue reprendre, s’efface. La petite bobine en question, pleine d’un passé capturé, retrouvait alors en quelque sorte sa virginité et se fondait dans la masse des pellicules non utilisées. A ce stade, vous ne vous doutiez de rien, même si vous aviez en mémoire ces images prises, que, bizarrement, vous ne retrouviez nulle part. Vous aviez bien ce vague souvenir d’avoir changé de pellicule en cours, mais la bête marquée au bic rouge demeurait introuvable. Peut-être perdue. Fâcheux mais envisageable. Comme il était tout à fait envisageable, à nouveau, que votre main, plongée dans le panier à pellicules en attente de rencontres photoniques, finisse par la saisir et la placer dans cette petite boîte noire convoitée… Un geste totalement innocent, presque naïf. Sauf que les images que vous découvriez n’étaient pas celles que vous espériez. Enfin, d’une certaine manière, si, mais pas de cette façon. La voilà, la pellicule perdue. Les voilà, ces images qui se pressaient à votre mémoire, persuadées d’avoir existé sans pour autant être réellement. Ainsi inextricablement liées à d’autres images, elles n’existeront d’ailleurs jamais pour elles-mêmes. Pour autant, le fruit de cette superposition totalement fortuite d’un ici et d’un ailleurs, est d’une beauté confondante voire troublante… On se perd dans deux univers artificiellement collés l’un à l’autre, prenant vie l’un dans l’autre, créant ainsi une espèce de monde chimérique envoûtant. Comme cette rue pavée, qui, au contact de ce jardin africain, se transforme en muret qu’elle n’est pas. Comme cette main délicatement posée sur un rideau qui se mue pourtant en pelleteuse inquiétante. Comme cette ruelle parisienne qui vient fendre en deux cette bâtisse couleur crème. Comme, enfin, cette silhouette solaire qui semble se reposer sur le feuillage d’un grand arbre poussant horizontalement… Ces images-là, et les autres, je n’aurais jamais pu les imaginer. C’est le hasard qui l’a fait pour moi. Et au final, n’est-ce pas lui, le créateur ?

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J’aime cette photo et en même temps, une partie de moi regrette de l’avoir prise. En la regardant, je revois la grappe de touristes que nous étions, débarquant dans ce village Masaï, la tête pleine (pour ma part) des histoires de Karen Blixen, pour admirer les hommes danser et sauter – très haut, sur eux-mêmes, comme s’ils avaient des ressorts à la place des jambes, ce qui est très impressionnant -, les femmes créer et vendre des bijoux avec de petites perles multicolores, et les enfants jouer, naturellement, imperméables à tout ce cirque. Evidemment, l’argent qu’ils gagnent en se produisant ainsi et en nous laissant déambuler dans leur monde comme dans un musée (pour ne pas écrire zoo), en nous permettant de les voir vivre tout simplement leur est utile voire nécessaire, mais la situation n’en demeure pas moins gênante. Comme une violation de territoire, consentie par défaut. Cela viendrait-il à l’idée d’un tour operator africain de proposer des visites de villages reculés de France pour y observer les petits vieux attendre la fin de la journée sur des bancs, à l’instar du retournement que Jean Rouch a proposé avec son film Petit à Petit ? Reste que lorsque nous voyageons, il est parfois difficile de faire le tri entre ce que nous désirons ardemment découvrir d’un pays et de ses habitants, et ce que nous accepterions en temps « normal »…

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Il n’y a rien, ou presque, qui sorte de cette terre désertique à des kilomètres à la ronde, hormis cet arbre noir, sec et étrangement seul. Comme s’il avait été abandonné là, sur le bord de la piste, comme un chien ou un chat sur une aire d’autoroute le premier jour des vacances d’été. L’a-t-il toujours été, seul, cet arbre ? Une forêt recouvrait-elle cette terre aride à une époque ? Et qui était là en premier, l’arbre ou la route ? Indépendamment de la réponse à cette question, pourquoi sont-ils si proches l’un de l’autre alors qu’il y a tant de place autour ? Et comment expliquer, enfin, que, sur une zone vraisemblablement vierge et sans contraintes (pas de cours d’eau, pas de crevasse, pas de montagne…), l’homme préfère tracer une route sinueuse plutôt qu’une ligne droite ?

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