Photo-graphies et un peu plus…

Vent de lavande

Les premiers pas dans une ville inconnue sont décisifs. Ils sont un peu comme les premières impressions lorsque l’on fait la connaissance d’une personne. Elles s’ancrent durablement en nous. Et tout ce qui suit ne semble avoir d’autre but que de les confirmer ou de les infirmer. Souvent, de les confirmer d’ailleurs. Je vous laisse imaginer l’enjeu lorsqu’elles sont un peu hâtives. Qu’il s’agisse d’une ville ou de vous. Et c’est d’ailleurs incroyable de réaliser à quel point tout se joue en une fraction de secondes et de façon quasi involontaire : une attitude qui exaspère ou impressionne d’emblée, une voix qui charme ou saoule instantanément, une gestuelle qui fatigue ou séduit immédiatement, une intonation qui calme ou excite subitement, un regard qui inquiète ou capte sur le champ…

Il en est de même avec une ville. Bien sûr, l’interaction est différente, mais il serait réducteur de penser qu’elle ne vient pas à vous au même titre que vous allez vers elle. La plupart du temps, me concernant, l’appréciation est d’abord visuelle. Elle est certainement somesthésique en réalité mais ce n’est pas conscient. En revanche, je regarde. Parfois, et c’est très rare, je sens d’abord. Une fois, j’ai senti une ville chocolat. C’était totalement inattendu et dès que je pense à elle, les effluves de cacao me reviennent en mémoire. Ici, à Vernazza, une fois plantée au milieu de la Strada Provinciale 61, celle-là même qui file de la gare à la mer Ligure, j’ai senti mes narines se dilater et humer l’air ambiant par de courtes inspirations saccadées. Il y avait là, flânant dans l’air, de venelle en venelle, une odeur d’enfance douce et heureuse. Celle du linge propre séchant au vent… Ainsi Vernazza restera-t-elle, à tout jamais et malgré les merveilles visuelles découvertes par ailleurs, la ville qui fleure bon la lessive parfumée dès le petit matin…

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Tolérance éphémère

Certes, cela ne se produit qu’à certains moments de l’année seulement et, à l’intérieur même de ces moments, qu’à certaines heures de la journée, mais, je dois l’admettre, dans ces conditions particulières de température et de pression, j’approuve, voire plébiscite, les rassemblements et autres manifestations de pigeons qu’en d’autres circonstances, j’évite comme la peste, expression pas totalement obsolète puisqu’il en existe encore malheureusement plusieurs foyers dans le monde.

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Grille de lecture

Il paraît que lorsque l’on nous interdit de faire quelque chose – n’importe quoi, traverser la rue, croquer dans le quignon d’une baguette chaude, sauter du 3e étage d’un immeuble, tapoter le bras de son voisin… -, il est impossible de ne pas se voir en train de désobéir, et donc de traverser la rue, de croquer dans le quignon, de sauter du 3e étage ou de tapoter le bras de son voisin… Le seul fait d’y penser suffirait en effet à créer cette vision mentale.

Un peu comme ici : j’ai beau me heurter à ce maillage noir totalement opaque et devoir admettre, par conséquent, qu’il ne me donne qu’une vision parcellaire de la scène se déroulant derrière lui, j’ai la sensation de voir à travers et, en me concentrant plus spécifiquement sur chaque portion de cette matière noire énigmatique, de redessiner et de reconstituer virtuellement les chaînons manquants – l’eau du lagon, les gondoles, les vaporetto, les immeubles et autres palazzo… – alors que ceux-ci, invisibles, pourraient même ne pas exister…

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Les trouble-tête

… cisaillent les horizons passagers de leurs formes éthérées et redessinent un monde émouvant point après point.

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La déclaration d'amur

ou quand Liwia et Dawid squattent, discrètement, le cœur d’un autre…

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Lignes de fuite

Quand tout semble bouché à l’horizon, il suffit de regarder en l’air pour y voir plus clair.

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La revanche des fêlés

Malgré son inclinaison inquiétante, et même déroutante, la Tour de Pise dégage un je-ne-sais-quoi de rassurant, et même de réconfortant. Son existence, et sa longévité surtout, donne en effet de l’espoir à tous les éclopés, tous les nés de travers et les malmenés par la vie qui se croient perdus d’avance : sans ce déséquilibre notable originel – un défaut dans les fondations repéré dès la construction ou bien un affaissement de terrain, meuble, en serait à l’origine -, sans ce que d’aucuns qualifieraient de handicap disqualifiant ad vitam æternam, la ville de Pise, qui a certes d’autres atouts, n’attirerait assurément pas autant de curieux, qu’ils soient avides de redresser ce joyau architectural ou pas…

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S'enflammer

Je pousse la lourde porte de bois dense sculpté et me heurte à ces frêles silhouettes dans la nuit profonde chargées d’un espoir à géométrie variable se consumant avec le souffle du temps…

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Un jour sans fin

J’aime cette heure de la journée où les hommes, tous âges et tous genres – au sens large – confondus, mettent fin à leurs occupations et, tels des zombies contemplatifs reprogrammés, convergent prestement vers des aires dégagées ; s’y dégotent un petit coin de paradis, celui-là même où ils pourront se poser, puis, les yeux rivés au ciel, perdre paradoxalement toute notion du temps alors même qu’ils l’observent passer au fur et à mesure que s’éclipse l’étoile aux quatorze branches, destinée, chaque jour, à disparaître derrière l’horizon pour en illuminer d’autres. Alors, ils se relèvent, presque en chœur, se dispersent, nonchalamment, dans la pénombre devenant nuit, et s’oublient, les uns les autres. Jusqu’au lendemain, même heure environ, à quelques minutes près, où le même rituel magnétique se reproduit sans qu’ils s’en lassent…

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Follow the flow 1

Flash-back !

– J’ai entendu parler de toi et de ta bande de p’tits copains ! Vous faites pas mal de bruit déjà, mais ça pourrait aller plus loin !

– Qu’est-ce que vous voulez dire, par là ?*

Je veux simplement dire que je ne suis pas arrivée, comme ça, là, par hasard, face à cette boule d’étourneaux tournoyant dans un ciel prêt à se coucher, comme eux d’ailleurs. Tout a commencé trois quart d’heures auparavant, grosso modo. Peut-être un peu moins, peut-être un peu plus. Je longeais les rives de l’Arno à Pise quand tout à coup, ils sont apparus au dessus de la ville. Des centaines de petits points noirs provenant d’un peu partout, comme si le directeur avait sonné la fin de la récréation et rappelait ses ouailles au bercail.

Follow the flow 2

Je pense instantanément « murmuration ». Dans le même temps, un large sourire vient zébrer mon visage. Je ne le vois pas évidemment, mais je le sens, sur mes joues, sur mes yeux, partout. Des murmurations, je n’en ai vu que des bouts en roulant sans pouvoir m’arrêter, ou en vidéo, en entier, sur Vimeo, YouTube ou DailyMotion. Et malgré tout, j’en frissonnais systématiquement. Cela me fait le même effet avec les bancs de poissons, sous l’eau donc.

Ces étourneaux, ou ces poissons, sont-ils conscients de la beauté fascinante et absolument envoûtante de la subtile chorégraphie qu’ils nous offrent (au-delà de toutes les questions pratiques que nous pouvons nous poser et qui gâchent un peu la magie : comment communiquent-ils, comment font-ils pour ne pas se heurter, qui décident de la forme à adopter… ?) ? Bref. Face à ce début de murmuration, je n’ai qu’une unique option : la suivre !

Follow the flow 3

Oui, la suivre. Vous n’auriez pas fait pareil ? Bon, lorsqu’une murmuration se produit en plein champ ou au dessus d’un lac, il n’y a qu’à se planter au milieu et admirer… En ville, avec des ponts à traverser (le ballet a commencé sur l’autre rive), des rues étroites et un champ de vision réduit, des angles droits, des feux rouges et de la circulation, la traque pacifique s’avère un peu plus complexe, d’autant qu’un oiseau vole plus vite qu’un humain ne marche… Me voilà donc les yeux rivés au ciel déambulant ou plutôt courant dans les rues de Pise en veillant à ne pas trébucher sur un pavé quelconque ni à perdre de vue l’escadron qui, manifestement, file vers un endroit très précis et qui, au fur et à mesure qu’il s’en approche, est rejoint par des retardataires…

Follow the flow 4Follow the flow 6

Dernier virage, je sens que j’arrive au point de rassemblement. En pleine ville. La lumière diminue vite (sous-texte : pardonnez les réglages approximatifs de l’appareil : difficile d’être totalement opérationnelle dans de telles circonstances !). Je sais maintenant que je suis au milieu du champ, ou du lac, et que je n’ai plus qu’à admirer…

Follow the flow 5

Le ciel est totalement tacheté par ces milliers d’oiseaux dont le vol est de moins en moins anarchique. Ils ont beau être assez hauts, j’entends le bruissement de leurs ailes démultipliées lorsqu’ils passent au dessus de ma tête, ou virent subitement de bord comme si une, ou plutôt des milliers, de mouches les avaient piqués. Je les vois se mettre en boule dense, prendre des formes étranges – un poisson, vraiment ? -, fusionner par petits groupes pour mieux se séparer quelques instants plus tard ou constituer de gros amas nuageux… En boucle pendant plusieurs minutes.

Follow the flow 7

Et puis, à les observer faire des ronds dans le ciel dans un sens puis dans l’autre, à monter puis descendre comme s’ils enchaînaient des tours du pire manège de montagne russe qui soit – invisible je précise -, je comprends. Je comprends que ce qu’ils convoitent, en bons troubadours du ciel, n’est autre qu’un toit. En l’occurrence un arbre. Ou deux. Ou trois. En tout cas, des branches sur lesquelles se poser pour la nuit…

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Et aussi rapidement qu’ils sont apparus, ils disparaissent dans leur nid géant qui les gobe en frétillant et en gonflant le torse. Bientôt, un silence léger enveloppe l’atmosphère, à peine rompu par quelques soubresauts de l’arbre. J’attends que toutes les traces de cet extraordinaire spectacle disparaissent pour m’éclipser définitivement et continuer à rêver en murmurant à l’air qui m’entoure que je suis une sacrée chanceuse…

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